Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2016, MmeA..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 15 septembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 février 2015 du préfet du Loiret ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, de reprendre l'instruction de sa demande et de l'admettre provisoirement au séjour dans cette attente, au besoin sous astreinte de 100 euros par jour de retard à partir d'un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me D...d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
- compte tenu de sa situation particulière de victime de tentative de meurtre par son ancien compagnon, lequel a été condamné pour ces faits, requalifiés de violences volontaires, à cinq années d'emprisonnement dont une année avec sursis, et de la nécessité pour elle de demeurer en France à l'effet, d'une part, de solliciter une indemnisation auprès de la commission d'indemnisation des victimes d'infractions, et d'autre part, d'accéder aux soins nécessaires pour elle-même en raison de ses blessures et pour son fils né, prématurément, de sa relation avec M. B..., son nouveau compagnon, elle remplit les conditions pour obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 311-12 et L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- que compte tenu de ces circonstances, elle justifie de circonstances exceptionnelles et de motifs humanitaires permettant son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet du Loiret, qui aurait dû saisir préalablement la commission du titre de séjour, a méconnu les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision contestée est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2016, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 décembre 2015
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique ;
- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur.
1. Considérant que MmeA..., ressortissante de la République Démocratique du Congo, née en 1985, est entrée en France le 10 septembre 2012 selon ses déclarations ; qu'elle a sollicité le statut de réfugié, dont le bénéfice lui a été refusé par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 30 septembre 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 9 décembre 2014 ; que, le 2 juillet 2014, elle a demandé la régularisation de sa situation administrative ; que, par arrêté du 16 février 2015, le préfet du Loiret a refusé à Mme A...la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français ; que l'intéressée relève appel du jugement n°1501438 du 15 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision refusant le titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'en outre, en vertu des dispositions du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit à l'étranger dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des motifs pour lesquels un refus est opposé ;
3. Considérant que Mme A...fait valoir que son ancien compagnon, père de ses deux enfants restés en République Démocratique du Congo, a tenté de la tuer et qu'à la date de l'arrêté contesté, la procédure pénale était en cours et requérait sa présence pour la manifestation de la vérité ; que si la condamnation pénale de son ex compagnon est désormais définitive, il lui faut saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions afin d'obtenir l'indemnisation de son préjudice, son agresseur n'étant pas solvable ; qu'elle fait valoir, en outre, que ses blessures importantes nécessitent encore aujourd'hui un suivi médical ; qu'elle se prévaut également d'une vie familiale en France avec son nouveau compagnon, de nationalité congolaise, père de son enfant né le 7 septembre 2014, et fait valoir que l'état de santé de cet enfant nécessite, en raison de sa prématurité, des soins et un suivi médical en France et justifierait la délivrance d'une autorisation de séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée est entrée récemment et irrégulièrement sur le territoire français ; qu'elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses deux premiers enfants et où la cellule familiale avec son nouveau compagnon et son dernier enfant peut être reconstituée ; qu'alors qu'il est constant qu'elle n'a pas saisi le préfet d'une demande de titre de séjour en tant qu'étranger malade ou accompagnant un enfant malade, les documents qu'elle produit n'établissent pas que son état de santé ou celui de son enfant nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut devrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni qu'il n'existerait pas de traitement approprié en République Démocratique du Congo ; qu'enfin Mme A...pourra se faire représenter par un avocat pour la mise en oeuvre de la procédure d'indemnisation de son préjudice ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et de la durée et des conditions du séjour en France de MmeA..., la décision de refus de titre de séjour n'a pas portée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que par suite le préfet du Loiret n'a, en prenant la décision contestée, méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ;
5. Considérant que les circonstances invoquées au point 3 du présent arrêt ne suffisent pas à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens de ces dispositions ; que Mme A...n'est dès lors pas fondée à se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant, en troisième lieu, que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui précède que, Mme A...ne pouvant prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire, le préfet du Loiret n'était pas tenu de consulter cette commission avant de statuer sur sa demande et n'a dès lors pas méconnu les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, qu'ainsi qu'il résulte des points 2 à 6, la décision portant refus de titre de séjour n'est pas illégale ; que Mme A...n'est par suite pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'annulation doivent dès lors être rejetées, ainsi que par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2016.
Le rapporteur,
C. LOIRATLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
1
N°16NT00297 2
1