Résumé de la décision
Dans cette affaire, le préfet de la Mayenne a demandé l’annulation d’un jugement du tribunal administratif de Nantes qui avait annulé deux arrêtés du 20 février 2017, ordonnant la remise de M. et Mme D..., ressortissants arméniens, aux autorités tchèques. Le tribunal a jugé que le signataire des arrêtés n’avait pas la compétence requise en vertu du cadre légal applicable. Après examen de l’appel, la cour a confirmé la décision du tribunal administratif, rejetant la requête du préfet et lui ordonnant de verser 1 500 euros à l'avocat de M. et Mme D... pour leurs frais de justice.
Arguments pertinents
1. Incompétence du signataire : La cour a souligné que le moyen de contestation relatif à l'incompétence du signataire des actes était « suffisamment caractérisé ». Le préfet soutenait que le directeur de la réglementation et des libertés publiques avait la compétence en vertu d'une délégation de signature; cependant, cette délégation ne couvrait pas les décisions de remise de demandeurs d'asile à un État tiers. La cour a donc conclu que le jugement du tribunal administratif, qui avait annulé les arrêtés du préfet, était fondé.
> « Or, il n'est pas fait mention des décisions de remise des demandeurs d'asile en France à un Etat tiers… De telles décisions n'entrent donc pas dans le champ de ladite délégation. »
2. Fonds de l’affaire : En validant les arguments des requérants, la cour a affirmé que les décisions contestées étaient prises en méconnaissance de la législation qui régit les délégations de signature et d’autres régles spécifiques à la procédure d’asile, inscrites dans le cadre du règlement (UE) n° 604/2013 qui régit la détermination de l’État responsable de l'examen d'une demande d'asile.
> « Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Mayenne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé les arrêtés litigieux du 20 février 2017. »
Interprétations et citations légales
La décision se fonde sur plusieurs textes législatifs et réglementaires qui encadrent les procédures liées à l'asile et aux délégations de signature. Les principaux textes cités incluent :
- Règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : Ce règlement établit les critères et mécanismes pour déterminer l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile. La cour a stipulé que le préfet était tenu par ce règlement, qui prévoyait la prise en charge des demandeurs d'asile par l'État ayant délivré le visa, en l'occurrence, la République tchèque.
- Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 : Celle-ci concerne l’aide juridictionnelle. La cour a alloué des frais d’avocat sous cette loi, en précisant que le versement devait se faire sous réserve que l’avocat renonce à la part contributive de l'État.
- Code de justice administrative - Article L. 761-1 : Cet article traite des frais de justice à la charge de l'État dans les cas où une partie obtient gain de cause dans un litige administratif.
La décision illustre ainsi l'interprétation stricte des délégations de signature et les conséquences juridiques sur les procédures d'asile, en soulignant que les signataires doivent agir dans les limites de leur compétence définies par les arrêtés de délégation de signature.