Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 juillet 2016, la commune d'Hendaye, représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 mai 2016 du tribunal administratif de Pau ;
2°) de rejeter la demande de M.A... ;
3°) de condamner M. A...à verser à la commune d'Hendaye la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont relevé 1'illégalité du plan d'alignement du " chemin des Fermes " au motif qu'il ne constituait pas une dépendance du domaine public communal ; le tribunal sans expressément en donner la qualification juridique, a considéré à tort que le " chemin des Fermes " était, à la date d'approbation du plan d'alignement, un chemin rural ; le " chemin des Fermes " a été incorporé aux voies communales en application de 1'ordonnance du 7 janvier 1959 ; un chemin rural ne peut être qualifié de tel que s'il n'a pas appartenu auparavant à la catégorie des voies urbaines et s'il n'a jamais fait l'objet d'une décision d'incorporation dans la voirie communale par la commune ; un chemin situé dans une zone urbanisée d'une commune et qui a l'aspect d'une rue n'est pas un chemin rural et ne peut donc appartenir au domaine privé de la commune ; le " chemin des Fermes " constitue une voie urbaine au sens de cette ordonnance et appartient donc à son domaine public en raison de son affectation à la circulation générale sans qu'il ait été nécessaire de procéder à son incorporation dans le domaine public routier par le biais d'un acte express de classement ;
- contrairement à ce que prétend M.A..., aucun document n'indique que les parcelles AP 64 et AP 74 présentaient initialement une superficie de 10 830 m2 ; l'acte de succession de son père mentionne que les parcelles litigieuses sont d'une superficie totale de 9 238 m2 comme l'a constaté le géomètre expert lors des opérations de bornage amiable de janvier 2013 ;
- le procès-verbal de bornage daté du 3 mars 1927 qui ne comporte aucune référence de superficie remet en cause les allégations de M. A...en présentant en son annexe le " chemin d'Ouristy " comme un chemin communal et matérialise bien un " chemin latéral du chemin de fer " ; si M. A...nie l'existence du " chemin d'Ouristy " et du " chemin des Fermes ", ces deux chemins apparaissent également sur des plans de situation fournis par des pétitionnaires dans le cadre de 1'instruction de demandes de permis de lotissement réalisés, à 1'époque, par le géomètre-expert D.P.L.G ayant établi le procès-verbal de bornage daté de 1927, actant le partage du fondsA... ; ces chemins apparaissent dans les matrices cadastrales successives, dont l'une datant de 2013 a été produite par M.A... ;
- la commune n'a pas commis d'erreur de droit en procédant à l'alignement prévue par le décret du 14 mars 1964 dès lors que le chemin litigieux préexistait et que l'article L. 161-3 du code rural et de la pêche maritime établit une présomption de propriété publique s'agissant des voies et des chemins, non classés au titre des voies communales, lorsqu'ils sont affectés à 1'usage du public, ce qui est le cas en l'espèce ;
- la procédure d'alignement résulte pour l'essentiel du plan d'occupation des sols approuvé par le préfet le 9 mai 1977 ; le préfet ne pouvait l'autoriser que si ce chemin était propriété publique ;
- la commune a procédé sans détournement de procédure et sans porter atteinte au droit de propriété du requérant à l'élargissement pour assurer la sécurité de ses usagers ; il n'y a pas modification excessive du terrain d'assiette du chemin ; les dispositions applicables au moment des faits n'imposaient pas que la commune indemnise les consortsA... ;
- le plan d'alignement n'a jamais été abrogé et la collectivité n'a par ailleurs procédé à aucun acte d'aliénation de la superficie acquise par le biais du plan d'alignement ; aucune disposition de nature législative ou réglementaire ne prévoit la caducité du plan d'alignement ni la rétrocession des surfaces acquises en cas d'absence de travaux d'élargissement ; le plan d'alignement ayant été publié et transmis au titre du contrôle de légalité, son caractère exécutoire n'est pas contestable.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 août 2018, M.A..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune d'Hendaye le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement du tribunal doit être confirmé ; il est constant que le chemin dont il s'agit n'est pas une voie communale ; il n'y a jamais eu de délibération portant classement de la portion du terrain en litige en application de l'article L. 141-3 du code de la voirie routière ; ce chemin n'a pas non plus fait l'objet d'une affectation à l'exploitation d'un service public ni à l'usage du public ; il est impraticable à la circulation publique et rien ne permet de dire qu'il est utilisé comme voie de passage ; la commune n'a jamais entretenu les lieux ; le fait que le chemin ne soit pas cadastré ne suffit pas pour considérer qu'il appartient au domaine public ;
- la commune ne peut pas se prévaloir de la présomption de propriété prévue à l'article L. 161-3 du code rural faute d'affectation à l'usage du public ;
- la commune ne peut davantage se prévaloir de l'article 9 de l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959 en affirmant qu'il s'agit d'une voie urbaine en l'absence d'affectation à l'usage du public ou de classement ;
- son acte de propriété de 1953 indique que sa propriété mesurait 10 830 m² et le chemin n'a jamais fait l'objet d'aménagement et n'a jamais desservi le bas quartier depuis le chemin rural d'Ouristy qui au demeurant n'existe pas ; la rue des Fermes se termine en impasse.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de la voirie routière ;
- l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le décret n° 64-262 du 14 mars 1964 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
- et les observations de MeE..., représentant la commune d'Hendaye et de Me F..., représentant M.A....
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 26 avril 1979, le conseil municipal de la commune d'Hendaye a approuvé le plan d'alignement du " chemin des Fermes ", d'une largeur qui était alors de 5 à 10 mètres et situé entre une voie ferrée et trois parcelles aujourd'hui cadastrées section AP n° 64, 74 et 76. M. C...A...propriétaire des parcelles cadastrées section AP n° 64 et 74 qu'il a héritées de son père, a demandé au maire d'Hendaye, par lettre du 20 mars 2014, l'abrogation de la délibération du 26 avril 1979. Le maire ayant implicitement refusé de faire droit à cette demande, M. A...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler cette décision implicite de rejet et d'enjoindre au maire d'Hendaye de procéder à l'abrogation du plan d'alignement litigieux. La commune d'Hendaye relève appel du jugement du 19 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Pau a d'une part, annulé la décision du maire d'Hendaye refusant implicitement d'abroger la délibération du 26 avril 1979, d'autre part, enjoint au maire de la commune d'Hendaye d'abroger cette délibération dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et enfin mis à la charge de la commune le versement au profit de M. A...d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2. Pour prononcer l'annulation de la décision contestée, le tribunal a jugé qu'à supposer que le " chemin des Fermes " soit la propriété de la commune d'Hendaye, il ne pouvait constituer une voie communale et, par suite, ne pouvait légalement faire l'objet d'un plan d'alignement.
3. Aux termes de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959 relative à la voirie des collectivités locales, applicable à la date d'approbation du plan d'alignement contesté : " La voirie des communes comprend : 1° Les voies communales qui font partie du domaine public ; 2° Les chemins ruraux, qui appartiennent au domaine privé de la commune ". L'article 9 de cette ordonnance dispose que : " Deviennent voies communales les voies qui, conformément à la législation en vigueur à la date de la présente ordonnance appartiennent aux catégories ci-apres : 1° Les voies urbaines (...) 3° Ceux des chemins ruraux reconnus, dont le conseil municipal aura, dans un délai de six mois, décidé l'incorporation ; cette délibération pourra être prise sans enquête publique ". Il résulte de ces dispositions que, sans que soit nécessaire l'intervention de décisions expresses de classement telles que celles prévues aux 2° et 3° du même article pour les chemins vicinaux et les chemins ruraux reconnus, font partie de la voirie urbaine et appartiennent au domaine public communal les voies situées dans une agglomération, dont la commune est propriétaire et qui étaient, antérieurement à l'intervention de l'ordonnance du 7 janvier 1959, affectées à l'usage du public.
4. Aux termes de l'article 8 du décret n° 64-262 du 14 mars 1964, applicable à la date d'approbation du plan d'alignement contesté : " Les limites que la commune entend assigner aux voies communales sont fixées soit par le plan parcellaire annexé ou consécutif à la délibération du conseil municipal portant ouverture ou modification des emprises de la voie, soit par un plan d'alignement. ". Aux termes de l'article 9 : " Il est dressé un plan général d'alignement : 1. Pour les voies communales situées à l'intérieur des agglomérations définies conformément aux dispositions des articles R 1 et R 44 du code de la route ; 2. Pour les voies communales modifiées en application d'un plan d'urbanisme approuvé ; 3. Pour les autres voies communales désignées par le conseil municipal " et aux termes de l'article 11 de ce décret : " Les plans d'alignement ou de nivellement des voies communales et leur modification sont adoptés par délibération du conseil municipal au vu des résultats de l'enquête publique prévue au premier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959 ".
5. A supposer que le " chemin des Fermes ", situé entre la rue des Fermes et le chemin rural d'Ouristy, ait été utilisé par des usagers, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que ce chemin, dont l'existence est révélée notamment par le plan annexé au procès-verbal de bornage de fond, daté de 1927, ainsi que par les plans de situation datés de 1953 et 1957, aurait été, au 8 janvier 1959, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance citée ci-dessus, affecté à la circulation générale ni d'ailleurs qu'il aurait fait l'objet d'aménagements en vue d'une telle affectation. Il n'avait pas, ainsi, le caractère d'une voie publique ni, par suite, celui d'une voie urbaine incorporée dans le réseau des voies communales en application des dispositions du 1° de l'article 9 de l'ordonnance du 7 janvier 1959. Il est constant qu'il n'avait pas non plus été classé parmi les voies communales en application de cette ordonnance. Dès lors, et à supposer même qu'il appartienne à la commune et qu'il ait été situé en agglomération antérieurement à l'intervention de l'ordonnance du 7 janvier 1959, ce chemin, comme l'ont estimé les premiers juges, ne peut être regardé comme ayant le caractère d'une dépendance du domaine public communal et il ne peut donc, s'il appartient à la commune, que faire partie du domaine privé de celle-ci.
6. Il résulte de ce qui précède que la procédure d'alignement, laquelle ne peut concerner qu'une voie communale en vertu des dispositions précitées du décret 14 mars 1964, n'était pas applicable au " chemin des Fermes ". Par suite ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, la délibération en date du 26 avril 1979 approuvant le plan d'alignement du " chemin des Fermes " et autorisant le maire à établir ledit plan est illégale.
7. En application de l'article 16-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, en vigueur à la date à laquelle le maire a refusé de faire droit à la demande d'abrogation présentée par M. A... : " L'autorité compétente est tenue, d'office ou à la demande d'une personne intéressée, d'abroger expressément tout règlement illégal ou sans objet, que cette situation existe depuis la publication du règlement ou qu'elle résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ". En application de ces dispositions, et dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le plan d'alignement contesté aurait donné lieu à l'ensemble des formalités auxquelles est subordonnée l'incorporation définitive dans le domaine public de la commune du sol des propriétés qu'il détermine, le maire était donc tenu de faire droit à la demande d'abrogation présentée par M.A....
8. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Hendaye n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Pau a annulé la décision par laquelle le maire d'Hendaye a implicitement refusé d'abroger la délibération du 26 avril 1979 portant approbation du plan d'alignement du " chemin des Fermes " et lui a enjoint d'abroger cette délibération dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la commune d'Hendaye de la somme que celle-ci demande au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune le versement à M. A...de la somme de 1 000 euros sur le fondement de ces dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Hendaye est rejetée.
Article 2 : La commune d'Hendaye versera à M. A...la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Hendaye et à M. C...A....
Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 9 octobre 2018.
Le premier assesseur,
Frédéric FaïckLe président-rapporteur,
Elisabeth Jayat
Le greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 16BX02368
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