Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 juin 2017, le PRÉFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour d'annuler ce jugement.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, l'arrêté n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; en effet, l'autorité préfectorale, saisie de l'instruction d'une procédure de transfert d'un demandeur d'asile en application du règlement Dublin III du 26 juin 2013, peut légalement prescrire une assignation à résidence dans son département, même lorsque, comme c'était le cas en l'espèce, l'intéressé, qui ne dispose d'aucune garantie de représentation, s'était toujours conformé aux convocations préalables à la mise en oeuvre de son transfert ;
- l'arrêté litigieux a été pris par une autorité justifiant de sa compétence pour ce faire ;
- l'arrêté litigieux est suffisamment motivé, en droit comme en fait ; il établit, de ce fait, l'examen de la situation personnelle de M.A... ;
- le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas reçu la brochure prévue par l'article L. 561-2 du code de l'entré et du séjour des étrangers et du droit d'asile manque en fait ; en outre, ce moyen est inopérant dès lors que la remise de cette brochure relève de l'exécution de la mesure d'assignation à résidence ;
- l'intéressé n'est pas fondé à invoquer une prétendue violation des droits de la défense ;
- la décision d'assignation à résidence en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du
19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Livenais a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le PRÉFET DES HAUTS-DE-SEINE relève appel du jugement du 30 mai 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 23 mai 2017 portant assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, de M.A..., ressortissant guinéen né le 11 juin 1995, dans l'attente de son transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.
Sur les conclusions de M. A...tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :
" Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente (...) ". En outre, l'article 62 du décret du
19 décembre 1991 portant application de ladite loi dispose : " L'admission provisoire est demandée sans forme au président du bureau ou de la section ou au président de la juridiction saisie. (...) L'admission provisoire peut être prononcée d'office si l'intéressé a formé une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été définitivement statué ".
3. Dans son mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2017, M. A...a demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire. Toutefois, par une décision du 14 mars 2018, la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de Grande Instance de Versailles a statué sur la demande d'aide juridictionnelle de l'intéressé, en lui accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, les conclusions de M. A...tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet. Dès lors, il n'y a pas lieu d'y statuer.
Sur la légalité de l'arrêté d'assignation à résidence attaqué :
4. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : / 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles
L. 531-1 ou L. 531-2 ou fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 (...) " et aux termes de l'article R. 561-2 de ce code : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application (...) de l'article L. 561-2 (...) est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier, et il n'est pas sérieusement contesté que, pour assigner à résidence M. A...dans le département des Hauts-de-Seine, où ce dernier ne dispose pas d'un hébergement fixe, et l'astreindre à se présenter deux fois par semaine auprès du poste de police de La Garenne-Colombes, le PRÉFET DES HAUTS-DE-SEINE ne s'est fondé que sur l'adresse de domiciliation indiquée par l'intéressé à l'appui de sa demande d'asile, auprès de l'association " FACEM " à Nanterre, qui n'est qu'une simple domiciliation postale, sans rechercher, au vu des éléments du dossier administratif de l'intéressé, le cas échéant en l'interrogeant sur ce point, si ce dernier ne disposait pas d'un hébergement suffisamment stable hors du département. Or, M. A...justifie par la production d'une attestation émanant de l'association " La Croix-Rouge Française " du 5 décembre 2017 qu'il est habituellement hébergé par cette association, depuis le 20 février 2017, au sein du centre d'accueil " Château " sis à Versailles dans le département des Yvelines. Dans ces conditions, en l'absence de fraude alléguée, le préfet, qui, par ailleurs, ne fait état d'aucune circonstance, notamment liée à l'ordre public, justifiant de retenir, au vu de la seule domiciliation postale de M.A..., un périmètre d'assignation à résidence n'incluant pas le lieu d'hébergement de ce dernier à la date de la décision attaquée, a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.
6. Il résulte de tout ce qui précède que le PRÉFET DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 23 mai 2017.
Sur les conclusions de M. A...présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a donc lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Bernard, avocat de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État et au profit de cette dernière la somme de
1 500 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A...tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : La requête du PRÉFET DES HAUTS-DE-SEINE est rejetée.
Article 3 : L'État versera à Me Bernard, avocate de M.A..., une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du
10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.
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N° 17VE02043