Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 novembre 2018, M.B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 14 juin 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 29 décembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de deux mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat les sommes de 1 920 euros et de 2 400 euros à verser à son conseil au titre, respectivement, des frais exposés en première instance et en appel et non compris dans les dépens.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- elle est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le préfet n'a pas saisi la commission du titre de séjour ;
- cette décision méconnaît l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif de Limoges le 20 décembre 2017 qui avait enjoint au préfet de la Haute-Vienne, sous réserve de changement dans les circonstances de droit ou de fait, de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement ;
- elle méconnaît les articles 13 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : le préfet n'a pas tenu compte de ce qu'il était titulaire d'une carte de séjour temporaire alors qu'une injonction de délivrance d'une telle carte lui avait été faite par le tribunal administratif et que sa situation n'avait pas changé, en méconnaissance du droit au recours effectif ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- cette décision est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur de fait dès lors que le préfet confond communauté de vie et vie commune et qu'il n'établit pas que la vie commune serait terminée ;
- la décision attaquée résulte d'une précédente décision illégale ; en outre, il aurait dû bénéficier d'une carte de séjour pluriannuelle en application de l'article L. 313-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît le 3° de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : à la date de la décision, il résidait régulièrement en France, eu égard au jugement du tribunal administratif de Limoges, et était marié depuis au moins 3 ans à une ressortissante française ;
- cette décision méconnaît l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation : il aurait dû être titulaire, depuis 2014, de la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " en tant que conjoint de Français de sorte que le préfet ne pouvait lui opposer l'absence de détention d'un visa de long séjour ;
- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : il produit une promesse d'embauche qui établit qu'il pouvait travailler depuis son mariage ; le préfet a omis d'instruire sa demande sur ce fondement alors qu'il a fourni une promesse d'embauche.
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le délai de départ volontaire et déterminant le pays de renvoi, elles sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2019, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Déborah De Paz pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marianne Pouget,
Considérant ce qui suit :
1. M. C...B..., ressortissant mauricien née le 2 juillet 1978, est entré en France en août 2014. A la suite de son mariage en septembre 2014 avec une ressortissante française, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Cette demande a été rejetée par un arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 10 novembre 2014 dont la légalité a été confirmée par un jugement du 20 décembre 2017 du tribunal administratif de Limoges devenu définitif. Toutefois, ce même jugement a annulé la décision implicite du 12 mars 2015 de rejet du recours gracieux formé par l'intéressé à l'encontre de l'arrêté du 10 novembre 2014 et a enjoint au préfet de la Haute-Vienne de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous réserve de l'absence de changement dans la situation de fait et de droit de l'intéressé. Par un arrêté du 29 décembre 2017, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B...relève appel du jugement du 14 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'autorité de chose jugée :
2. Par le jugement susmentionné du 20 décembre 2017, devenu définitif, le tribunal administratif de Limoges, après avoir rejeté les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 10 novembre 2014 portant refus de délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " , a annulé la décision implicite du 12 mars 2015 portant rejet du recours gracieux formé par M. B...à l'encontre de cet arrêté au motif qu'à la date de cette décision implicite, M. B...justifiait d'une communauté de vie de sept mois avec son épouse, de sorte que cette décision avait été prise en méconnaissance des articles L. 313-11 4° et L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le tribunal administratif a enjoint au préfet de la Haute-Vienne de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois, sous réserve de l'absence de changement dans la situation de fait et de droit de M.B.... L'autorité de la chose jugée, qui s'attache au dispositif de ce jugement et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire, ne faisait pas obstacle à ce que le préfet de la Haute-Vienne, après avoir constaté un changement dans la situation de fait de M. B...résultant de la cessation de la communauté de vie entre lui et son épouse, prenne à l'encontre du requérant, une nouvelle décision refusant le titre de séjour sollicité, accompagnée d'une obligation de quitter le territoire. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée doit être écarté.
Sur le refus de titre de séjour :
3. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 2, le moyen tiré de la méconnaissance du droit au recours effectif tel que garanti par les stipulations combinées des articles 13 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté.
4. Il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 11 juillet 2017, M.B... a informé le préfet de la Haute-Vienne que son épouse avait quitté le domicile conjugal et qu'ils étaient séparés. Il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est pas allégué que la communauté de vie entre M. B...et son épouse aurait repris ultérieurement. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Haute-Vienne aurait commis une erreur de droit et une erreur de fait en se fondant sur la cessation de la communauté de vie entre les époux au sens des dispositions de l'article L. 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour refuser de délivrer à M. B...un titre de séjour, ne peut qu'être écarté.
5. M. B...reprend en appel, dans des termes identiques, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif, les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait fondée sur une précédente décision illégale, de la méconnaissance de l'article L. 313-19, du 3° de l'article L. 314-9, des articles L. 313-10, L. 313-14 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le délai de départ volontaire et déterminant le pays de renvoi :
6. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire, fixant le délai de départ volontaire et déterminant le pays de renvoi.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquence, les conclusions présentées à fin d'injonction et celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 21 mai 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier conseiller,
M. Romain Roussel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 juin 2019.
Le premier conseiller,
Paul-André Braud
Le président-rapporteur,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°18BX03963