Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 mars 2017, M. F..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement du 19 décembre 2016 du tribunal administratif de La Réunion en tant qu'il a limité la réparation allouée au montant de 10 000 euros ;
2°) de condamner le CHU de La Réunion à lui verser les sommes de 49 721 euros et 5 000 euros en réparation de son préjudice financier et de son préjudice moral ;
3°) de mettre à la charge du CHU de La Réunion une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- si le juge peut minorer, en cas d'annulation d'une sanction disciplinaire, le préjudice financier subi au regard du comportement fautif de l'agent, un tel raisonnement n'est pas applicable en l'espèce ;
- il a subi un préjudice financier du 1er juillet 2012 au 28 février 2015, période qui n'est pas couverte par la seconde sanction de deux ans d'exclusion temporaire prononcée après l'annulation de sa révocation par la cour administrative d'appel de Bordeaux, et qui n'a pas été indemnisée ; ce préjudice financier doit être intégralement indemnisé, en comparant le traitement qui aurait dû être perçu sur la période en cause et l'allocation de solidarité spécifique qu'il a perçue ;
- il a également subi un préjudice moral.
Par une ordonnance du 29 mars 2018, la clôture de l'instruction a été fixée
au 1er juin 2018 à 12 heures.
Un mémoire a été présenté par le centre hospitalier universitaire de La Réunion
le 16 octobre 2019, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A... B...,
- les conclusions de Mme Chauvin, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant le centre hospitalier universitaire de La Réunion.
Considérant ce qui suit :
1. M. F..., agent des services hospitaliers qualifié exerçant depuis 2007 ses fonctions au sein du CHU de La Réunion, s'est vu infliger le 18 juin 2010 la sanction de révocation, prenant effet au 1er juillet 2010 au motif qu'il avait sciemment recelé des ordinateurs issus d'un vol au préjudice du centre hospitalier, faits dont il n'est pas contesté qu'il a été reconnu coupable le 30 mars 2010 par le juge pénal. Cette sanction a été annulée par un arrêt de la cour n° 12BX00977 du 3 janvier 2014 au motif qu'elle était entachée d'un vice de procédure, le président du conseil de discipline n'ayant pas mis aux voix, après le partage observé sur les deux premières sanctions proposées, les autres sanctions possibles, en méconnaissance de l'article 9 du décret du 7 novembre 1989. Par ce même arrêt, la cour a rejeté les conclusions de M. F... tendant à l'indemnisation du préjudice lié à son éviction irrégulière au motif que le bien-fondé de la sanction en cause n'était pas contesté.
2. A l'issue de la reprise de la procédure disciplinaire, la directrice du CHU de La Réunion a, par décision du 24 février 2015, infligé à M. F... une sanction d'exclusion temporaire pour une durée de deux ans prenant effet le 1er juillet 2010. Par une décision
du 26 février 2015, la même autorité a réintégré l'intéressé à compter du 1er juillet 2012 et, à l'article 2 de cette décision, l'a placé en position de disponibilité pour convenances personnelles pour la période du 1er juillet 2012 au 28 février 2015, date de sa réintégration effective. Un protocole transactionnel avait auparavant été signé le 10 février 2015 par M. F... et le CHU de La Réunion, prévoyant que M. F... " renonce à toute demande, actuelle ou future, dirigée contre le CHU du fait des conséquences de sa révocation du 18 juin 2010 " et " demande une disponibilité pour convenances personnelles pour couvrir sa carrière
du 1er juillet 2010 au 28 février 2015 ", et qu'en contrepartie, " le CHU s'engage à indemniser M. F... à hauteur d'un mois de traitement et fixe son montant définitif à 2 053,79 euros ".
3. Par un jugement du 19 décembre 2016, le tribunal administratif de La Réunion a annulé le protocole transactionnel du 10 février 2015 et la décision du 26 février 2015 plaçant M. F... en position de disponibilité pour convenances personnelles du 1er juillet 2012 au 28 février 2015, au motif que ces stipulations et dispositions méconnaissaient le régime d'ordre public soumettant la disponibilité pour convenances personnelles à un avis de la commission administrative paritaire. Il a estimé que ces illégalités fautives étaient de nature à engager la responsabilité du CHU de la Réunion, et condamné cet établissement à verser à M. F... une somme globale de 10 000 euros en réparation de ses préjudices financier et moral. M. F... relève appel de ce jugement en tant qu'il a limité la réparation allouée au montant de 10 000 euros, et demande à la cour de porter cette condamnation à la somme totale de 54 721 euros correspondant, d'une part, à la différence entre les traitements qu'il aurait dû percevoir entre le 1er juillet 2012 et le 28 février 2015, date de sa réintégration, et les indemnités qu'il a perçues pendant cette période, limitées à l'allocation de solidarité spécifique, d'autre part, à son préjudice moral.
4. Ainsi que l'a retenu le jugement attaqué, définitif sur ce point, le protocole transactionnel du 10 février 2015 et la décision de placement en disponibilité pour convenances personnelles du 26 février 2015 sont illégaux. Toutefois, si ces illégalités fautives sont de nature à engager la responsabilité du CHU de La Réunion, elles n'ouvrent droit à réparation que pour autant qu'elles sont à l'origine de préjudices directs et certains invoqués par le requérant.
5. Or, d'une part, la perte de revenus subie par M. F... entre le 1er juillet 2012 et le 28 février 2015 a pour origine directe, non pas la décision du 26 février 2015 le plaçant en disponibilité au titre de cette période, mais celle du 18 juin 2010 lui infligeant la sanction de révocation, sanction qui a produit ses effets jusqu'à l'arrêt de la cour du 3 janvier 2014, devenu définitif, annulant la sanction mais rejetant sa demande indemnitaire, puis le refus du centre hospitalier de prononcer sa réintégration effective à compter dudit arrêt. D'autre part, si l'annulation du protocole du 10 février 2015 ouvre à M. F... la possibilité, à laquelle il avait renoncé à titre transactionnel, de solliciter la réparation des préjudices consécutifs à la mesure de révocation du 18 juin 2010, il ne conteste pas le bien-fondé de cette révocation, et ce protocole ne lui a, par lui-même, causé aucun préjudice financier.
6. Par ailleurs, en admettant même que M. F... ait subi, du fait de l'illégalité fautive de la décision du 26 février 2015 le plaçant en disponibilité et du protocole transactionnel du 10 février 2015, un préjudice moral distinct de celui qu'il impute à la sanction initiale de révocation, ce préjudice, qu'il évalue lui-même à 5 000 euros, ne saurait être évalué à un montant plus élevé que l'indemnité de 10 000 euros qui lui a été allouée par le jugement attaqué.
7. Il résulte de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a limité à la somme
de 10 000 euros la condamnation prononcée à l'encontre du CHU de La Réunion.
Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, être accueillies.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F... et au centre hospitalier universitaire de La Réunion.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
Mme Anne Meyer, président-assesseur,
Mme Marie-Pierre Beuve B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 novembre 2019.
Le rapporteur,
Marie-Pierre Beuve B...Le président,
Catherine GiraultLe président,
Catherine GIRAULTLe greffier,
Vanessa Beuzelin
Le greffier,
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2