Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 19 juillet 2019 sous le n° 19BX03028, le centre hospitalier d'Albi, représenté par Me Gomez, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 27 juin 2019 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal ;
3°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier car rendu en méconnaissance du principe du contradictoire dès lors que son second mémoire, ainsi que ses pièces nouvelles n° 9 à 13 n'ont pas été communiquées et que le tribunal s'est prononcé en tenant compte des éléments qui y figuraient ;
- le jugement est également irrégulier dès lors que le tribunal, en indiquant qu'une situation de harcèlement moral était caractérisée, a statué ultra petita ;
- c'est à tort que les premiers juges ont retenu qu'il existait des éléments suffisants pour présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral justifiant le bénéfice de la protection fonctionnelle ; Mme C... n'a pas été mise à l'écart du service et son activité n'a pas été réduite ; les attestations produites par l'intéressée ne pourront être prises en considération faute d'être accompagnées de la copie des pièces d'identité des personnes témoignant ; ces témoignages sont en outre insuffisamment circonstanciés ; la réalité des brimades et propos humiliants dont Mme C... allègue faire l'objet n'est pas établie ; le Dr D..., visé par l'intéressée, n'a pas abusé de son pouvoir hiérarchique dans la procédure de validation de ses congés ; la plainte déposée à l'encontre du Dr D... a été rejetée par le conseil de l'ordre des médecins ; les difficultés rencontrées par Mme C... résultent de son propre comportement ; les courriers électroniques qu'elle a elle-même envoyés pour faire état de ses difficultés ne sauraient constituer un élément de preuve ; les attestations produites par l'intéressée sont dépourvues de valeur probante ; l'attribution de son bureau ne révèle aucune brimade ; le centre hospitalier a par ailleurs pris l'ensemble des mesures nécessaires pour garantir le bon fonctionnement du service ;
- c'est à tort que le tribunal a déduit de l'annulation des décisions refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle la nécessité de lui enjoindre d'accorder le bénéfice d'une telle protection à Mme C....
Par des mémoires en défense, enregistrés le 9 janvier 2020 et le 3 décembre 2020, Mme C..., représentée par Me Contis, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête du centre hospitalier d'Albi ;
2°) par la voie de l'appel incident, d'assortir l'injonction faite par le tribunal au centre hospitalier de lui accorder la protection fonctionnelle d'une astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Albi une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par le centre hospitalier ne sont pas fondés ; elle a bien fait l'objet d'un harcèlement moral ;
- il y a lieu d'assortir l'injonction prononcée par le tribunal d'une astreinte dès lors que le harcèlement moral dont elle a été victime se poursuit ;
- le Dr D... a été condamné par le tribunal correctionnel d'Albi le 26 novembre 2020 à une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de harcèlement moral commis du 1er juin 2015 au 28 juillet 2017.
Par ordonnance du 4 décembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 4 janvier 2021.
Par un courrier, enregistré le 6 avril 2021, le centre hospitalier d'Albi indique avoir pris les mesures conservatoires pour éviter tout contact entre Mme C... et M. D... et avoir procédé au règlement des sommes dues au titre de l'exécution du jugement du 27 juin 2019.
II. Mme C... a présenté le 7 novembre 2019 une demande en vue d'obtenir l'exécution du jugement n° 1802149 rendu le 27 juin 2019 par le tribunal administratif de Toulouse.
Par une ordonnance n° 20BX00901 du 13 mars 2020, la présidente de la cour administrative d'appel a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.
Par des mémoires, enregistrés le 27 mars 2020, le 19 mai 2020, le 30 juillet 2020, le 7 octobre 2020, le 10 novembre 2020 et le 3 décembre 2020, Mme C..., représentée par Me Contis, demande à la cour d'enjoindre au centre hospitalier d'Albi d'exécuter le jugement du 27 juin 2019 du tribunal administratif de Toulouse sous astreinte définitive, ou à titre subsidiaire provisoire, de 500 euros par jour de retard et de mettre à la charge de cet établissement une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- le centre hospitalier d'Albi persiste à refuser d'exécuter le jugement du tribunal administratif de Toulouse en dépit de ce que sa demande tendant à ce que la cour sursoie à l'exécution de ce jugement a été rejetée le 21 janvier 2020 et de ce que son pourvoi en cassation contre cette décision n'a pas été admis par le Conseil d'Etat ;
- l'exécution du jugement implique que le centre hospitalier d'Albi prenne toute mesure afin d'éloigner M. D..., qu'il lui rembourse les honoraires d'avocat dont elle a dû s'acquitter pour l'ensemble des procédures nécessaires soit un montant total de 7 317,98 euros, qu'il l'indemnise du préjudice moral qu'elle a subi du fait du harcèlement moral dont elle a été victime par le versement de la somme de 15 000 euros, qu'il engage des poursuites disciplinaires à l'encontre de M. D... et, dans l'attente, que ce médecin soit suspendu de ses fonctions, et qu'il lui verse la somme de 1 800 euros mise à sa charge par le tribunal au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, assortie des intérêts au taux légal majoré de cinq points depuis l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où le jugement est devenu exécutoire.
Par des mémoires, enregistrés le 18 septembre 2020 et le 29 octobre 2020, le centre hospitalier d'Albi, représenté par Me Gomez, conclut au non-lieu à statuer sur la demande de Mme C... tendant à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 27 juin 2019 en tant qu'il lui enjoint de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et au rejet du surplus de ses conclusions.
Il soutient que :
- il a accordé le bénéfice de la protection fonctionnelle à Mme C... par une décision du 6 août 2020, de sorte que la procédure d'exécution juridictionnelle est désormais sans objet ;
- il n'appartient pas au juge de l'exécution de faire droit à des conclusions indemnitaires présentées pour la première fois dans le cadre d'une procédure d'exécution ; en outre, la réalité du préjudice qu'allègue Mme C... n'est pas établie ;
- il n'appartient pas davantage au juge de l'exécution, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de lui enjoindre d'engager des poursuites disciplinaires ou de suspendre M. D....
Par ordonnance du 4 décembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 4 janvier 2021.
Par deux courriers, enregistrés le 2 avril 2021 et le 6 avril 2021, le centre hospitalier d'Albi indique notamment avoir pris en charge, au titre de la protection fonctionnelle, les frais de justice exposés par Mme C... à hauteur de 7 317,98 euros, lui avoir versé la somme de 1 800 euros, assortie des intérêts, conformément à l'article 3 du jugement du 27 juin 2019 du tribunal administratif de Toulouse et que M. D... a été affecté jusqu'à nouvel ordre à une mission de qualité et de sécurité de soins.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Kolia Gallier,
- les conclusions de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, rapporteure publique,
- et les observations de Me Contis, représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., médecin spécialiste en médecine nucléaire, a été recrutée par le centre hospitalier d'Albi le 2 novembre 2010 comme contractuelle, puis titularisée le 1er juillet 2013. S'estimant victime de harcèlement moral du fait des agissements du responsable de la structure interne dans laquelle elle exerce, elle a sollicité de son employeur qu'il lui accorde le bénéfice de la protection fonctionnelle. Cette demande a été rejetée par une décision du centre hospitalier d'Albi du 17 novembre 2017 et le recours gracieux formé contre cette décision a été rejeté par une décision du 20 mars 2018. Par un jugement du 27 juin 2019, à la demande de Mme C..., le tribunal administratif de Toulouse a annulé ces décisions et enjoint au centre hospitalier d'Albi de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle. Par une requête n° 19BX03028, le centre hospitalier d'Albi demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de Mme C.... Cette dernière demande, sous le n° 20BX00901, l'exécution de ce même jugement. La requête du centre hospitalier d'Albi et la demande d'exécution de Mme C... concernent le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, l'article L. 5 du code de justice administrative dispose que : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties (...). Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. " Il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer le premier mémoire d'un défendeur ou tout mémoire contenant des éléments nouveaux, est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité. Il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.
3. Le centre hospitalier d'Albi ne saurait utilement soutenir que le jugement litigieux serait irrégulier faute pour le tribunal d'avoir communiqué à Mme C... son mémoire du 27 mai 2019 ainsi que les pièces qui y étaient jointes, alors que le tribunal a visé et analysé de tels éléments, dont il a donc tenu compte, et qu'à supposer une méconnaissance du contradictoire établie, elle n'était susceptible de préjudicier qu'à Mme C....
4. Si le centre hospitalier soutient également que le jugement aurait statué ultra petita en caractérisant l'existence d'un harcèlement moral, il ressort des écritures de première instance de Mme C... qu'elle avait elle-même présenté sa demande d'annulation des décisions lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle en se prévalant d'une telle qualification. En outre, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, une telle qualification juridique n'est réservée ni au juge pénal ni au juge du plein contentieux indemnitaire.
Sur la recevabilité de la demande présentée par Mme C... devant le tribunal
5. A supposer que le centre hospitalier d'Albi ait entendu opposer une irrecevabilité à la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Toulouse au motif qu'elle serait dépourvue d'objet compte tenu de l'amélioration de sa situation à la suite des mesures mises en œuvre par l'établissement de santé en 2016, une telle fin de non-recevoir ne pourrait qu'être écartée comme faisant état d'éléments seulement susceptibles d'influer sur l'examen du bien-fondé de la demande de l'intéressée.
Sur le bien-fondé du jugement :
6. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés (...) ". Aux termes de l'article 11 de la même loi : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté (...) ".
7. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral.
8. Mme C... a exposé, devant le tribunal, avoir été victime de harcèlement moral du fait des agissements de M. D..., responsable de la structure interne de médecine nucléaire dans laquelle elle exerce et, depuis la fin de l'année 2016, également responsable du pôle médicotechnique du centre hospitalier d'Albi.
9. S'agissant, tout d'abord, de la mise à l'écart dont Mme C... soutient avoir été victime, le centre hospitalier d'Albi indique que l'invitation à l'ensemble des réunions se faisait par voie d'affichage de sorte que l'intéressée n'en a jamais été exclue et qu'elle a bien été conviée à l'ensemble des réunions sur les sujets qui la concernaient. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les invitations aux diverses réunions se faisaient, en réalité, par voie de courrier électronique, ainsi qu'en témoignent ceux qui ont été adressés à l'intéressée postérieurement aux décisions attaquées et à la suite des différentes procédures administratives et pénales qu'elle a engagées. S'il ressort des pièces du dossier que Mme C... a été destinataire de quelques invitations à participer à des réunions de service, notamment une réunion du comité de pilotage le 7 décembre 2015, une réunion de fonctionnement le
30 juin 2016 et une réunion de pôle le 30 juin 2017, de tels éléments parcellaires ne sauraient suffire à établir que Mme C... a été associée, comme le soutient le centre hospitalier d'Albi, à l'ensemble des réunions auxquelles sa position de praticien hospitalier titulaire spécialiste de médecine nucléaire la destinait à participer. Le centre hospitalier d'Albi ne fournit, en outre, aucune explication sur l'absence de sollicitation de Mme C... pour participer aux réunions d'enseignement postuniversitaire.
10. Mme C... a également fait valoir qu'elle s'est vu attribuer, alors qu'elle était en congé de maternité, le plus petit des bureaux, dépourvu de fenêtre, dans les nouveaux locaux tandis que M. D... a choisi de conserver son ancien bureau et qu'un assistant, présent seulement trois jours par semaine, a obtenu un bureau plus spacieux avec une fenêtre. Le centre hospitalier d'Albi fournit sur ce point des explications contradictoires en commençant par indiquer que M. D... n'était pas responsable de l'attribution des bureaux qui s'est faite " sans critère particulier " durant le congé maternité de Mme C..., puis que cette attribution n'était en réalité " pas définitive " à ce stade, ainsi qu'en témoigne la réattribution du bureau plus spacieux à l'intéressée. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que rien ne justifiait une répartition des bureaux défavorable à Mme C... en l'absence de celle-ci puisque l'installation du personnel dans les nouveaux locaux n'est intervenue que près de trois mois après son retour de congé maternité et, d'autre part, que c'est seulement après que l'intéressée se soit vivement émue de ce qu'elle a vécu comme une injustice qu'un bureau plus spacieux lui a finalement été attribué.
11. S'agissant, ensuite, de la diminution d'activité dont Mme C... estime avoir été victime du fait de M. D..., le centre hospitalier d'Albi fait valoir que l'enquête administrative qu'il a conduite dans ses services n'a pas permis de corroborer de telles allégations et que les témoignages produits en ce sens par l'intéressée sont insuffisamment circonstanciés. Toutefois, de tels faits sont corroborés par le témoignage d'un médecin gynécologue obstétricien chef de service de la maternité d'Albi, dont il peut être tenu compte en dépit de ce que sa carte d'identité n'est pas jointe, qui indique que M. D... a fait obstacle à ce que ses patientes puissent consulter Mme C... pour l'examen de ganglion sentinelle, par le témoignage d'une ancienne manipulatrice en électroradiologie médicale qui expose que, durant les vacations de Mme C..., M. D... exigeait des manipulateurs de disposer d'une prescription écrite pour l'injection des produits radio pharmaceutiques alors qu'une indication orale venait de leur être donnée par l'intéressée, et par le témoignage d'un praticien hospitalier chef de service de chirurgie digestive au centre hospitalier d'Albi qui indique que l'attitude du chef de service, volontiers vexatoire et parfois anti confraternelle dans la gestion des patientes, traduit une volonté de mise à l'écart de Mme C... E... la vie organisationnelle du service. Le centre hospitalier d'Albi ne fournit, en outre, aucune explication quant à la suppression, sans avertissement, d'une plage horaire du créneau sur lequel Mme C... exerce son activité libérale.
12. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, en dépit des dénégations du centre hospitalier d'Albi, que M. D... a régulièrement entravé les demandes de Mme C... visant à poser des congés annuels, en s'abstenant de transmettre ses demandes et de donner son accord de façon diligente, quand bien même les congés demandés auraient toujours finalement pu être posés. En outre, plusieurs témoignages corroborent le comportement délétère de M. D... à l'égard de Mme C..., critiquant publiquement sa pratique, refusant de lui adresser la parole et faisant courir des rumeurs infondées sur son départ du service.
13. Enfin, Mme C... a fait l'objet de deux expertises psychologiques pour les besoins de l'enquête pénale menée dans le cadre de l'action qu'elle a engagée contre M. D..., éléments dont il peut être tenu compte, bien qu'ils soient postérieurs aux décisions attaquées, dès lors qu'ils sont susceptibles d'éclairer une situation de fait existante à leurs dates. Il ressort des conclusions de ces expertises que Mme C... ne présente pas de signes de troubles ou d'anomalies susceptibles d'affecter son équilibre psychique, ni de facteurs pouvant influencer ses dires ou sa perception de la réalité.
14. Il résulte de tout ce qui précède, ainsi que l'ont justement apprécié les premiers juges, que les agissements de M. D... à l'égard de Mme C... sont constitutifs d'un harcèlement moral et que les décisions du 17 novembre 2017 et du 20 mars 2018 par lesquelles le centre hospitalier d'Albi a refusé de lui accorder la protection fonctionnelle pour ces faits sont entachées d'erreur d'appréciation. Par suite, le centre hospitalier d'Albi n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé ces décisions.
15. Contrairement à ce que soutient le centre hospitalier d'Albi, l'annulation de ses décisions du 17 novembre 2017 et du 20 mars 2018 par les premiers juges impliquait qu'il lui soit enjoint d'accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle à Mme C... pour les faits en cause. Par suite, les conclusions de la requête tendant à ce que le jugement soit annulé en tant qu'il prononce une telle injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'astreinte présentées par Mme C... sous le n° 19BX03028 et sa demande enregistrée sous le n° 20BX00901 tendant à l'exécution du jugement du 27 juin 2019 du tribunal administratif de Toulouse :
16. Par le jugement n° 1802149 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions des 17 novembre 2017 et 20 mars 2018 du centre hospitalier d'Albi, enjoint à cet établissement de santé d'octroyer à Mme C... le bénéfice de la protection fonctionnelle et mis à sa charge la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
17. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution / Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une exécution ".
18. Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de définition, par le jugement ou l'arrêt dont l'exécution lui est demandée, des mesures qu'implique nécessairement cette décision, il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'y procéder lui-même en tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision. Il ne saurait toutefois méconnaître l'autorité qui s'attache aux motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution lui est demandée.
19. Les dispositions précitées au point 6 établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à
celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis. La mise en œuvre de cette obligation peut notamment conduire l'administration à assister son agent dans l'exercice des poursuites judiciaires qu'il entreprendrait pour se défendre. Il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation
vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.
20. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 6 août 2020, le centre hospitalier d'Albi a accordé à Mme C... le bénéfice de la protection fonctionnelle. Cette décision se borne toutefois à indiquer que lui seront remboursés ses frais d'avocat dans la limite de 5 000 euros et sur justificatif et qu'elle pourra bénéficier d'un accompagnement psychologique avec le professionnel de son choix. L'état du dossier, alors que le centre hospitalier d'Albi a indiqué à la cour avoir pris d'autres mesures afin de satisfaire à l'obligation de protection qui lui incombe sans en justifier par aucune pièce, ne permet pas à la cour de se prononcer sur les conclusions à fin d'astreinte présentées par Mme C... sous le n° 19BX03028 et sur sa demande enregistrée sous le n° 20BX00901 tendant à l'exécution du jugement du 27 juin 2019 du tribunal administratif de Toulouse. Il y a lieu d'ordonner, avant dire droit, un supplément d'instruction contradictoire sur ce point dans les conditions définies à l'article 2 du présent arrêt.
DÉCIDE :
Article 1er : Les conclusions de la requête du centre hospitalier d'Albi, enregistrée sous le n° 19BX03028, tendant à l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions dudit centre hospitalier des 17 novembre 2017 et 20 mars 2018 et lui a enjoint d'accorder la protection fonctionnelle à Mme C... sont rejetées.
Article 2 : Avant de statuer sur les conclusions à fin d'astreinte présentées par Mme C... par la voie de l'appel incident sous le n° 19BX03028 et sur sa demande enregistrée sous le n° 20BX00901 tendant à l'exécution du jugement du 27 juin 2019 du tribunal administratif de Toulouse, il y a lieu d'ordonner un supplément d'instruction tendant à la production par le centre hospitalier d'Albi, dans le délai d'un mois, de l'ensemble des éléments permettant de justifier des mesures qu'il a prises afin d'assurer la protection de Mme C... ce qui recouvre, d'une part, l'ensemble des mesures concrètes permettant de faire cesser les attaques auxquelles elle est exposée et, d'autre part, les mesures nécessaires à la réparation adéquate des torts qu'elle a subis.
Article 3 : Tous droits, moyens et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier d'Albi, à Mme B... C... et au Centre de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de la Fonction publique.
Copie en sera adressée à l'Agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine.
Délibéré après l'audience du 6 avril 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Brigitte Phémolant, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
Mme Kolia Gallier, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 avril 2021.
La présidente,
Brigitte Phémolant
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX03028, 20BX00901