Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 août 2016, et un mémoire complémentaire, enregistré le 21 octobre 2016, M.D..., représenté par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 juin 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 22 décembre 2015 ;
3°) d'enjoindre, à titre principal au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail et de procéder au réexamen de sa situation dans les délais respectifs de quinze jours et d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et, subsidiairement, dans l'hypothèse où il n'obtiendrait pas l'aide juridictionnelle, de condamner l'Etat à lui verser la même somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions attaquées sont entachées d'incompétence à défaut pour leur signataire de justifier d'une délégation de signature régulièrement publiée ; contrairement aux exigences jurisprudentielles, cette délégation de signature est générale et permanente ;
- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée à défaut de préciser les raisons pour lesquelles il ne pouvait pas prétendre à la délivrance d'une carte de séjour portant la mention salarié ; de même, la motivation de cette décision ne permet pas de comprendre sur quels éléments le préfet s'est fondé pour estimer que son traitement médical serait disponible en Sierra Léone ; le préfet reconnaît expressément dans son mémoire que s'agissant de la demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aucune appréciation n'a été portée sur la possibilité de lui délivrer un titre de séjour salarié ; dès lors que le préfet était saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, il se devait d'apprécier si sa situation justifiait la délivrance d'un titre de séjour vie privée et familiale et dans la négative d'examiner s'il pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour salarié ou travailleur temporaire ;
- en se bornant à constater l'absence de demande d'autorisation de travail sans procéder à un examen particulier de sa situation, et notamment de ses qualifications, de son expérience et de ses diplômes, ainsi que des caractéristiques de l'emploi exercé, le préfet de la Haute-Garonne a entaché sa décision d'un défaut d'examen réel de sa situation personnelle ; le préfet n'a pas examiné la possibilité de lui délivrer un titre de séjour salarié en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet n'a porté aucune appréciation sur sa capacité à voyager sans risque ; ce faisant, le préfet a méconnu l'étendue de son pouvoir d'appréciation et a de ce fait entaché sa décision d'erreur de droit ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'autorité de chose jugée ; le tribunal administratif de Nantes a, par un jugement devenu définitif, annulé une décision préfectorale portant refus de titre de séjour en qualité d'étranger malade et a enjoint de délivrer un titre de séjour ; s'il s'est prévalu de sa vie privée et familiale lors du dépôt de sa demande de titre de séjour, il n'a pas renoncé à sa demande initiale en qualité d'étranger malade ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'avis du médecin de l'agence régionale de santé était favorable au renouvellement de son titre, à l'instar des sept avis précédents ; aucun élément n'est produit de nature à démontrer une amélioration de la situation sanitaire de la Sierra Léone et de la disponibilité de son traitement dans ce pays ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il justifie d'une résidence en France depuis plus de dix ans dont sept ans sous couvert de titres de séjour ; les titres de séjour en qualité d'étranger malade figurent sur la liste des cartes de séjour permettant de bénéficier d'une carte de résident ; il vit en concubinage avec MmeC..., qui séjourne régulièrement sur le territoire français, et avec qui il vient d'avoir un enfant, né le 14 juillet 2015 ; ainsi, la décision attaquée emporterait une séparation de la cellule familiale ; le récépissé dont bénéficiait sa compagne à la date de la décision attaquée la protégeait d'une mesure d'éloignement ; par ailleurs, en dépit de son état de santé, il a exercé une activité professionnelle régulière démontrant son insertion sociale ;
- pour les motifs précédemment exposés, il justifie remplir les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; par ailleurs le suivi médical dont il bénéficie depuis sept ans doit être pris en compte ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; elle emportera l'éclatement de la cellule familiale, ce qui est contraire à l'intérêt de son enfant, âgé seulement de cinq mois ;
- l'illégalité du refus de séjour entraîne nécessairement celle de l'obligation de quitter le territoire prononcée à son encontre ;
- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il est fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français a méconnu les articles 2, 3, 8 et 14 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales concernant le droit à la vie, l'interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants, le respect de sa vie privée et familiale et l'interdiction de discrimination. L'ensemble de ces droits impliquent nécessairement le droit à la protection de la santé et le droit à l'accès aux soins en cas de pathologies dont le défaut de prise en charge entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; en outre, à la date de l'arrêté attaqué, il justifie que le centre de ses intérêts se situe en France ;
- le préfet a en outre méconnu le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour les mêmes motifs qu'évoqués ci-dessus ; par ailleurs, le préfet ne s'est pas interrogé sur sa capacité à voyager sans risque ;
- l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ne contient aucune mention sur sa capacité à voyager ;
- pour les mêmes motifs que ceux précédemment évoqués, la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée en fait et est entachée d'un défaut d'examen réel de sa situation personnelle ;
- cette décision méconnait les articles 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de la situation sanitaire en Sierra Léone qui ne lui permettrait pas de bénéficier des traitements indispensables au suivi de sa pathologie ;
- un récépissé de titre de séjour valable du 25 août 2016 au 24 février 2017 lui a été délivré ; s'il a pour effet d'abroger les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, en revanche, il ne rend pas sans objet les conclusions dirigées contre la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2016, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- il n'y a plus lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi compte tenu de la délivrance d'un récépissé valable du 25 août 2016 au 24 février 2017 ; dans l'hypothèse où la cour estimerait que le non-lieu n'est pas constitué, il réitère ses observations produites devant les premiers juges ;
- le signataire de la décision attaquée justifie d'une délégation de signature régulière ;
- M. D...ayant seulement demandé un titre de séjour en se prévalant de sa vie privée et familiale, il ne saurait être fait grief à la décision attaquée de ne pas avoir motivé son refus au titre d'une carte de séjour portant la mention" salarié " ; de plus, à titre subsidiaire, l'intéressé n'a fourni aucun contrat de travail, ni promesse d'embauche quelconque, au soutien de sa demande de renouvellement ou de sa requête, lui permettant de se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- 1'intangibilité de la chose jugée ne résiste pas aux changements dans les circonstances de fait ou de droit ; le changement de résidence de M. D...a rendu incompétent le préfet de la Mayenne, partie au jugement du 12 mai 2014 ; par ailleurs, la prise en charge médicale au Sierra-Léone a sensiblement évolué depuis le jugement du 12 mai 2014 ; le médecin de l'agence régionale de santé indique désormais que si des conséquences d'une exceptionnelle gravité pourraient résulter du défaut de prise en charge, " il existe, dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale. " ;
- la décision attaquée ne méconnaît pas l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; M. D...est entré en France à l'âge de 24 ans, après avoir toujours vécu dans son pays d'origine ; il n'a été admis au séjour qu'à titre temporaire et précaire, en bénéficiant d'une carte de séjour étranger malade; s'il indique avoir une relation avec Mme B..., avec laquelle il a eu un enfant, il n'établit pas vivre avec eux, ni participer à l'entretien ou à 1'éducation de cet enfant ; il n'a produit aucun contrat de travail, ni aucune promesse d'embauche et ne s'est prévalu d'aucune démarche particulière d'intégration ; la commission du titre de séjour a émis un avis défavorable au motif que la demande d'admission au séjour ne répond pas à des considérations humanitaires et ne se justifie pas au regard de motifs exceptionnels ; de plus, l'intéressé ne saurait alléguer que son état de santé constituerait un motif exceptionnel d'admission au séjour, puisque le médecin de l'agence régionale de santé indique au contraire qu'une prise en charge médicale est désormais possible en Sierra-Léone.
Par ordonnance du 6 septembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 27 octobre 2016 à 12 heures.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 septembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Cécile Cabanne, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...D..., né le 1er octobre 1980 à Pujehun (Sierra Léone) est entré irrégulièrement en France le 28 septembre 2004 selon ses déclarations. Après le rejet de la demande d'asile, il s'est vu accorder le 20 juillet 2006 une carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade, régulièrement renouvelée jusqu'au 19 juillet 2013. Sollicitant de nouveau le renouvellement de ce titre, le médecin inspecteur de l'agence régionale de santé des Pays-de-la-Loire a émis le 2 juillet 2013 un avis favorable à cette demande. Cependant, par une décision du 28 octobre 2013, le préfet de la Mayenne a pris à son encontre un refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Le tribunal administratif de Nantes, par jugement du 12 mai 2014 devenu définitif, a annulé ces décisions et enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de sa notification. Après avoir déménagé à Toulouse, M. D...a sollicité auprès du préfet de la Haute-Garonne le renouvellement de sa carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ". Se fondant notamment sur un avis du 3 octobre 2014 du médecin de l'agence régionale de santé de Midi-Pyrénées, lequel a estimé que les soins nécessaires étaient désormais dispensés en Sierra Léone, le préfet de la Haute-Garonne a opposé le 22 décembre 2015 un refus à cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé comme pays de renvoi le pays dont il a la nationalité. M. D...relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 juin 2016 rejetant sa demande d'annulation de ces décisions.
Sur les conclusions à fin de non-lieu présentées par le préfet de la Haute-Garonne :
2. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne a délivré postérieurement à l'introduction de la requête un récépissé de demande de carte de séjour valable du 25 août 2016 au 17 février 2017. Le préfet doit ainsi être regardé comme ayant implicitement mais nécessairement abrogé son arrêté du 22 décembre 2015 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixe le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé. Dans ces conditions, les conclusions tendant à l'annulation de ces deux décisions, qui n'ont reçu aucune exécution, sont devenues sans objet.
Sur la légalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
3. M. Stéphane Daguin, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Garonne, a reçu délégation, par arrêté du 2 novembre 2015 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, à l'effet de signer au nom du préfet notamment tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Haute-Garonne, à l'exception des arrêtés de conflit. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait.
4. La décision attaquée vise les textes dont elle est fait application, en particulier les articles L. 313-11, 11° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La même décision précise, après avoir rappelé les conditions d'entrée et de séjour de M. D... sur le territoire national, que le médecin de l'agence régionale de santé a estimé dans un avis du 3 octobre 2014 que les soins et traitements nécessaires à l'intéressé sont disponibles en Sierra Léone et qu'il ne justifie pas qu'il serait dans l'impossibilité d'accéder à des soins adaptés dans ce pays. Cette motivation en fait est suffisante pour permettre au requérant de connaître les motifs du refus opposé à sa demande de carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade. La décision en litige examine également la situation de l'intéressé au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle relève notamment que, s'il produit des bulletins de salaire pour des missions de courte durée en 2006, 2008, 2009, 2012 et 2015, le droit au travail dont il bénéficiait ne lui avait été accordé que dans le cadre de son droit au séjour au titre de son état de santé et qu'aucune demande d'autorisation de travail n'a été formalisée selon les dispositions de l'article L. 5221-2 du code du travail. Dès lors, la décision est suffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979.
5. Ainsi qu'il a été dit, la décision du préfet de la Haute-Garonne a été prise au vu d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé Midi-Pyrénées qui indiquait que si l'état de santé de M. D...nécessitait une prise en charge médicale, l'intéressé pouvait en bénéficier dans son pays d'origine. Le secret médical interdit au médecin inspecteur de l'agence régionale de santé de révéler des informations sur la pathologie de l'intéressé et la nature de ses traitements médicaux, fût-ce en portant une appréciation sur l'état du système de soins dans le pays d'origine. M. D... a choisi de ne pas lever le secret médical. Dans ces conditions, le requérant ne peut sérieusement soutenir que le préfet de la Haute-Garonne, qui a saisi le médecin de l'agence régionale de santé de la demande de M. D...et a estimé que dans la limite du secret médical aucune pièce du dossier ne contredisait sérieusement cet avis, se serait ainsi abstenu de procéder à un examen particulier de sa situation personnelle.
6. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention 'vie privée et familiale' est délivrée de plein droit : (...) 11°: A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, (...). ". Selon l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Selon l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...)".
7. Il appartient au préfet de prendre en considération les modalités d'exécution d'une éventuelle mesure d'éloignement dès le stade de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile afin de disposer d'une information complète sur l'état de santé de l'étranger, y compris sur sa capacité à voyager sans risque à destination de son pays d'origine. Si le médecin de l'agence régionale de santé ne s'est pas prononcé sur le point de savoir si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine, il appartient au préfet d'examiner cette question, dès lors qu'il estime qu'un traitement approprié existe dans ce pays et qu'il ressort des éléments du dossier qui lui a été soumis que l'état de santé de l'étranger malade suscite des interrogations sur sa capacité à supporter le voyage vers son pays d'origine.
8. En l'espèce le médecin de l'agence régionale de santé ne s'est pas prononcé sur la capacité de M. D...à voyager sans risque vers la Sierra Léone. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait porté à la connaissance du préfet des éléments susceptibles de susciter une interrogation à ce sujet. Par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que le préfet ne pouvait, sans vicier la procédure, refuser de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade sans s'être préalablement interrogé sur sa capacité à voyager vers ce pays.
9. Le requérant soutient que la décision de refus de séjour méconnaît l'autorité de chose jugée par le tribunal administratif de Nantes qui a, par un jugement du 12 mai 2014 devenu définitif, annulé une décision préfectorale portant refus de titre de séjour en qualité d'étranger malade et a enjoint de délivrer un titre de séjour. Cependant, l'état de santé de M. D...a évolué entre la date à laquelle le tribunal administratif de Nantes a statué et la date à laquelle le préfet de la Haute-Garonne s'est prononcé, saisi d'une nouvelle demande, en se fondant sur un nouvel avis du médecin inspecteur de la Haute-Garonne qui diverge de celui émis par son homologue des Pays-De-La-Loire. En l'absence d'identité de cause et d'objet, le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée ne peut qu'être écarté.
10. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
11. Le préfet de la Haute-Garonne, pour rejeter la demande de titre de séjour de M. D..., a considéré, en se fondant sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, que l'état de santé du requérant nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il existait un traitement dans son pays d'origine. M. D..., qui ne produit aucune pièce médicale et n'apporte aucune précision quant à la nature et la gravité de sa pathologie, se borne à faire valoir l'indigence des structures sanitaires en Sierra Léone. Ces seules allégations ne sauraient suffire à remettre en cause l'appréciation du médecin de l'agence régionale de santé et du préfet de la Haute-Garonne quant à l'existence dans ce pays d'un traitement approprié à son état de santé.
12. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ;
13. M. D...se prévaut de sa présence en France depuis dix ans dont sept en situation régulière. Il ressort, toutefois, des pièces du dossier qu'il a vécu en Sierra Léone jusqu'à l'âge de 24 ans, pays où il a donc résidé la majeure partie de sa vie. Il n'a été admis au séjour en France qu'à titre précaire en raison de son état de santé. A la date de la décision attaquée, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il justifierait de sources de revenus. S'il démontre avoir travaillé en 2006, 2008, 2009, 2012, 2013 et juillet 2015, il n'est pas contredit qu'il s'agissait d'une activité professionnelle épisodique, laquelle ne permet pas d'établir que le requérant aurait transporté en France le centre de ses intérêts professionnels. Il se prévaut également de la présence de sa concubine, MmeB..., de leur fils né le 15 juillet 2015 sur le territoire français et d'un enfant à naître. Cependant, la grossesse de sa concubine est postérieure à la date de la décision attaquée et est donc sans influence sur sa légalité. Si sa concubine disposait à la date de la décision attaquée d'une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du traitement de sa demande d'asile, rien ne faisait, cependant, obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France. L'entrée sur le territoire français de Mme B...est très récente. De nationalité guinéenne, il n'est pas démontré qu'elle serait dans l'impossibilité de résider en Sierra Léone. Au demeurant, les pièces produites ne permettent pas d'établir la communauté de vie entre les concubins, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'ils résident dans des villes différentes. Par ailleurs, M. D... ne démontre pas être isolé en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces circonstances, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué, en tant qu'il lui refuse un titre de séjour, porterait une atteinte excessive à sa vie privée et familiale telle que protégée par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni qu'il serait entaché d'un erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
14. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
15. Comme cela a été dit au point 13, il ne ressort pas des pièces du dossier que la vie familiale de M. D..., à la supposer établie, ne pourrait pas se poursuivre hors de France. Dès lors, le refus de séjour litigieux ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
16. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ;
17. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 13 et 14 ci-avant, M. D...ne justifie d'aucune considération humanitaire ou motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort de la décision attaquée que le préfet a, contrairement à ce que soutient le requérant, examiné sa situation professionnelle. Par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de renouvellement de titre de séjour aurait méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
18. Il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour attaqué.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
19. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. D... ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
20. L'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions tendant à ce qu'il soit mis à sa charge une somme à verser au conseil de M. D...au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. D...tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 décembre 2015 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixe le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et au ministre de l'intérieur. Copie sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.
Le rapporteur,
Cécile CABANNELe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Delphine CÉRON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 16BX02752