Procédure devant la cour administrative d'appel :
Par une requête enregistrée le 22 octobre 2021, M. B..., représenté par
Me Cazanave, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 juin 2021 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler les arrêtés du 26 mai 2021 du préfet de la Haute-Garonne ordonnant son transfert aux autorités espagnoles responsables de l'examen de sa demande d'asile et l'assignant à résidence dans le département du Tarn pour une durée de quarante-cinq jours ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une attestation de demandeur d'asile ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son avocat sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision ordonnant son transfert aux autorités espagnoles n'a pas été précédée d'un examen sérieux de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 ; il peut se prévaloir d'une vie privée et familiale en France, dès lors que son frère réside régulièrement sur le territoire français, bénéficiaire d'une carte de résident valable jusqu'au 9 mai 2027 ; en revanche, il ne dispose d'aucune attache personnelle en Espagne, dont il ne comprend ni ne parle la langue ; enfin, il est menacé et exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Mauritanie, où sa communauté soninké le réduirait en esclavage ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision l'assignant à résidence est illégale en raison de l'illégalité de la décision ordonnant son transfert aux autorités espagnoles.
Par une décision du 23 septembre 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Le 14 janvier 2022, le préfet de la Haute-Garonne a produit à la demande de la cour des pièces indiquant que l'intéressé a fait l'objet d'un éloignement vers Madrid le 21 juillet 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-642 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours, ainsi que les autres magistrats ayant le grade de président désignés à cet effet par le président de la cour peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".
2. M. B..., ressortissant mauritanien né le 1er mai 1997, s'est présenté aux services préfectoraux de la Haute-Garonne le 8 avril 2021 pour déposer une demande d'asile. Par deux arrêtés du 26 mai 2021, le préfet de la Haute-Garonne a prononcé la remise de M. B... aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile, et l'a assigné à résidence. M. B... relève appel du jugement du 2 juin 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant transfert aux autorités espagnoles :
3. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne se soit abstenu de procéder à un examen réel et sérieux de la situation personnelle de l'appelant. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
4. M. B... reprend en appel le moyen, qu'il avait invoqué en première instance, tiré de ce que la décision ordonnant son transfert aux autorités espagnoles serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 du fait de la présence en France de son frère. Toutefois, à supposer établi le lien familial avec la personne qu'il présente comme son frère, celui-ci reconnaît ne pouvoir l'héberger et il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption du motif retenu par le premier juge.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. L'appelant était présent sur le territoire français depuis seulement trois mois à la date de la décision en litige. S'il se prévaut de la présence de son frère titulaire d'une carte de résident en France obtenue en mai 2017, il n'établit pas, par les pièces qu'il produit, entretenir avec
celui-ci des liens d'une intensité telle que la décision en litige porterait une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale, alors qu'il a vécu au moins quatre ans séparé de celui-ci. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
7. Les moyens dirigés contre la décision portant transfert aux autorités espagnoles ayant été écartés, M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant assignation à résidence.
8. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel est manifestement dépourvue de fondement et doit être rejetée selon la procédure prévue par les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Les conclusions de
M. B... à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi
du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence.
ORDONNE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B.... Une copie sera adressée pour information au préfet de la Haute-Garonne.
Fait à Bordeaux, le 17 février 2022.
La présidente de la 2ème chambre
Catherine GIRAULT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
21BX04041 2