Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 avril 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 29 janvier 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Aveyron du 23 novembre 2018 en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire dans le délai de trente jours et qu'il fixe le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aveyron de l'admettre au séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : il est présent en France depuis novembre 2016 et ne pourra plus mener une vie personnelle et familiale en raison des risques de menaces et d'atteintes pesant sur lui de la part de la famille de sa compagne ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : il encourt des risques pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine en raison de persécutions qu'il y a subies de la part des membres de la famille de sa compagne ; en outre, les autorités sont à sa recherche.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 août 2019, le préfet de l'Aveyron conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 24 juin 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 26 août 2019 à 12h00.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mars 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... E..., a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant du Kosovo né le 13 juin 1972, est entré en France le 13 novembre 2016 selon ses déclarations, afin d'y solliciter l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 21 juin 2017, définitivement confirmé par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 31 octobre 2018. Par un arrêté du 23 novembre 2018, le préfet de l'Aveyron a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 29 janvier 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et qu'il fixe le pays de renvoi.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, en tenant dûment compte des circonstances propres à la situation personnelle et familiale du requérant. Elle est, par suite, suffisamment motivée.
3. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
4. M. C... est entré en France à la fin de l'année 2016 pour y solliciter l'asile. Sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 23 mars 2018 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 31 octobre 2018. Il est célibataire et sans enfant. Il ne fait état d'aucun autre attache personnelle en France. Il ne justifie pas ni même n'allègue être dépourvu de toute attache personnelle ou familiale dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 44 ans. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. C... par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
5. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
6. En deuxième lieu, la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". Ces stipulations font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée.
8. M. C... soutient qu'il encourt des risques pour sa sécurité en cas de retour au Kosovo en raison de persécutions qu'il y a subies de la part des membres de la famille de sa compagne et, en outre, que les autorités de ce pays sont à sa recherche. Toutefois, l'appelant, dont la demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA le 21 juin 2017 puis par la CNDA le 31 octobre 2018, ne produit aucun élément nouveau à l'appui de ses allégations. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aveyron du 23 novembre 2018 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et qu'il fixe le pays de renvoi. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetés.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Aveyron.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
M. D... E..., président,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 14 novembre 2019.
Le président-assesseur,
Dominique Ferrari
Le président,
Philippe E...
Le greffier,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX01610