Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 janvier 2018, M.A..., représenté par Me Saidi, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre à la préfète de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente de lui délivrer sans délai un récépissé assorti d'une autorisation de travail ou, à défaut, d'enjoindre à cette préfète de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen un récépissé avec autorisation de travail ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A...soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges n'ont pas recherché si la préfète justifiait de ce que son comportement constituait une menace à l'ordre public en France en se bornant à invoquer la condamnation isolée dont il a fait l'objet ; le jugement est entaché de contradiction de motifs dès lors que les premiers juges opposent l'absence de production d'éléments justifiant d'une ancienneté professionnelle et admettent que le préfet pouvait statuer avant expiration du délai imparti pour produire les justificatifs complémentaires demandés, alors que l'absence de justificatif d'ancienneté professionnelle est la conséquence directe du non respect du délai imparti par les services préfectoraux ;
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- cette décision est entachée d'illégalité dès lors que le préfet n'a pas respecté le délai imparti au requérant pour produire des justificatifs complémentaires relatifs à la situation de son employeur ;
- elle est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;
- l'accord-cadre relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie et le protocole relatif à la gestion concertée des migrations, signés à Tunis le
28 avril 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chayvialle,
- les observations de Me Saidi, pour M.A....
1. Considérant que M.A..., ressortissant tunisien né en 1984, relève appel du jugement du 21 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 mars 2017 par lequel le préfète de l'Essonne a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que le requérant ne saurait demander l'annulation du jugement attaqué en contestant la pertinence des motifs retenus par les premiers juges pour répondre au moyen tiré de ce que son comportement ne constituait pas une menace pour l'ordre public en France ou en soutenant que ce dernier est entaché d'une contradiction de motifs, dès lors que de telles contestations portent sur le bien-fondé du jugement et non sa régularité ;
Sur la légalité de la décision de refus de délivrance de titre de séjour :
3. Considérant que l'arrêté attaqué comporte un exposé suffisant des motifs de fait et de droit sur lesquels est fondée la décision portant refus de délivrance de titre de séjour ; que par suite le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté litigieux doit être écarté ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) " ; que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fixe notamment les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée ; que dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 prévoit la délivrance de titres de séjour pour l'exercice d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien ; que, toutefois, bien que cet accord ne prévoie pas de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;
5. Considérant que si, lors du dépôt de la demande de titre de séjour le
15 décembre 2016, la préfète de l'Essonne a demandé au requérant de produire un certain nombre de justificatifs complémentaires relatifs à la situation de son employeur et lui a accordé à cet effet un délai de sept mois et si l'arrêté litigieux est intervenu avant l'expiration de ce délai, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le refus de délivrance du titre de séjour litigieux n'est pas fondé sur le défaut de réponse de l'intéressé à la demande de justificatifs adressée par la préfète de l'Essonne ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la préfète de l'Essonne ne pouvait légalement rejeter sa demande avant expiration du délai imparti pour produire des justificatifs complémentaires ;
6. Considérant que si le requérant invoque son recrutement en qualité d'ingénieur télécom par la société HS Télécom pour un salaire mensuel d'environ 2 000 euros, ce recrutement est intervenu le 13 mars 2017, moins de quinze jours avant la décision attaquée ; qu'en outre la préfète a relevé que l'intéressé a été condamné par arrêt du 7 avril 2014 de la chambre des appels correctionnels de Paris à trois mois d'emprisonnement avec sursis pour " agression sexuelle sur un mineur de 15 ans par personne abusant de l'autorité de sa fonction " ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la préfète de l'Essonne a commis une erreur manifeste d'appréciation, en s'abstenant d'exercer son pouvoir de régularisation discrétionnaire ;
7. Considérant qu'aux termes du 1. de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ;
8. Considérant que le requérant ne justifie pas d'une insertion sociale en France en se bornant à invoquer sa présence sur le territoire français depuis 2007, les études qu'il y a poursuivies ainsi que son recrutement par la société HS Télécom en mars 2017, et alors qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant a fait l'objet d'une condamnation par arrêt du
7 avril 2014 de la chambre des appels correctionnels de Paris à trois mois d'emprisonnement avec sursis pour " agression sexuelle sur un mineur de 15 ans par une personne abusant de son autorité" et qu'il s'est maintenu sur le sol français en dépit d'un arrêté en date du 15 juin 2015 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que le requérant est célibataire sans charge de famille et n'établit, ni même n'allègue, être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans au moins ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport à son objet ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Sur la légalité de l' obligation de quitter le territoire :
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision obligeant le requérant à quitter le territoire doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour prise à son encontre ne peut qu'être écarté ;
10. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision portant obligation de quitter le territoire serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
11. Considérant qu'il suit de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'obligation de quitter le territoire sur laquelle elle est fondée ne peut qu'être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
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N° 18VE00064