Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 2 novembre 2017, MmeB..., représentée par Me Giudicelli-Jahn, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1710870 en date du 4 octobre 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 6 juin 2017 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- le préfet de police n'a pas examiné sa situation au regard de la durée de sa présence en France et de sa parfaite intégration à la société française ;
- il a méconnu les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en s'inscrivant à des cours de français et en master " Marketing, vente parcours, marketing et pratiques commerciales " au sein de l'institut d'administration des entreprises de Paris après avoir obtenu un master 2 en " Management et marketing du luxe " de l'institut supérieur d'études en alternance du management en février 2017, son parcours est cohérent et connaît une progression ;
- il a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à la durée de sa présence en France et à sa parfaite intégration à la société française ;
- l'illégalité de la décision de refus de renouveler son titre de séjour prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- et les observations de Me Giudicelli-Jahn, avocat de MmeB....
1. Considérant que MmeB..., ressortissante ukrainienne, est entrée en France le 5 janvier 2012 afin de poursuivre ses études ; qu'elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté en date du 6 juin 2017, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite ; que Mme B... fait appel du jugement du 4 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la décision refusant de renouveler le titre de séjour portant la mention " étudiant " :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". (...) " ; qu'il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour présentée en qualité d'étudiant, de rechercher, à partir de l'ensemble du dossier et notamment au regard de sa progression dans le cursus universitaire, de son assiduité aux cours et de la cohérence de ses choix d'orientation, si le demandeur peut être regardé comme poursuivant effectivement ses études ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., entrée en France le 5 janvier 2012 afin de poursuivre ses études, a suivi une formation d'artiste maquilleuse spécialisée auprès de l'Institut des arts et techniques du maquillage professionnel au titre de l'année 2012-2013 ; qu'elle s'est inscrite en 2014 à l'Institut supérieur d'études en alternance du management (ISEAM) de Marne-la-Vallée afin de préparer le master de management spécialisé en alternance intitulé " Marketing du luxe " ; qu'elle a obtenu son diplôme le 19 avril 2017 ; que parallèlement à ce cursus, elle a suivi des cours intensif de langue française de niveau B1 au sein de l'établissement privé d'enseignement supérieur France Langues en 2012, puis des cours de français de niveau B2 en 2013-2014 ; que Mme B...s'est inscrite, à compter du mois de janvier 2017, pour une durée d'un an, auprès de l'Etablissement d'enseignement supérieur privé Campus Langues de Paris, à des cours de français de niveau B2-1, en vue d'accéder au niveau C de maîtrise de la langue française ; que, toutefois, elle n'établit pas que cette inscription, alors qu'elle a déjà suivi des cours de langue française de niveau B1 et B2 et a obtenu un master 2 de management spécialisé " Marketing du luxe " dont les enseignements étaient dispensés en français, et, qui ne présente pas de lien avec les études de management qu'elle a suivies entre 2014 et 2017, serait un préalable nécessaire à son admission dans le master 1 de " Gestion et commerce international " qu'elle a indiqué vouloir préparer et qui, au surplus, n'apparaît pas d'un niveau égal ou supérieur à celui dont elle est déjà titulaire ; que si Mme B...produit devant la Cour un courrier en date du 23 octobre 2017 par lequel l'Institut d'administration des entreprises de Paris de l'université Paris I Panthéon Sorbonne l'a informée que sa candidature a été retenue au master Marketing, Vente parcours, Marketing et pratiques commerciales " en formation continue en cycle soir pour la rentrée de janvier 2018 ", ce document ne justifie pas de la nécessité pour Mme B...de suivre une mise à niveau en français avant d'intégrer ce master dont il n'est pas soutenu qu'il serait d'un niveau équivalent ou supérieur au master 2 déjà obtenu par l'intéressée ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que le préfet de police avait pu, sans méconnaître les dispositions précitées, refuser à Mme B...le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiante au motif qu'elle ne justifiait pas de la progression et de la cohérence de ses études ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si un ressortissant étranger peut prétendre à la délivrance d'une carte de séjour à un autre titre que celui sur le fondement du ou desquels était fondée la demande présentée devant lui, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme B...n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de police n'était donc pas tenu d'examiner la demande de la requérante au regard de ces dispositions ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces mêmes dispositions doit être écarté ;
5. Considérant, en troisième et dernier lieu, que le moyen tiré d'une atteinte au droit à la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant pour contester le refus de renouveler un titre de séjour en qualité d'étudiant, qui résulte seulement d'une appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies ; que le préfet de police n'était donc pas tenu d'examiner la demande de la requérante au regard de ces stipulations ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant, en premier lieu, que les moyens dirigés contre le refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de Mme B...dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;
7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que si Mme B...a entendu soulever le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire, il ressort des pièces du dossier, comme il a déjà été dit, que Mme B... est entrée en France le 5 janvier 2012 afin de poursuivre ses études et qu'elle a été titulaire à ce titre de cartes de séjour temporaire régulièrement renouvelées ; que la requérante, célibataire et sans charges de famille, ne dispose d'aucunes attaches familiales en France tandis qu'elle n'en est pas démunie en Ukraine où résident ses parents, son frère et où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de 23 ans ; que, dans ces conditions, et eu égard à la circonstance que les titres de séjour dont elle a bénéficié en sa qualité d'étudiante entre 2012 et 2016 ne lui donnaient pas vocation à demeurer durablement en France et même si elle est bien intégrée à la société française, le préfet de police, qui a examiné sa situation personnelle et familiale, n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 6 juin 2017 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 mai 2018.
Le rapporteur,
V. LARSONNIER Le président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
N. ADOUANE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N°17PA03381