Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 30 janvier 2017 et le 27 septembre 2018, M. C...E..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 novembre 2016 ainsi que la délibération du 18 décembre 2013 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Vaïssac une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- lors de l'adoption de la délibération du 18 décembre 2013, le conseil municipal n'a pas arrêté le bilan de la concertation, en méconnaissance de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme ;
- la délibération attaquée a, par ailleurs, été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'une personne n'appartenant pas au conseil municipal a participé aux débats ;
- la délibération attaquée a également été prise au terme d'une procédure irrégulière au regard de l'article R. 123-17 du code de l'urbanisme et L. 112-3 du code rural et de la pêche maritime, en l'absence de consultation de l'Institut national de l'origine et de la qualité ;
- le rapport de présentation est insuffisant, notamment en raison de l'absence d'analyse correcte de l'état initial du site, en particulier de l'absence d'étude de l'impact du projet de PLU sur la zone Natura 2000 à proximité et de l'absence de précision des choix retenus dans les orientations d'aménagement et de programmation ;
- au fond : le classement de la parcelle cadastrée YH n° 99 en zone non constructible du plan local d'urbanisme de Vaïssac, est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et ce classement est incohérent avec les objectifs poursuivis par les auteurs du plan local d'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2017, la commune de Vaïssac, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'appelant une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune fait valoir que :
- aucune vice de procédure ne peut être retenu : le bilan de la concertation a bien été arrêté, à la suite d'un débat sur les résultats de la concertation et sur les modifications apportées au projet afin de tenir compte des conclusions du commissaire enquêteur ; en outre, aucune personne étrangère au conseil municipal n'a participé à la séance à l'occasion de laquelle le PLU a été adopté ; aucune consultation de l'INAO n'était nécessaire ; enfin, le rapport de présentation ne souffre d'aucune insuffisance : l'état initial du site et les inventaires utiles sont réalisés ;
- sa parcelle se situe dans un espace agricole dans laquelle la commune souhaite lutter contre le mitage : la reconnaissance de la constructibilité de la parcelle de l'appelant accentuerait ce mitage.
Par ordonnance du 30 août 2018, la clôture d'instruction de cette affaire a été fixée au 1er octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sylvande Perdu,
- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant M.E....
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 18 décembre 2013, le conseil municipal de Vaïssac a approuvé le plan local d'urbanisme de cette commune. M. E...interjette appel du jugement du 30 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à obtenir l'annulation de cette délibération.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
S'agissant des vices de procédures invoqués :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, applicable au litige : " I - Le conseil municipal délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : a) Toute modification ou révision du plan d'occupation des sols qui ouvre à l'urbanisation tout ou partie d'une zone d'urbanisation future (...). / Les autorisations d'occuper ou d'utiliser le sol ne sont pas illégales du seul fait des vices susceptibles d'entacher cette délibération ou les modalités de son exécution. / A l'issue de cette concertation, le maire en présente le bilan devant le conseil municipal qui en délibère. / Le dossier définitif du projet est alors arrêté par le conseil municipal et tenu à la disposition du public. (...) " ;
3. Il ressort des pièces du dossier que lors de la séance du 19 avril 2013, le maire a exposé le bilan de la concertation aux membres du conseil municipal qui, après en avoir délibéré et relevé que les résultats de la concertation n'ont pas porté sur le fond du projet, a décidé de " clore " la phase de concertation. Enfin, il ressort du document intitulé " modalités de la concertation ", annexé à la même délibération du 19 avril 2013, que le conseil municipal s'est prononcé sur les demandes formulées lors de la concertation menée. Dans ces conditions, et ainsi que les premiers juges l'ont à juste titre retenu, le conseil municipal doit être regardé comme ayant tiré le bilan de cette concertation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.
4. En deuxième lieu, M. E...reprend en appel le moyen tiré de ce qu'une personne n'appartenant pas au conseil municipal, provenant du cabinet d'études auquel la commune a eu recours, aurait été présente lors " des délibérations ayant jalonné l'élaboration du plan local d'urbanisme ", et ne se prévaut devant la cour d'aucun élément nouveau par rapport à son argumentation de première instance. Il y a donc lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges au point 5 du jugement attaqué.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme, alors applicable à la date de la décision en litige : " Le rapport de présentation : (...) 2° Analyse l'état initial de l'environnement, présente une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers et justifie les objectifs de modération de cette consommation et de lutte contre l'étalement urbain arrêtés dans le projet d'aménagement et de développement durables au regard, notamment, des objectifs fixés, le cas échéant, par le schéma de cohérence territoriale, et des dynamiques économiques et démographiques ; 3° Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durable et, le cas échéant, les orientations d'aménagement et de programmation ; (...) 4° Evalue les incidences des orientations du plan sur l'environnement et expose la manière dont le plan prend en compte le souci de sa préservation et de sa mise en valeur ; (...) " ;
6. Il ressort des pièces du dossier que le rapport de présentation mentionne les sites Natura 2000 situés à proximité du territoire communal : les sites " vallées du Tarn, de l'Aveyron, de Viaur, de l'Agout et du Gijou " au Nord, " gorges de l'Aveyron, causses proches et vallées de la Vère " et " forêt de Grésigne et environs ", situés à l'Est. A cet égard, M. E...ne précise pas quels impacts du plan local d'urbanisme sur ces sites Natura 2000 n'auraient pas été pris en compte.
7. Le rapport de présentation tient compte de la zone naturelle d'intérêt faunistique et floristique (ZNIEFF), de la " vallée du lac de Gouyre ", dont le lac est décrit comme permettant de renforcer la richesse faunistique du secteur. Ce rapport précise également qu'une partie du territoire de la commune, située à l'est, est concernée par l'arrêté préfectoral de protection de biotope du 24 janvier 1994 relatif au " site du Gouyre " et qu'à ce titre, plus d'une centaine d'espèces d'oiseaux a été inventoriée dont une grande partie est typique des milieux aquatiques. Le rapport décrit, par ailleurs, les essences d'arbres présents dans les forêts de Vaïssac, et souligne la variété des espèces animales vivant dans ces boisements de grande superficie, et décrit également les diverses zones bocagères. Il identifie, enfin, des réservoirs de biodiversité et des corridors biologiques (boisements, ruisseaux, haies...) dont les fonctions sont décrites dans ce rapport de présentation.
8. Contrairement à ce que soutient l'appelant, le rapport de présentation évalue les incidences du plan sur l'environnement, plus particulièrement sur la faune et la flore, et expose la manière dont le plan local d'urbanisme prend en compte la préservation de l'environnement naturel, notamment par la délimitation de zones N ou l'intégration de terrains dans les trames verte et bleue alors que l'urbanisation future de la commune, en continuité de l'existant et centrée principalement autour du village de Vaïssac et des secteurs de moindre sensibilité paysagère et écologique, est qualifiée comme n'ayant pas d'impact environnemental. Le rapport de présentation souligne enfin la nécessité de ne pas développer l'urbanisation le long des routes mais de regrouper les habitations et en justifie l'utilité pour la préservation de l'environnement.
9. Par suite, le rapport de présentation satisfait aux exigences de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme.
10. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 123-17 du code de l'urbanisme, applicable au litige : " Conformément à l'article L. 112-3 du code rural, le plan local d'urbanisme ne peut être approuvé qu'après avis de la chambre d'agriculture et, le cas échéant, de l'Institut national de l'origine et de la qualité dans les zones d'appellation d'origine contrôlée et du centre régional de la propriété forestière lorsqu'il prévoit une réduction des espaces agricoles ou forestiers. Il en va de même en cas de révision, de révision simplifiée et d'une mise en compatibilité en application de l'article L. 123-16. Ces avis sont rendus dans un délai de deux mois à compter de la saisine. En l'absence de réponse à l'issue de ce délai, l'avis est réputé favorable. ".
11. Il est constant que la commune de Vaïssac se situe dans le périmètre de l'appellation d'origine contrôlée Coteaux du Quercy et que des parcelles y sont plantées de vignes. Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme indique clairement que les espaces à vocation agricole ont été préservés : le document d'urbanisme maintient les espaces à " fort potentiel agricole " et s'efforce de limiter au mieux la consommation de terres liée à l'ouverture de nouvelles zones d'urbanisation. Enfin, si des " dents creuses " sont comblées dans certains secteurs, il ressort également du rapport de présentation que des parcelles sont nouvellement classées en zone A et la surface totale des espaces agricoles n'est pas réduite : la surface agricole utile de la commune était de 58,7 % du territoire communal lors du recensement de 2000 et les surfaces affectées à l'activité agricole représentent dans le plan local d'urbanisme près de 61,5% de la surface communale. Dans ces conditions, aucune diminution des espaces agricoles ne résulte du nouveau plan, et l'Institut national de l'origine et de la qualité n'avait pas à être consulté. Par suite, le moyen tiré de la violation de l'article R. 123-17 du code de l'urbanisme et de l'article L. 112-3 du code rural et de la pêche doit être écarté.
S'agissant du classement de la parcelle de M.E... :
12. Aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, applicable aux faits en litige : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. En zone A peuvent seules être autorisées : - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ; - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. ". Et aux termes de l'article A1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vaïssac : " En zone A, à l'exception des constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole, toutes les occupations et utilisations du sol sont interdites. (...) En zone Ah, toutes les constructions sont interdites à l'exclusion des constructions suivantes : les constructions et installations techniques nécessaires au fonctionnement des services publics et réseaux d'intérêt public, l'extension des constructions existantes dans la limite de 20 % de la surface plancher existante, les bâtiments permettant l'extension des activités existantes, les annexes des constructions à usage d'habitation existantes à la date d'approbation du PLU, le changement de destination pour la réhabilitation des constructions existantes, la reconstruction sur le site d'un bâtiment existant à la date d'approbation du PLU après démolition totale comme mentionné dans les dispositions générales. (...) La réglementation de la zone A et Ah permet en outre le changement de destination des bâtiments agricoles en habitation. Volonté est écrite de ne pas favoriser le mitage mais de permettre le maintien, ainsi que la mutabilité du bâti existant. " ;
13. La parcelle appartenant à M.E..., cadastrée section YH n° 99, située au lieu-dit Al Pont, est classée en zone Ah dans le plan local d'urbanisme. Elle est vierge de toute construction, se situe le long d'un axe de circulation et est éloignée du centre du bourg. Elle est entourée de parcelles également classées en zone Ah : d'un côté de la voie publique, la parcelle litigieuse est bordée de deux parcelles supportant chacune une construction, tandis que trois parcelles situées de l'autre côté de la voie comportent également une construction. La parcelle litigieuse ouvre au sud sur une vaste zone agricole. En outre, il ressort du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) que les objectifs des auteurs du plan local d'urbanisme consistent à organiser l'urbanisation en continuité de l'existant, centrée prioritairement sur le bourg, et à affirmer l'identité du bourg tout en limitant l'étalement de l'habitat pavillonnaire en linéaire des axes de circulation, ainsi qu'à maintenir et permettre le développement de l'activité agricole, en valorisant les terres agricoles, en évitant le mitage de l'espace et en gérant la réciprocité habitat/activité agricole. Enfin, au titre de la maîtrise de l'urbanisation, le rapport de présentation précise que les potentialités foncières doivent être concentrées sur le bourg, qu'il convient, ainsi que déjà précisé au point 10 du présent arrêt, de regrouper les habitations et de combler des espaces de " dents creuses " situées dans des secteurs déjà urbanisés, plus précisément dans les hameaux de Laboissière, de Les Teularios et de Revel.
14. Ainsi, eu égard à la situation de cette parcelle et au parti pris d'aménagement des auteurs du plan local, alors même que des constructions se situent à proximité de la parcelle litigieuse, aucune incohérence entre ce classement et les objectifs poursuivis par les auteurs du plan local d'urbanisme, ni aucune erreur manifeste d'appréciation dans le classement en zone agricole de la parcelle appartenant à M. E...ne peuvent être retenus.
15. Les circonstances que cette parcelle était anciennement classée en zone constructible dans la carte communale de la commune, et que le maire de la commune de Vaïssac ne s'est pas opposé, en janvier 2012, à la déclaration préalable déposée par le propriétaire d'une parcelle cadastrée n° 75 située lieu-dit " Campeguillou " en vue de la création de deux lots sur son terrain, ne peuvent être utilement invoquées, dès lors que la commune a opéré un autre choix d'urbanisme qui n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 18 décembre 2013 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Vaïssac.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Vaïssac, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposé par l'appelant et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de M. E...une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Vaïssac, et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête présentée par M. E...est rejetée.
Article 2 : M. E...versera à la commune de Vaïssac une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E...et à la commune de Vaïssac.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
Philippe Pouzoulet, président,
Marianne Pouget, président-assesseur,
Sylvande Perdu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 novembre 2018.
Le rapporteur,
Sylvande Perdu
Le président,
Philippe. PouzouletLe greffier,
Catherine Jussy
La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX00324