Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2016, M.A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1408809 du 23 juin 2016 du Tribunal administratif de Melun en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 15 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- les premiers juges n'ont pas examiné les pièces versées au dossier et ont limité leur analyse à la thèse de l'administration ; ils ont ainsi méconnu les principes de l'égalité des armes et du droit au procès équitable énoncés aux articles 6 et suivants de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 4 décembre 2014 du Tribunal administratif de Melun ne peut être opposée dès lors que ce jugement ne porte pas sur la réclamation préalable du 10 mars 2014, contrairement à la présente procédure qui par ailleurs a été introduite devant le Tribunal administratif de Melun avant que le jugement du 4 décembre 2014 ne soit rendu ; les deux procédures sont donc distinctes ;
- la proposition de rectification en date du 16 mai 2011 n'est pas suffisamment motivée ; elle est fondée notamment sur le contrôle fiscal de la société Immobilier ZT auquel il n'a pas été associé et il n'a pas reçu la proposition de rectification adressée à la société Immobilier ZT ; l'administration devait lui communiquer ce document ;
- l'administration fiscale ne lui a pas communiqué, en annexe à la proposition de rectification qui lui a été adressée, les " droits de communication " concernant la société Immobilier ZT et les copies des accusés de réception signés ;
- l'administration n'a pas analysé les relations ayant existé entre la SCI Masséna et la société Immobilier ZT ; le bien immobilier de la SCI Masséna a été transféré à la SARL Immobilier ZT comme en atteste la lettre du notaire ; les différents versements effectués, notamment par un apport de 77 250 euros, financés par des prêts familiaux au bénéfice de la SCI Masséna permettent de justifier les apports sur son compte courant d'associé ; les apports nécessaires à l'acquisition des biens par la SARL Immobilier ZT ont été financés en particulier par ses soins par l'intermédiaire de la SCI Masséna ;
- l'administration n'apporte pas la preuve qu'il a appréhendé la somme de 149 739,20 euros ;
- l'administration doit produire la proposition de rectification adressée à la société Immobilier ZT, la copie de l'accusé de réception, les " droits de communication " et la réponse du syndic ;
- la majoration de 40% n'est pas fondée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 décembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la SARL Immobilier ZT, qui exerçait une activité de marchand de biens et dont M. A...était l'un des associés et le cogérant, d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal de la SCI Masséna, dont M. A... était également l'un des associés, et d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal personnel de M.A..., celui-ci s'est vu assigner, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 ; que M. A... fait appel du jugement du 23 juin 2016 du Tribunal administratif de Melun en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009, ainsi que les pénalités correspondantes ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient M.A..., le tribunal ne s'est pas borné à reprendre la position de l'administration, mais a procédé à l'examen des éléments présentés par l'intéressé et a répondu à l'ensemble des moyens qu'il soulevait ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le tribunal a méconnu les principes d'égalité des armes et du droit à un procès équitable énoncés à l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 4 décembre 2014 du Tribunal administratif de Melun :
3. Considérant que, par un jugement en date du 4 décembre 2014, devenu définitif, le Tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de M. A...tendant notamment à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 ; que l'autorité relative de la chose jugée qui s'attache à ce jugement en raison de l'identité de parties, d'objet et de cause, et nonobstant la circonstance que le contribuable a présenté une nouvelle réclamation le 10 mars 2014, s'oppose à ce qu'il soit statué à nouveau sur le bien-fondé de ces mêmes impositions, comme l'a estimé à juste titre le tribunal ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation / (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;
5. Considérant que la proposition de rectification du 16 mai 2011 adressée à M. A... mentionnait les années contrôlées et les impositions concernées ; qu'elle indiquait la nature, le montant et les motifs des rectifications envisagées ; qu'enfin, elle rappelait le montant des impositions et des pénalités mises à la charge de M. A...qui disposait ainsi de l'ensemble des informations nécessaires pour les contester utilement ; que le service, qui a mentionné les éléments issus de la vérification de comptabilité de la société Immobilier ZT sur lesquels il s'est fondé pour envisager les rectifications en litige, n'avait pas à annexer à la proposition de rectification adressée à M. A...celle qui avait été notifiée à la société Immobilier ZT ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la proposition de rectification du 16 mai 2011 serait insuffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l' article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ; qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications ;
7. Considérant qu'il ressort des termes de la proposition de rectification du 16 mai 2011 adressée à M. A...que le service s'est notamment basé, pour fonder les redressements litigieux, sur des copies des chèques portés au débit du compte 467 de la société Immobilier ZT qu'il avait obtenues en usant de son droit de communication auprès de la caisse d'épargne d'Ile-de-France, qui gérait le compte bancaire de la société Immobilier ZT ; que ces éléments d'information mentionnés dans la proposition de rectification, qui comportaient l'identité du tiers ayant communiqué à l'administration les renseignements considérés et étaient d'une précision suffisante, ont été portés à la connaissance du contribuable ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. A... aurait demandé en vain à l'administration fiscale la communication d'une copie de ces documents avant la mise en recouvrement des impositions en litige qui est intervenue le 30 novembre 2011 ; que si M. A...soutient également que le service aurait dû lui communiquer la copie des " AR signés ", il n'apporte pas les éléments nécessaires permettant d'identifier les accusés de réception en cause ; que de même, en tout état de cause, en l'absence de demande en ce sens, l'administration n'était pas tenue de communiquer à M. A...la proposition de rectification qui a été notifiée à la SARL Immobilier ZT ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté ;
8. Considérant, en troisième et dernier lieu, que le requérant soutient qu'il n'a pas été associé à la vérification de comptabilité de la société Immobilier ZT ; que toutefois, en vertu du principe de l'indépendance des procédures d'imposition, les irrégularités qui entacheraient, selon M. A..., la procédure de vérification de comptabilité engagée à l'encontre de cette société, dont il était l'un des associés ainsi que le cogérant, sont sans influence sur la régularité de la procédure suivie à son encontre ainsi que sur le bien-fondé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge ; que, par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont écarté ce moyen ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions au titre de l'année 2008 :
9. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices / (...) " ; qu'il appartient en principe à l'administration, lorsque le contribuable a régulièrement contesté les rectifications, d'apporter la preuve de l'existence et du montant de ces distributions ainsi que de leur appréhension ;
10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité de la société Immobilier ZT , dont M. A...était l'un des associés et le cogérant comme il a déjà été dit, a révélé que cette société a comptabilisé en charges, le 31 décembre 2008, une facture de travaux de rénovation d'appartements à l'entête de la société BTP Challenge, en date du 11 janvier 2008, pour un montant toutes taxes comprises de 149 739,20 euros ; que le vérificateur a considéré que cette somme n'était pas constitutive d'une charge déductible des résultats de la société au motif que la facture du 11 janvier 2008 était fictive, mais qu'elle devait être regardée comme constituant pour M. A...un revenu distribué sur le fondement des dispositions précitées du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts à hauteur du virement de 6 600 euros effectué le 27 juin 2008 en sa faveur ; que le service établit le caractère fictif de la facture du 11 janvier 2008, dès lors que le devis du 27 septembre 2007 correspondant aurait été signé alors que la société Immobilier ZT n'a déclaré son commencement d'activité qu'à compter du 30 novembre 2007 et que les travaux auraient débuté le 5 novembre 2007 alors que, d'une part, la société Immobilier ZT n'était pas encore propriétaire des appartements, que, d'autre part, les statuts de cette société, signés le 30 novembre 2007, ne font pas apparaître qu'elle aurait repris le devis à son compte et enfin, que le syndic de la copropriété en charge de la commercialisation des appartements a indiqué, à la demande du vérificateur, le 15 mars 2011, qu'il n'avait pas connaissance que des travaux auraient été réalisés dans l'immeuble au cours des mois de novembre et décembre 2007 ; que la société Immobilier ZT a comptabilisé la somme de 149 739,20 euros figurant sur la facture du 11 janvier 2008 au crédit du compte 401 " BTP Challenge " le 31 décembre 2008, puis l'a inscrite le même jour au débit du compte 467 " Autres comptes débiteurs et créditeurs " ; qu'il ressort des copies des chèques dont les montants ont été portés au débit de ce dernier compte, obtenues par le service comme il a déjà été dit dans le cadre du droit de communication auprès de la caisse d'épargne d'Ile-de-France qui gérait le compte bancaire de la société Immobilier ZT, que cette somme portée au débit du compte 467 " Autres comptes débiteurs et créditeurs " n'a pas été perçue par la société BTP Challenge ; qu'en revanche, ce compte a été débité d'une somme totale de 99 120 euros en 2008, dont une somme de 6 600 euros qui a été virée au bénéfice de M. A...le 27 juin 2008 ; que le requérant n'apporte aucun élément, tant devant le tribunal que devant la Cour, de nature à établir que la somme de 6 600 euros représenterait le remboursement par la société Immobilier ZT d'une avance qu'il lui aurait consentie pour le financement des travaux dont la réalité n'est pas au surplus avérée ; que, par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que l'administration pouvait légalement, sur le fondement des dispositions précitées du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, réintégré au revenu imposable de M.A..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, la somme de 6 600 euros au titre de l'année 2008 ;
11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la SCI Masséna, dont M. A... était associé à hauteur de 50 % des parts sociales, a reçu, par virement bancaire effectué le 27 février 2008, de la société Immobilier ZT la somme de 79 500 euros dont 2 250 euros restent en litige ; que M. A...ne présente aucun élément de nature à établir que cette dernière somme correspondrait au remboursement d'une dette de la société Immobilier ZT à l'égard de la SCI Masséna ; que les avantages consentis à une société de personnes devant être regardés comme appréhendés par les associés de cette société, le service a pu légalement, sur le fondement des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, réintégrer au revenu imposable de M.A..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, la somme de 1 125 euros correspond à la quote-part de l'intéressé dans le capital de la SCI Masséna, au titre de l'année 2008 ;
12. Considérant, enfin, que le requérant demande à être déchargé de la majoration qui lui a été appliquée en vertu de l'article 1729 du code général des impôts ; qu'il se borne toutefois à soutenir que les redressements auxquels cette majoration se rapporte ne sont pas fondés sans invoquer à l'encontre de ces pénalités aucun moyen qui leur serait propre et serait de nature à en remettre en cause leur bien-fondé ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (Pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 mai 2018.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
N. ADOUANE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA02324