Résumé de la décision
Dans cette affaire, Piercourt a souscrit, en tant que donneur d'aval, deux lettres de change émises par la société Migraine sur l'entreprise Deloffre, sans mentionner le nom du débiteur cambiaire qu'il garantissait. Les effets n'ayant pas été payés à l'échéance, la société Migraine a protesté et a tenté d'exercer une action cambiaire contre Piercourt. La Cour d'appel a admis la preuve que Piercourt avait voulu garantir le tiré, malgré l'absence de mention du débiteur dans l'aval. La Cour de cassation a annulé cette décision, affirmant que la Cour d'appel avait violé l'article 130, alinéa 6 du Code de commerce.
Arguments pertinents
1. Nature de l'aval : L'article 130, alinéa 6 du Code de commerce stipule que "l'aval doit indiquer pour le compte de qui il est donné". Cette exigence n'est pas simplement une règle de preuve, mais impose une obligation de précision quant à l'identité du garanti. En l'absence de cette mention, l'aval est réputé donné pour le tireur.
2. Limitation des droits du donneur d'aval : La disposition finale de l'article 130 limite les engagements du donneur d'aval à la garantie du tireur. Ainsi, le tireur ne peut pas invoquer une convention de cautionnement contre le donneur d'aval si celui-ci n'a pas précisé le nom du débiteur.
3. Inadmissibilité de la preuve contraire : La Cour d'appel a erronément admis que la société Migraine pouvait prouver que Piercourt avait voulu garantir le tiré, en se fondant sur une présomption qui n'est pas irréfragable. La Cour de cassation a souligné que cette présomption, selon l'article 130, ne peut être écartée au profit d'une preuve contraire.
Interprétations et citations légales
1. Article 130, alinéa 6 du Code de commerce : Cet article impose une obligation claire concernant la mention d'aval. La Cour de cassation a précisé que "sa disposition finale limite en conséquence, à l'égard de tous, celui du donneur d'aval à la garantie du tireur", ce qui souligne l'importance de la précision dans les engagements cambiaires.
2. Article 1352 du Code civil : La Cour d'appel a fondé son raisonnement sur la possibilité d'écarter la présomption établie par l'article 130, en invoquant l'article 1352 du Code civil. Cependant, la Cour de cassation a rejeté cette interprétation, affirmant que la présomption posée par l'article 130 n'est pas susceptible d'être contredite par une preuve contraire dans le cadre de l'aval.
3. Articles 2011 et suivants du Code civil : La Cour a également rappelé que, même si le tireur peut conserver une action sur le fondement de ces articles, cela ne modifie pas la portée de l'aval tel que défini par l'article 130, alinéa 6.
En conclusion, la décision de la Cour de cassation met en lumière l'importance de la précision dans les engagements cambiaires et l'impossibilité d'écarter la présomption établie par la loi sans mention explicite dans l'aval.