Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 janvier 2016, M. A..., représenté par Me Aucher-Fagbemi, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du
10 juillet 2015 ;
3° d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A... soutient que :
Sur la décision de refus de titre de séjour :
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière, la direction départementale du travail n'ayant pas été saisie pour avis.
- le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas procédé à l'examen de sa situation personnelle ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié ;
- elle méconnaît les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du
28 novembre 2012 ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le délai de départ :
- cette décision méconnaît les dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;
- le préfet s'est à tort cru en situation de compétence liée.
.......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Guibé a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. A..., ressortissant du Sri Lanka, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du
10 juillet 2015, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans ; qu'il relève appel du jugement du 10 décembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision par laquelle le préfet de la
Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de titre de séjour de M. A...vise notamment l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique, d'une part, que l'intéressé ne justifie ni de l'intensité, de l'ancienneté et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, ni de conditions d'existence pérennes ni même d'une insertion particulièrement forte dans la société française et, d'autre part, qu'il ne justifie pas d'une insertion professionnelle en France d'une intensité et d'une qualité telles qu'il puisse prétendre à une admission exceptionnelle au séjour ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision ne peut qu'être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des motifs de la décision attaquée rappelés ci-dessus, que le préfet de la Seine-Saint-Denis a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A...avant de rejeter sa demande de titre de séjour ; qu'il a notamment examiné la promesse d'embauche produite par l'intéressé ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision en litige doit être écarté ;
4. Considérant, en troisième lieu, que la demande présentée par un étranger sur le fondement de l'article L. 313-14 n'a pas à être instruite selon les règles fixées par le code du travail relativement à la délivrance de l'autorisation de travail mentionnée à son article
L. 5221-2 ; que, par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était pas tenu de saisir le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle avant de rejeter la demande de titre de séjour présentée par le requérant ;
5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
6. Considérant, d'une part, que si le requérant a produit auprès des services de la préfecture une promesse d'embauche en qualité de jointeur plaquiste, ce document ne permet pas, à lui seul, d'établir qu'il disposerait d'un niveau de qualification et d'une expérience tels qu'ils puissent être regardés comme justifiant de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, c'est à bon droit et sans erreur manifeste d'appréciation que le préfet a estimé que la situation de M. A... ne justifiait pas son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié ; que, d'autre part, si M. A... fait état de ce qu'il réside en France depuis quatre ans, et se prévaut de sa bonne insertion en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne procédant pas à sa régularisation par la délivrance d'une carte de séjour mentionnée à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en cinquième lieu, que le requérant ne peut utilement invoquer la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que celle-ci ne contient que des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation et qu'elle est dépourvue de valeur réglementaire ;
8. Considérant, en dernier lieu, que qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M. A... n'apporte aucun élément permettant au juge d'apprécier la durée de sa présence et l'existence de liens personnels et familiaux sur le territoire français ; que, dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Seine-Saint-Denis, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris sa décision et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés au point 8. ci-dessus ;
Sur la légalité de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
10. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement " ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...
a fait l'objet d'une mesure d'éloignement par un arrêté du préfet de police du 28 mai 2013 portant obligation de quitter le territoire français ; qu'il est constant qu'il s'est soustrait à l'exécution de cette mesure ; que, dès lors, sa situation entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent à l'autorité administrative de fixer une mesure d'éloignement sans délai de départ volontaire ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que cette décision méconnaît les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
12. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;
13. Considérant, en premier lieu, que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi ; qu'en l'espèce, après avoir relevé la date d'entrée en France de M. A..., ainsi que la nature et l'ancienneté des liens avec la France dont il se prévalait, le préfet de la Seine-Saint-Denis a fondé sa décision d'interdiction de retour sur le comportement de l'intéressé qui, par le passé, s'est soustrait à une mesure d'éloignement ; qu'il a visé le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi il a indiqué les considérations de droit et de fait qui constituaient le fondement de cette décision ; que, s'il n'a pas précisé si la présence de M. A...sur le territoire français constituait ou non une menace pour l'ordre public, cette circonstance, qui n'implique pas par elle-même l'absence d'examen de ce critère par le préfet, n'est pas de nature à faire regarder ladite décision comme insuffisamment motivée dès lors qu'il n'a pas retenu l'existence d'une menace à l'ordre public pour prendre sa décision au vu de la situation de l'intéressé ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté ;
14. Considérant, en second lieu, que M. A...ne justifie pas, ainsi qu'il a été dit, de la réalité de son intégration sociale et professionnelle en France ; qu'il n'est pas contesté qu'il a déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement, à laquelle il n'a pas déféré ; que le requérant ne fait état d'aucune circonstance rendant nécessaire ou indispensable sa présence sur le territoire français pendant la durée de deux ans de l'interdiction de retour ; que, dans ces conditions, et eu égard aux effets d'une telle interdiction qui peut être abrogée à tout moment par l'autorité administrative, notamment à la demande de l'étranger justifiant résider hors de France, le préfet de la Seine-Saint-Denis, en prononçant une interdiction de retour d'une durée de deux ans, n'a pas fait une inexacte application des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M.A... ; qu'il ressort par ailleurs des motifs de la décision attaquée que le préfet ne s'est pas à tort cru en situation de compétence liée pour prononcer cette mesure ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
''
''
''
''
2
N° 16VE00133