Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, et un mémoire, enregistré le 2 octobre 2017, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 21 juillet 2016 ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Poitiers (CHU) à lui verser la somme de 491 563,02 euros assortie des intérêts au taux légal et capitalisés à compter de la réception de sa réclamation préalable en réparation des préjudices qu'elle a subis à la suite d'une arthrodèse du pied gauche et de la pose d'une prothèse totale du genou gauche ;
3°) de mettre à la charge du CHU les frais d'expertise, consignés pour une somme de 2 948,01 euros, ainsi qu'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- une nouvelle expertise serait frustratoire dès lors que la compétence de l'expert judiciaire nommé par le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers ne saurait être mise en cause, que cet expert a pris en compte son état antérieur et que son rapport est suffisamment complet pour permettre de statuer sur l'imputabilité des préjudices ainsi que de procéder à leur liquidation dès lors que le défaut d'information et les manquements concernant sa prise en charge postopératoire retenus par l'expert ne sont pas discutés ;
- eu égard à sa teneur, le complément d'expertise ordonné par le tribunal correspond en réalité à une contre-expertise ;
- le CHU a manqué à son obligation d'information, a commis une faute en procédant à une double intervention et en prescrivant des mesures de rééducation inadaptées ;
- elle justifie de la réalité et du quantum de ses préjudices.
Par des mémoires, enregistrés les 27 septembre 2016, 12 juillet 2017 et 26 janvier 2018, la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres (CPAM), représentée par MeB..., conclut à l'annulation du jugement attaqué, à ce que le CHU soit condamné à lui verser la somme de 7 628,75 euros en remboursement de ses débours, à lui verser la somme de 1 066 euros au titre de l'article L. 376-1 alinéa 8 du code de la sécurité sociale et à ce que qu'une somme de 813 euros soit mise à la charge de cet établissement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative outre les entiers dépens.
Elle soutient que le rapport remis par l'expert judiciaire doit être entériné, qu'elle justifie du montant et de l'imputabilité de ses débours et que l'indemnité forfaitaire de gestion lui est due de plein droit.
Par des mémoires en observation, enregistrés les 28 octobre 2016 et 18 septembre 2018, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par MeD..., conclut à sa mise hors de cause et à ce que la partie succombante soit condamnée aux dépens.
Il soutient que l'aggravation de l'état de santé de Mme C...ne résulte pas d'un aléa thérapeutique.
Par des mémoires, enregistrés les 30 août et 19 octobre 2017 ainsi que le 31 janvier 2018, le CHU, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le rapport de l'expert judiciaire est lacunaire et contradictoire, que les fautes qu'il aurait commises ne pourraient être à l'origine que d'une perte de chance, qu'il a respecté son obligation d'information et qu'une intervention était inéluctable, que le montant des préjudices dont se prévaut l'appelante doit, en tout état de cause, être ramené à de plus justes proportions et que la CPAM ne justifie pas de l'imputabilité, à hauteur de 30 %, de la pension d'invalidité qu'elle verse à Mme C...dès lors que celle-ci n'a subi aucune perte de revenu ni aucun préjudice d'ordre professionnel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.G...,
- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant MmeC....
Considérant ce qui suit :
1. Mme F...C...a bénéficié, le 16 février 2012, d'une arthrodèse de l'interligne de Chopart et de la pose d'une prothèse totale du genou gauche au centre hospitalier universitaire de Poitiers (CHU). Attribuant à cette intervention une aggravation de son état de santé, Mme C... a sollicité une expertise judiciaire. Le rapport de l'expert nommé par le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a été remis aux parties le 1er avril 2015. Le CHU n'ayant pas fait droit à sa demande indemnitaire, Mme C...a demandé au tribunal administratif de Poitiers de le condamner à lui verser une somme totale de 491 563,03 euros en réparation de ses préjudices. Elle demande à la cour d'annuler le jugement du 2 juin 2016 par lequel le tribunal administratif Poitiers a ordonné, avant dire droit, un complément d'expertise médicale et de condamner le CHU à lui verser cette somme de 491 563,03 euros, outre les frais d'expertise.
2. Il résulte de l'instruction, d'une part, que l'expert judiciaire a, notamment, considéré que l'indication chirurgicale et le choix des techniques utilisées n'étaient pas critiquables et que la double intervention chirurgicale du 16 février 2012 a été réalisée conformément aux données actuelles de la science. Toutefois, il a également estimé qu'" il aurait été préférable de réaliser une intervention et de différer la seconde intervention dans le temps quand Mme C...aurait récupéré une mobilité active " et en a déduit, sans plus de précision et, en particulier, sans indiquer dans quelle mesure ce choix thérapeutique avait fait perdre une chance à Mme C...d'éviter une aggravation de son état de santé que " les interventions et les soins n'étaient donc pas adaptés à l'état de santé de MmeC... ". De même, il n'a pas précisé dans quelle mesure, les autres manquements qu'il impute au CHU, en particulier l'absence de traitement d'une arthrose de la patella apparue dans les suites immédiates des interventions en cause ainsi que le choix d'autoriser l'appui à gauche sept jours après ces interventions, l'ont également privée d'une chance d'éviter une aggravation de son état de santé.
3. Dans ces conditions, eu égard au caractère lacunaire de l'expertise judiciaire, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'en l'état de l'instruction, ils n'étaient pas en mesure d'apprécier dans quelle mesure les fautes que l'expert impute au CHU ont contribué à un échec thérapeutique et à une aggravation de son état de santé et qu'il était, par suite, nécessaire d'ordonner un complément d'expertise médicale.
4. Il résulte de tout ce qui précède que la requête doit être rejetée, y compris les conclusions indemnitaires des appelants et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...C..., au centre hospitalier universitaire de Poitiers, à la caisse primaire d'assurance maladie des Deux-Sèvres, à la caisse primaire d'assurance maladie de la charente maritime, et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 novembre 2018.
Le rapporteur,
Manuel G...
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°16BX02463