Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 avril 2015, et un mémoire en production de pièce, enregistré le 21 mai 2015, la commune de Nay, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 27 janvier 2015 ;
2°) de rejeter la demande de la SCI Oppidum ;
3°) de mettre à la charge de la SCI Oppidum une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en estimant que les articles L. 2121-12 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales impliquent que les conseillers municipaux doivent être destinataires de l'ensemble du projet de plan que la délibération a pour objet d'approuver, les premiers juges ont commis une erreur de droit ; aucun texte ni aucun principe n'imposent au maire de communiquer d'office aux conseillers municipaux l'ensemble des documents du projet de plan local d'urbanisme ; par ailleurs, l'obligation d'information doit être adaptée en fonction notamment de la taille de la commune, laquelle est pour la commune de Nay inférieure à 3500 habitants ; en l'espèce, une note de synthèse a été adressée aux conseillers municipaux préalablement à la séance du 29 mai 2013, laquelle rappelait les étapes de la procédure et les modifications apportées pour tenir compte des avis des personnes publiques associées et des observations émises lors de l'enquête publique ; elle précisait également que le projet complet et les annexes étaient consultables directement à la mairie de Nay ; ainsi, les élus ont été mis à même de comprendre la portée du projet de délibération conformément aux exigences des articles L. 2121-12 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ;
- en tout état de cause, à supposer que la cour considère que la note de synthèse adressée aux conseillers municipaux était insuffisante, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette illégalité aurait exercé une influence sur le sens de la décision, ni qu'elle aurait privé les conseillers municipaux d'une garantie ; le long processus d'élaboration du plan local d'urbanisme a impliqué des nombreuses phases au cours desquelles la discussion avec les élus a été une réalité constante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2016, la SCI Oppidum, représentée par MeB..., déclare " s'en remettre sur la requête de la commune de Nay " et sollicite le rejet des conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la commune de Nay procède à une révision simplifiée de son plan local d'urbanisme, laquelle prévoit une modification du classement du zonage de ces parcelles conforme à sa demande présentée devant les premiers juges ; ainsi, l'annulation de la délibération approuvant le plan local d'urbanisme du 29 mai 2013 aura pour conséquence de réduire à néant cette révision simplifiée ;
- elle n'entend pas maintenir les critiques qu'elle avait initialement formulées sous réserve que la commune justifie de cette révision simplifiée dans le cadre de la procédure actuellement pendante.
Par ordonnance du 7 octobre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 14 novembre 2016 à 12 h.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Cécile Cabanne, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
- et les observations de MeC..., représentant la commune de Nay ;
Vu les notes en délibéré, enregistrées à la cour les 10,14 et 22 mars 2017, présentées pour la commune de Nay par MeA... ;
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 29 mai 2013, le conseil municipal de la commune de Nay a approuvé le plan local d'urbanisme. La commune de Nay relève appel du jugement du 27 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé cette délibération sur demande de la SCI Oppidum, propriétaire de deux parcelles sur le territoire de la commune.
Sur les conclusions en annulation :
2. Aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ".
3. Il résulte de ces dispositions que les membres du conseil municipal appelés à délibérer de l'adoption d'un plan local d'urbanisme doivent disposer, avant la séance, de l'ensemble du projet de plan que la délibération a pour objet d'approuver, et doivent pouvoir obtenir communication des autres pièces et documents nécessaires à leur information sur l'adoption de ce plan, notamment du rapport du commissaire enquêteur. Aucun texte ni aucun principe n'imposent toutefois au maire de leur communiquer ces pièces ou documents en l'absence d'une demande de leur part.
3. Il est constant que les membres du conseil municipal de Nay ayant participé à la délibération du 29 mai 2013 contestée n'ont pas reçu copie du projet de plan local d'urbanisme avant de siéger. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, préalablement à cette séance, ils ont été informés de la mise à leur disposition, entre le 22 mai 2013, date de convocation de cette réunion, et la tenue de cette dernière, de l'ensemble des documents constituant le plan local d'urbanisme, lesquels étaient consultables en mairie. Il ne ressort en outre d'aucune pièce du dossier que les conseillers municipaux n'auraient pas disposé dans un délai suffisant avant le 29 mai 2013, date d'approbation du plan local d'urbanisme, des informations nécessaires pour apprécier le sens, la portée et la validité du projet de ce plan. En outre, alors même que la commune de Nay comporte moins de 3 500 habitants, la convocation à la séance était accompagnée d'une note explicative de synthèse portant notamment sur l'approbation du plan local d'urbanisme. Cette note présentait, de façon suffisamment détaillée, le projet de délibération et les modifications apportées au projet initial arrêté par la délibération du 30 octobre 2012, tenant compte des avis émis par les services de l'Etat, de l'enquête publique et portant sur de nombreuses rectifications relatives au zonage et au règlement. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des conseillers municipaux de la commune de Nay ont été étroitement associés à la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme. Dans ces conditions, les conseillers municipaux ont été mis à même de prendre connaissance des pièces ou documents nécessaires à leur information tout au long de la procédure d'élaboration du document d'urbanisme. Il s'ensuit que la commune de Nay est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a retenu une méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales pour annuler la délibération du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme.
4. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SCI Oppidum devant le tribunal administratif.
5. Aux termes de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " Le rapport de présentation : (...) 3° Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durable et, le cas échéant, les orientations d'aménagement et de programmation ; il expose les motifs de la délimitation des zones, des règles et des orientations d'aménagement et de programmation mentionnées au 1 de l'article L. 123-1-4, des règles qui y sont applicables, notamment au regard des objectifs et orientations du projet d'aménagement et de développement durables. Il justifie l'institution des secteurs des zones urbaines où les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement sont interdites en application du a de l'article L. 123-2 ".
6. Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme en litige présente un chapitre D intitulé " Le parti d'aménagement retenu ". Il consacre en son point 2 six pages à expliquer les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durable. Le point 3 évoque également les motifs de la délimitation des zones et des règles qui y sont applicables et le point 4 les motifs des orientations d'aménagement. Par suite, en se bornant à soutenir que le parti d'aménagement retenu par la commune ne serait pas suffisamment explicité, la SCI Oppidum ne démontre pas que le rapport de présentation serait entaché d'insuffisance.
7. Aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. En zone A peuvent seules être autorisées : - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ; - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. (...) ".
8. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer, en conséquence, le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation, sur ces différents points, ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait fondée sur des faits matériellement inexacts ou entachée d'une erreur manifeste.
9. Pour contester comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation le classement en zone A des parcelles cadastrées AC 186 et AC 188, la SCI Oppidum fait valoir que ces terrains n'auraient aucun potentiel agricole au sens de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, qu'un tel classement contredirait l'objectif, figurant au projet d'aménagement et de développement durable, consistant à concentrer les constructions, dès lors que ces parcelles sont desservies par les réseaux et situées à proximité immédiate de parcelles bâties. Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu préserver " l'activité agricole (...) autant que possible dans la mesure où elle constitue non seulement une part non négligeable de l'activité de Nay " mais qu'" elle est également l'expression d'un patrimoine et d'une identité culturels. ". Alors que les espaces naturels et agricoles représentent les deux tiers du territoire communal, les auteurs du plan local d'urbanisme ont souhaité que les sites destinés à assurer le développement urbain répondent à des faisceaux d'indication. Ainsi, afin de préserver les paysages, ils ont entendu protéger les espaces de collines situés sur la rive gauche du Gave d'Ossau et du Béez, caractérisés par une végétation en mosaïque et un relief mouvementé ouvrant de larges perspectives sur la plaine et exposés à des co-visibilités avec le bourg, limitant l'ouverture à l'urbanisation à des espaces situés en dent creuse, déjà mités. De même, constatant les nombreux espaces interstitiels entre des secteurs déjà bâtis, ils ont entendu privilégier la partie du territoire communal déjà artificialisée ou gagnée par l'urbanisation, avec la limite que tous les terrains ne pourraient bénéficier d'un classement en zone constructible compte tenu de la superficie importante qu'ils représentent, dépassant largement les besoins de la commune pour les prochaines années. Les photographies produites, corroborées par le plan de zonage versé au dossier par la commune, démontrent que les parcelles en litige sont dépourvues de construction et se situent à l'arrière d'un important lotissement délimité par la route nationale n° 636. Si quelques habitations se trouvent du même côté de la voie que les terrains en litige, elles s'insèrent dans un vaste espace agricole, lequel est contigu à un important espace naturel classé en zone N. Ainsi, les terrains de la SCI Oppidum, situés sur la rive gauche du gave d'Ossau, légèrement en pente, se situent dans un compartiment distinct de celui situé de l'autre côté de la voie et classé en zone UB. Aucun élément du dossier ne permet de contredire le rapport de présentation du plan local d'urbanisme qui fait état du potentiel agronomique de ces zones, alors que les photos produites révèlent que les parcelles en cause sont couvertes de champs de maïs. Quand bien même le commissaire-enquêteur s'est interrogé sur le développement possible de l'urbanisation de ce secteur compte tenu de la proximité de quartiers urbanisés, le choix des auteurs du plan local d'urbanisme a été de préserver " la mise en valeur de l'agriculture ". Il n'est pas allégué, ni ne ressort des pièces du dossier, que l'ouverture des autres secteurs de la ville de Nay à l'urbanisation ne répondrait pas suffisamment au besoin de la commune. Par suite, la SCI Oppidum n'est pas fondée à soutenir que le classement des parcelles en zone A procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation.
10. La SCI Oppidum ne saurait utilement soutenir que les parcelles auraient dû être classées en zone constructible au motif qu'il lui avait été délivré en 2006 un certificat d'urbanisme positif. Il est, au surplus, constant qu'elle n'en a pas sollicité la prolongation.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Nay est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé la délibération en date du 29 mai 2013 par laquelle le conseil municipal de la commune de Nay a approuvé le plan local d'urbanisme.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Oppidum la somme de 1 500 euros que demande la commune de Nay au titre des frais non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1301342 du 27 janvier 2015 du tribunal administratif de Pau est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SCI Oppidum devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.
Article 3 : La SCI Oppidum versera à la commune de Nay la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Nay et à la SCI Oppidum.
Délibéré après l'audience du 23 février 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 mars 2017.
Le rapporteur,
Cécile CABANNELe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Vanessa BEUZELIN
La République mande et ordonne au ministre du logement et du développement durable et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX01264