Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 septembre 2015, MmeB..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 11 mars 2015 ;
2°) d'annuler les décisions des 9 janvier et 2 mai 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le signataire de la décision du 2 mai 2012 est incompétent ;
- en ajournant sa demande de naturalisation pour le motif tiré du défaut d'autonomie matérielle pérenne le ministre a commis une erreur manifeste d'appréciation ; elle réside chez sa mère et dispose de ressources suffisantes au regard de ses besoins d'étudiante ; elle s'assume également en travaillant à temps partiel en qualité de secrétaire pour le compte d'une entreprise ;
- si la circulaire du 12 mai 2000 est dépourvue de valeur réglementaire, elle donne toutefois un éclairage en matière de naturalisation des étudiants ; elle précise ainsi qu'une insertion professionnelle incomplète peut être compensée par une bonne intégration sociale, ce dont elle justifie très largement ; cette circulaire ajoute aussi que la prise en charge par un ascendant d'un étudiant se substitue à la possession de ressources en France.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 septembre 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions à fin d'annulation de la décision préfectorale du 9 janvier 2012 sont irrecevables ;
- le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision ministérielle du 2 mai 2012 sera écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de la circulaire du 12 mai 2000 est inopérant ;
- pour le surplus, les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- il renvoie à ses écritures de première instance qu'il reprend subsidiairement.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 6 juillet 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pérez, président-rapporteur.
1. Considérant que MmeB..., ressortissante pakistanaise, relève appel du jugement du 11 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 janvier 2012 par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que de la décision du 2 mai 2012 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration rejetant son recours hiérarchique et maintenant l'ajournement de sa demande pour une durée de deux ans.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision préfectorale du 9 janvier 2012 :
2. Considérant que le tribunal administratif de Nantes a rejeté comme irrecevables les conclusions de Mme B...dirigées contre la décision du 9 janvier 2012 du préfet de la Haute-Vienne ; que l'intéressée ne conteste pas l'irrecevabilité opposée par les premiers juges à ses conclusions ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ces conclusions ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision ministérielle du 2 mai 2012 :
3. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée, que la requérante renouvelle en appel sans apporter aucune précision supplémentaire, doit être écarté par adoption des mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'insertion professionnelle du postulant, ainsi que le niveau et la stabilité de ses ressources ;
5. Considérant que pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de MmeB..., le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration s'est fondé sur le fait que l'intéressée poursuivait ses études et n'avait pas encore acquis son autonomie matérielle par l'exercice d'une activité professionnelle ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, Mme B...était lycéenne, scolarisée en terminale, et était hébergée chez sa mère ; que, dans ces conditions, en ajournant à deux ans la demande de naturalisation de la postulante pour ce motif, le ministre, qui a fait usage de son large pouvoir d'appréciation de l'opportunité d'accorder la naturalisation demandée, n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste ; que la légalité d'une décision s'appréciant à la date à laquelle elle a été prise, la requérante ne peut utilement se prévaloir de contrats de travail conclus le 8 décembre 2012, puis le 7 août 2015, postérieurement à la décision contestée ;
7. Considérant en dernier lieu, que Mme B...ne peut utilement se prévaloir ni des orientations générales énoncées par le ministre chargé des naturalisations dans sa circulaire du 27 juillet 2010 relative à la déconcentration de la procédure d'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique, ni de sa bonne intégration dans la société française ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que les conclusions présentées par Mme B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne sauraient, par suite, être accueillies ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 14 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président assesseur,
- Mme Buffet, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 5 juillet 2016.
Le président assesseur,
JF. MILLET
Le président-rapporteur,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT02763 3
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