Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 7 mai 2019 sous le n° 19BX01883, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement n° 1803475 du tribunal administratif de Toulouse du 7 mai 2019 et de rejeter la demande d'annulation de M. A....
Il soutient que le tribunal administratif a rejeté à tort la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2019, M. A..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour salarié sous astreinte de 100 euros par jour de retard et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que la demande introductive d'instance est recevable.
Par ordonnance du 12 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 3 octobre 2019 à 12h00.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 19BX01887, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour le sursis à exécution du jugement n° 1803475 du tribunal administratif de Toulouse du 7 mai 2019.
Il soutient que les conditions requises par l'article R. 811-15 du code de justice administrative pour que soit prononcé un tel sursis sont satisfaites dès lors que les moyens invoqués apparaissent de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillis par ce jugement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2019, M. A..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient, en outre, que les conditions du sursis à exécution prévues par l'article R. 811-15 du code de justice administrative ne sont pas remplies.
Par ordonnance du 19 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 3 octobre 2019 à 12h00.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 octobre 2019.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... B...,
- et les observations de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen, est entré en France le 3 septembre 2009 sous couvert d'un visa de long séjour " étudiant " et a bénéficié d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " régulièrement renouvelée entre le 4 juin 2010 et le 15 octobre 2017. Le 29 juin 2017, il a demandé un changement de statut et la délivrance d'un titre de séjour " salarié " en se prévalant d'un contrat à durée indéterminée à temps complet en qualité de cuisinier. Par arrêté du 9 avril 2018, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le préfet de la Haute-Garonne interjette appel du jugement en date du 7 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté du 9 avril 2018 et lui a enjoint de délivrer à M. A... un titre de séjour " salarié " dans un délai d'un mois à compter de sa notification du jugement.
Sur la demande d'octroi de l'aide juridictionnelle à titre provisoire :
2. Par décision du 31 octobre 2019, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Ses conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont ainsi devenues sans objet.
Sur la jonction des requêtes :
4. Les requêtes 19BX01883 et 19BX01887, présentées par le préfet de la Haute-Garonne sont dirigées contre un seul et même jugement et présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur la tardiveté de la demande introductive d'instance :
5. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 (...) et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 (...) peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation. (...). ". Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ".
6. Il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant une juridiction administrative, d'établir la date à laquelle la décision attaquée a été régulièrement notifiée à l'intéressé. En cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance, d'un pli recommandé contenant la décision, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé, dès lors qu'il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste.
7. Il résulte de la réglementation postale, et notamment de l'instruction postale du 6 septembre 1990, qu'en cas d'absence du destinataire d'une lettre remise contre signature, le facteur doit, en premier lieu, porter la date de vaine présentation sur le volet " preuve de distribution " de la liasse postale, cette date se dupliquant sur les autres volets, en deuxième lieu, détacher de la liasse l'avis de passage et y mentionner le motif de non distribution, la date et l'heure à partir desquelles le pli peut être retiré au bureau d'instance et le nom et l'adresse de ce bureau, cette dernière indication pouvant résulter de l'apposition d'une étiquette adhésive, en troisième lieu, déposer l'avis ainsi complété dans la boîte aux lettres du destinataire et, enfin, reporter sur le pli le motif de non distribution et le nom du bureau d'instance.
8. A l'appui du moyen selon lequel le tribunal administratif aurait dû rejeter la demande de M. A... comme étant tardive, le préfet se réfère à une photocopie du pli, adressé par lettre recommandée avec accusé de réception, que les services postaux ont retourné à la préfecture de Haute-Garonne le 3 mai 2018 revêtu de la mention " pli avisé non réclamé " mais qui, toutefois, ne mentionne pas la date de présentation de ce pli au domicile de l'intéressé, de nature à attester que M. A... a été avisé de cette présentation et de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste. Néanmoins, le préfet a aussi produit devant le tribunal une copie d'écran d'un tableau de suivi fournie par les services postaux établissant qu'un avis de passage a été déposé le 14 avril 2018 et que le pli en litige ne lui a été retourné qu'à l'issue du délai de quinze jours réglementaire, le 30 mai 2018. Dans ces conditions, et même si M. A... a fourni une attestation de la personne qui l'héberge selon laquelle aucun avis de mise en instance n'aurait été déposé dans sa boîte aux lettres pendant le mois d'avril 2018, l'administration apporte la preuve que les garanties que confère la réglementation postale au destinataire d'un pli ont été respectées et que l'arrêté du 9 avril 2018 doit ainsi être regardé comme ayant été régulièrement notifié le 14 avril 2018.
9. Dans ces conditions, le recours gracieux de M. A... en date du 5 juillet 2018 et reçu en préfecture le 11 juillet suivant était tardif et n'a donc pu conserver le délai du recours contentieux. La demande introductive d'instance enregistrée au greffe du tribunal administratif de Toulouse le 20 juillet 2018 était par suite également tardive et le tribunal ne pouvait que la rejeter.
10. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 9 avril 2018.
11. Par suite, les conclusions de M. A... à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur la demande de sursis à exécution :
12. Le présent arrêt statuant au fond sur les conclusions du préfet de la Haute-Garonne, les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement deviennent sans objet.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
13. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions de M. A... au titre des frais de procès doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M. A... tendant à l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse est annulé et la demande présentée par M. A... devant ce tribunal administratif est rejetée.
Article 4 : Les conclusions de M. A... à fin d'injonction, d'astreinte et de paiement des frais de procès sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera délivrée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 31 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. C... B..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 28 novembre 2019.
Le rapporteur,
Stéphane B...Le président,
Philippe PouzouletLe greffier,
Sylvie Hayet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°s 19BX01883, 19BX01887