Elle soutient que :
- les dispositions de l'article R. 752-51 du code de commerce ont été méconnues ;
- le dossier de demande d'autorisation était incomplet, en ce qui concerne notamment l'impact global du projet sur les flux routiers, la détermination de la zone de chalandise, l'insertion du projet dans son environnement, ses effets pour la protection des consommateurs et des salariés, l'adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation ;
- le projet de la SAS Côtes des Légendes compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi, en matière notamment de protection des consommateurs, d'aménagement du territoire et de développement durable ;
Un mémoire de production de pièces a été présenté le 30 janvier 2015, par la Commission nationale d'aménagement commercial.
Par des mémoires, enregistrés les 16 février 2015 et 25 mai 2016, la société Côtes des Légendes, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société Distribution Casino France à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête n'est pas recevable ; la société Distribution Casino France ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour contester la décision attaquée ;
- les moyens soulevés par la société Distribution Casino France ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;
- la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Buffet,
- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., substituant MeC..., représentant la société Distribution Casino France.
1. Considérant que la société Distribution Casino France demande l'annulation de la décision du 16 juillet 2014 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) après avoir rejeté son recours dirigé contre la décision du 13 mars 2014 de la commission départementale d'aménagement commercial du Finistère, a accordé à la SAS Côtes des Légendes l'autorisation préalable requise en vue de l'extension d'un ensemble commercial par agrandissement, sur une surface de vente de 480 m2, de l'hypermarché existant à l'enseigne E. Leclerc, et création d'une parapharmacie d'une surface de vente de 220 m2 ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article R. 752-51 du code de commerce : " Le commissaire du gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu'il présente à la commission nationale " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 752-16 du même code : " Pour les projets d'aménagement commercial, l'instruction des demandes est effectuée conjointement par les services territorialement compétents chargés du commerce ainsi que ceux chargés de l' urbanisme et de l'environnement " ;
3. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que les ministres intéressés, au sens de l'article R. 752-51 du code de commerce, sont ceux qui ont autorité sur les services chargés d'instruire les demandes, soit les ministres en charge du commerce, de l'urbanisme et de l'environnement ; qu'il ressort des pièces du dossier que les avis des 11 et 15 juillet 2014 de ces ministres ont été présentés, par le commissaire du gouvernement, à la commission et ont été signés par des personnes dûment habilitées à cet effet ; que, dès lors, les moyens tirés de l'irrégularité de la consultation des ministres intéressés doivent être écartés ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 752-7 du code de commerce, dans sa rédaction alors en vigueur : " La demande est accompagnée : (...) ; 2° Des renseignements suivants : a) Délimitation de la zone de chalandise du projet, telle que définie à l'article R. 752-8 (...); b) Desserte en transports collectifs et accès pédestres et cyclistes ;(...) II.-La demande est également accompagnée d'une étude destinée à permettre à la commission d'apprécier les effets prévisibles du projet au regard des critères prévus par l'article L. 752-6. Celle-ci comporte les éléments permettant d'apprécier les effets du projet sur : 1° L'accessibilité de l'offre commerciale ; 2° Les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ainsi que sur les accès sécurisés à la voie publique ; 5° Les paysages et les écosystèmes ".
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans son dossier de demande d'autorisation, la société pétitionnaire a estimé à 282 visiteurs l'accroissement maximal de flux quotidien de voitures particulières, et à 107 véhicules par jour, l'accroissement résultant de l'augmentation du chiffre d'affaires de l'hypermarché, dans ce secteur où le flux de circulation s'établit à 6 787 véhicules par jour ; que le moyen tiré de ce que l'accroissement du trafic routier serait " totalement approximatif voire fantaisiste " n'est assorti d'aucune précision ; qu'elle a défini, page 12 et suivantes, la zone de chalandise retenue qu'elle a divisée en sous-zones selon le temps de parcours nécessaire pour se rendre sur le site du projet ; que la circonstance qu'elle n'a pas présenté de " données relatives aux populations pouvant accéder au projet en mode doux " est, en tout état de cause, sans incidence dès lors qu'il n'est pas contesté qu'il n'existe pas de piste cyclable à proximité ; qu'elle précise, dans son dossier, s'agissant de l'insertion dans son environnement du projet que celui-ci consiste en un réaménagement du bâti existant, par construction d'un bâtiment dans une cour de service, sans transformation extérieure ; qu'elle indique que le projet apportera aux consommateurs une offre nouvelle de parapharmacie et un meilleur confort d'achat ; qu'enfin, les dispositions précitées de l'article R. 752-7 du code de commerce n'imposent pas que soient présentés les effets du projet " pour les salariés " ou " l'adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation " ; que, dans ces conditions, contrairement à ce qui est soutenu, la société Côtes des Légendes a fourni, dans le dossier de demande d'autorisation, des informations suffisantes pour permettre à la Commission nationale d'apprécier ces éléments, ainsi que le prévoit l'article R. 752-7 du code de commerce ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la Commission nationale d'aménagement commercial s'est prononcée au vu d'un dossier incomplet doit être écarté ;
6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions (...) d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales (...) ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés " ; qu'aux termes de l'article L. 752-6 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; / b) L'effet du projet sur les flux de transport ; / c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ;(...)" ;
7. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ;
8. Considérant qu'en se bornant à faire valoir que l'implantation du projet est de nature à compromettre l'équilibre entre les différentes formes de commerce, qu'il ne contribuera pas à l'animation de la vie urbaine de la commune et que l'opération va nécessairement engendrer une augmentation du trafic, la société Distribution Casino France ne démontre pas que ce projet, d'une extension très limitée, qui est implanté à proximité du centre bourg au sein d'une zone d'habitat pavillonnaire destinée à se densifier, dans la zone d'aménagement concerté de l'Oratoire identifiée par le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du pays de Brest comme un pôle structurant ayant vocation à accueillir notamment les grandes surfaces alimentaires, desservie par les voies routières et par une ligne de bus, serait de nature à méconnaître les objectifs en matière d'aménagement du territoire ; que, s'agissant du respect des dispositions en matière de développement durable, la construction nouvelle respectera la réglementation thermique en vigueur, que des panneaux voltaïques seront mis en place, que sont prévus des éclairages à basse consommation et des économiseurs d'eau, et, qu'ainsi que le souligne le rapport d'instruction établi sur ce projet, l'extension autorisée, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait visible d'un monument classé, n'aura aucun impact sur les paysages ; que la circonstance que le projet n'est pas accessible par les modes de transports doux ne saurait, à elle seule, justifier le refus d'accorder l'autorisation sollicitée ; qu'enfin, la société Distribution Casino France soutient que le projet méconnaît l'objectif de protection des consommateurs au motif que l'offre commerciale dans la zone de chalandise est suffisante, que le centre ville comporte de nombreux commerces et que cette opération " prélèvera immanquablement l'actuelle clientèle des commerces traditionnels " ; qu'elle n'apporte, en tout état de cause, aucun élément à l'appui de son moyen alors qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, le projet autorisé par la décision attaquée prévoit la création d'une parapharmacie et un agrandissement limité de la surface de vente de l'hypermarché existant dans le but de réorganiser et d'améliorer son offre commerciale ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Commission nationale d'aménagement commercial n'a pas fait, par la décision attaquée, une inexacte application des dispositions rappelées ci-dessus du code de commerce ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête, la société Distribution Casino France n'est pas fondée à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat et de la société Côtes des Légendes, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la société Distribution Casino France demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la société Distribution Casino France, le versement de la somme de 1 000 euros que la société Côtes des Légendes demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Distribution Casino France est rejetée.
Article 2 : La société Distribution Casino France versera à la société Côtes des Légendes une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Distribution Casino France, à la Commission nationale d'aménagement commercial et à la société Côtes des Légendes.
Délibéré après l'audience du 31 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Perez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- Mme Buffet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 juin 2016.
Le rapporteur,
C. BUFFET Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT02867