Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 7 août 2017, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1704006/3-2 du 7 juillet 2017 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 23 février 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pour la durée nécessaire au réexamen de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet de police a commis une erreur de droit en fondant son refus sur les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il aurait dû l'examiner par rapport aux dispositions de l'article L. 313-14 du même code ;
- il a commis une erreur d'appréciation car toutes les conditions étaient réunies pour qu'il bénéficie du renouvellement de son titre de séjour ; son employeur n'a pas eu connaissance du courrier qui lui a été adressé ; il justifiait au moins de motifs exceptionnels au regard de sa situation professionnelle ;
- il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant bangladais né en mars 1992 et entré en France en mars 2009, a obtenu le 26 juin 2015 la régularisation de sa situation et la délivrance d'un titre de séjour " salarié " valable du 22 juin 2015 au 21 juin 2016 pour occuper un emploi de commis de cuisine à Paris. Il a sollicité en mars 2016 le renouvellement de ce titre de séjour en se prévalant d'un nouvel emploi de cuisinier à Cannes. Par un arrêté du 23 février 2017, le préfet de police a rejeté sa demande au motif que son contrat de travail n'avait pas été visé conformément à l'article R. 5221-20 du code du travail et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. B... fait appel du jugement du 7 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable lors de la délivrance d'une carte de séjour " salarié " à M. B..., dispose : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ". L'article L. 313-10 du même code dispose : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-1 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". / La carte de séjour est prolongée d'un an si l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi. Lors du renouvellement suivant, s'il est toujours privé d'emploi, il est statué sur son droit au séjour pour une durée équivalente à celle des droits qu'il a acquis à l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1 du code du travail (...) ". L'article R. 313-36-1 du même code dispose : " Lorsque l'étranger sollicite le renouvellement de la carte de séjour temporaire délivrée au titre des dispositions du 1° de l'article L. 313-10, il doit présenter (...) les pièces suivantes : / 1° En cas de poursuite de son contrat à durée indéterminée, l'autorisation de travail accordée à son employeur correspondant à l'emploi occupé ; / 2° Dans les autres cas, un formulaire de demande d'autorisation de travail, pour la conclusion d'un contrat à durée indéterminée avec un employeur établi en France correspondant à l'emploi sollicité. Ce formulaire est conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du travail (...) ".
3. En premier lieu, la circonstance qu'un étranger a obtenu un premier titre de séjour " salarié " en faisant état de " motifs exceptionnels " justifiant que ce titre lui soit délivré alors qu'il ne remplissait pas l'ensemble des conditions prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne fait pas obstacle à ce que le préfet examine la demande de renouvellement du titre qui lui a été délivré dans les conditions de droit commun de l'article R. 313-36-1 du même code, notamment quant à la vérification de la condition de détention d'un emploi salarié conforme à la réglementation. Ainsi, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit en rejetant la demande de renouvellement présentée par M.B..., qui ne se prévalait d'ailleurs pas de l'article L. 313-14, au motif que son autorisation de travail n'avait pu être renouvelée faute pour son nouvel employeur d'avoir fourni les documents demandés par les services chargés de l'emploi.
4. En deuxième lieu, si M. B... fait valoir que son nouvel employeur n'a pas reçu la demande de renseignements complémentaires que les services chargés du travail et de l'emploi lui ont adressé le 16 novembre 2016, il ressort des pièces du dossier que cette demande, adressée à Cannes à l'adresse mentionnée sur la demande d'autorisation de travail, a été retournée à l'administration par les services postaux au motif que le destinataire était " inconnu à cette adresse ". Par suite, le moyen tiré du vice de procédure ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, il est constant que, faute pour l'employeur cannois de M. B... d'avoir fourni les documents demandés, celui-ci ne remplissait pas les conditions prévues pour le renouvellement de son titre de séjour " salarié ". En toute hypothèse, M.B..., qui se prévaut désormais d'un emploi à Cannes alors qu'il réside à Paris, ne justifie pas de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
6. En quatrième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
7. M. B...fait valoir la durée de sa résidence en France, pays où il entré alors qu'il était mineur, ainsi que son intégration sociale et professionnelle et soutient qu'il est dépourvu de toute attache au Bangladesh. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M.B..., s'il vivait depuis sept ans en France à la date de la décision attaquée, s'est marié au Bangladesh le 18 avril 2016 avec une compatriote qui y réside et qu'il est sans charge de famille et sans attaches familiales en France. Dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête d'appel, y compris ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut qu'être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 13 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 janvier 2019.
Le rapporteur,
A. LEGEAILa présidente,
S. PELLISSIERLe greffier,
A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02752