Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2016, la SARL Le Compas, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du16 juin 2016 ;
2°) de condamner le grand port maritime de Bordeaux à lui payer la somme de 49 601,47 euros au titre de factures non acquittées ;
3°) de condamner solidairement le grand port maritime de Bordeaux et Bordeaux Métropole à lui verser une indemnité de 817 055 euros en réparation des préjudices subis avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts ;
4°) de mettre à la charge solidaire du grand port maritime de Bordeaux et de Bordeaux Métropole la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la responsabilité sans faute du GPMB est engagée du fait du dysfonctionnement des ponts tournants et des écluses ; alors que ces travaux impliquant l'interdiction de tout accès des navires aux bassins à flot depuis la Garonne ont été fixés du 1er octobre 2012 au 31 mars 2013, cette interdiction s'est prolongée durant la période estivale du 1er avril au 9 juillet 2013 et du 20 au 22 août 2013 en raison de dysfonctionnements dus au pont tournant chevauchant l'écluse dont Bordeaux Métropole est propriétaire, suivie d'une période de deux mois au cours de laquelle des travaux de dragage ont été entrepris ; alors même que les ouvrages devaient faire l'objet d'une ouverture à partir du 1er avril 2013, le fonctionnement des ouvrages était défectueux et l'ouverture a été circonscrite aux heures nocturnes et aux jours fériés ; de plus, le caractère défectueux des écluses a nécessité des travaux de réfection à compter du 1er décembre 2013 impliquant, de nouveau, l'interdiction de tout accès des navires aux bassins à flot pour une durée de sept mois ;
- en modifiant incessamment les périodes d'ouverture et de fermeture des écluses durant les travaux, sans information préalable sur les nombreuses ouvertures/fermetures des écluses, notamment pendant la période estivale, et en retardant le transfert des activités de la société sur l'autre rive de la Garonne alors que le gestionnaire du domaine public a acté le principe de cette occupation sur une parcelle de 1 060 m² à compter du 1er avril 2013, le GPMB a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité ;
- les travaux de dragage ont été catastrophiques puisque le niveau d'envasement des bassins à flots et des chenaux pendant plus d'un mois n'a pas permis de garantir un libre accès des navires ; ainsi, les conditions anormales de réalisation de ces travaux lui ont causé un préjudice anormal et spécial ;
- elle a subi un préjudice commercial puisqu'elle n'a pas été en mesure de satisfaire sa clientèle, et que 80 clients ont résilié leur abonnement de stationnement à sec, en raison des incertitudes attachées aux conditions de remise à flot des navires ; la résiliation des abonnements a impliqué pour elle l'impossibilité de refacturer la redevance aux clients ;
- elle a subi un préjudice financier lié aux pénalités bancaires et pénalités de retard, induites par les paiements tardifs des charges sociales et impôts ;
- elle a également subi un préjudice d'image ;
- le gérant de la société a subi un préjudice moral ;
- son préjudice présente un caractère spécial ; titulaire de plusieurs AOT sur le domaine public du GPMB, au bord du bassin à flot n° 2 à Bordeaux aux fins d'y exercer une activité de stockage, réparation, d'entretien et d'hivernage de bateaux de plaisance, ainsi que de négoce de matériels et d'équipements associés, son activité commerciale est ainsi directement conditionnée au bon fonctionnement des écluses et des ponts tournants aux fins de permettre aux navires d'accéder du fleuve au quai du bassin à flot ; la réalisation des travaux de réfection de ces ouvrages dans des conditions anormales est de nature à impacter directement et spécialement l'exploitation d'une activité commerciale sur le domaine public du GPMB ;
- le GPMB engage également sa responsabilité contractuelle ; elle bénéficie depuis 1991 d'autorisations d'occupation temporaire sur le domaine foncier du GPMB, au bord du bassin à flot n° 2 à Bordeaux pour y exercer une activité de réparation, d'entretien et d'hivernage de bateaux de plaisance, ainsi que de négoce de matériels ; elle est également titulaire d'une AOT limitrophe concernant les bords de quai du bassin à flot pour y entreposer des navires ; elle dispose en outre de deux AOT aux portes 12 à 14 du Hangar 27 pour le négoce, la maintenance, le service et le gardiennage de bateaux et articles divers accordées depuis plusieurs années et renouvelées pour la dernière fois entre le 29 août 2013 et le 30 janvier 2014 ; or, depuis le mois de novembre 2012, elle est dans l'impossibilité d'exploiter normalement ces AOT en raison des manquements contractuels commis par le GPMB, en raison de la poursuite de travaux de réfection des écluses et pont tournant postérieurement au 1er juillet 2013, des fermetures/ouvertures erratiques et non annoncées des écluses, des dysfonctionnements des ponts tournants au niveau du pont Sénégal et des travaux de dragage entrepris en septembre 2013 ;
- le GPMB doit également être condamné à lui payer la somme de 49 601,47 euros au titre d'achats et interventions diverses qui n'ont pas été payés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2018, Bordeaux Métropole, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la SARL Le Compas au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable en raison de l'autorité de chose jugée découlant du protocole transactionnel et du défaut de moyen dirigé à son encontre tendant à voir engagée sa responsabilité et, à titre subsidiaire, au caractère infondé des prétentions de la SARL Le Compas.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2018, le grand port maritime de Bordeaux (GPMB), représenté par Me B..., conclut :
1°) à titre principal, à ce qu'il soit constaté le désistement de la société Le Compas à défaut de reprise de l'instance par le mandataire judiciaire à la suite du jugement du tribunal de commerce de Bordeaux ;
2°) à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SARL Le Compas au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- postérieurement à l'introduction de sa requête d'appel, une procédure de liquidation judiciaire de la société Le Compas a été ouverte suivant jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux en date du 12 octobre 2016 ; à défaut de reprise de l'instance par le liquidateur, le désistement implicite de la société Le Compas devra être constaté ;
- les moyens soulevés par la SARL Le Compas ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 12 avril 2018, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 28 mai 2018 à 12 heures.
Par lettre du 23 novembre 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître du litige, en tant qu'il concerne le paiement de factures d'outillage, opposant le gestionnaire d'un service public industriel et commercial à un de ses usagers.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code du domaine de l'Etat ;
-le code général des collectivités territoriales ;
-le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des ports maritimes ;
- le code des transports ;
- la loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire ;
- le décret n° 2008-1034 du 9 octobre 2008 instituant le grand port maritime de Bordeaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue ;
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant le grand port maritime de Bordeaux.
Considérant ce qui suit :
1. Le 7 juin 2000, le port autonome de Bordeaux, devenu le grand port maritime de Bordeaux (GPMB), a conclu avec la société Le Compas une convention temporaire d'occupation du domaine public portuaire constitutive de droits réels concernant un terrain d'une superficie de 333 m2, superficie ramenée à 327 m2 par avenant en date du 6 avril 2001, situé au bassin à flot n° 2 " en vue de l'exploitation d'un atelier de réparations navales ", sur une durée de vingt ans à compter du 1er juin 2000. Par ailleurs, à la suite du rachat de la société Aquitaine Yachting, la société Le Compas a, selon deux autorisations d'occupation temporaires (AOT) non constitutives de droits réels, en date du 29 août 2013, été autorisée à occuper un local de 792 m² situé dans le hangar 27 au bassin à flot n° 2, " en vue d'y exercer le négoce, maintenance, service et gardiennage de bateaux et articles de loisirs ", pour une durée de douze mois à compter du 1er janvier 2013, et un terrain d'une surface de 635 m² situé au bassin à flot n° 2 en vue d'y aménager un parc à bateaux, pour une durée de douze mois à compter du 1er février 2013.
2. Dans le cadre des projets de rénovation du quartier des bassins à flots, des travaux de rénovation et de maintenance ont été prévus dont une révision importante de l'écluse et une rénovation du port de plaisance. Des travaux ont notamment été entrepris par le GPMB afin de garantir l'accès des bateaux aux voies navigables, notamment des travaux de dragage et de réparation de l'écluse. Dans ce cadre, les différents utilisateurs des bassins à flots ont été informés d'une intervention de maintenance à compter de décembre 2012 sur l'écluse du bassin n° 2 permettant l'accès des navires aux bassins à flot depuis la Garonne, afin, après assèchement, de désenvaser l'ouvrage et de le restaurer.
3. Un pont auxiliaire à usage de la circulation routière passant au-dessus de cette écluse qui permet notamment l'accès aux installations de la société Le Compas a été immobilisé pendant quelques jours. La communauté urbaine de Bordeaux, devenue Bordeaux métropole, utilisait ce pont dont elle est propriétaire, afin d'y faire circuler son tramway dans l'attente de réparation du " pont principal des écluses ". A l'occasion d'une manoeuvre de levage, ce pont a connu un dysfonctionnement du 1er au 9 juillet 2013 et une nouvelle interruption du 20 au 22 août 2013, qui ont empêché la sortie des bateaux des bassins à flot. La communauté urbaine de Bordeaux et la société Le Compas ont conclu un protocole transactionnel à hauteur de 200 000 euros pour l'indemnisation des préjudices subis par la société du fait de ce dysfonctionnement.
4. Le 22 octobre 2013, la société Le Compas a adressé au GPMB une demande préalable d'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis à hauteur de 640 500 euros, en raison des manquements ayant fait obstacle à une exploitation normale de son activité exercée sur le domaine public, laquelle a été rejetée le 23 janvier 2014. Elle a ensuite demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner solidairement le GPMB et Bordeaux métropole à lui verser une indemnité de 817 055 euros en réparation de ces préjudices, ainsi que la somme de 49 601,47 euros à titre de provision sur des factures non acquittées. Elle relève appel du jugement du 16 juin 2016, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur le " désistement implicite " allégué de la requête d'appel :
5. Le GPMB soutient que, par un jugement du 12 octobre 2016, postérieur à l'introduction de la requête, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte et que le mandataire judiciaire de la société requérante n'a pas indiqué vouloir reprendre l'instance. Il en déduit qu'en application des effets d'une liquidation, la cour devra constater un désistement implicite de l'instance par le liquidateur. Toutefois, et en tout état de cause, l'éventuelle dissolution de la personne morale requérante, postérieure à l'introduction de la requête devant la cour, n'a pas pour effet d'éteindre l'instance en cours et ne rend pas le litige sans objet.
6. Par ailleurs, les règles prévoyant que le jugement ouvrant ou prononçant la liquidation judiciaire d'une entreprise emporte de plein droit, pour le débiteur, le dessaisissement de l'administration et de la disposition de ses biens et que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ne sont édictées que dans l'intérêt des créanciers. Dès lors, seul le liquidateur peut s'en prévaloir pour exciper de l'irrecevabilité du dirigeant de la société dont la liquidation judiciaire a été prononcée à se pourvoir en justice ou à poursuivre une instance en cours. Faute pour le liquidateur d'avoir contesté la recevabilité du pourvoi formé par le gérant de la société Le Compas, cette requête doit être regardée comme régulièrement formée.
Sur la régularité du jugement :
7. Les litiges relatifs à la passation et à l'exécution de contrats comportant occupation du domaine public relèvent, en vertu de l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques, de la compétence du juge administratif. Cependant, les litiges entre le gestionnaire d'un service public industriel et commercial et ses usagers, quand bien même l'activité de ce service a lieu sur le domaine public, relèvent de la compétence des juridictions judiciaires, ces litiges étant par nature détachables de l'occupation domaniale. Il en va notamment ainsi des litiges portant sur des prestations d'exploitation de l'outillage public portuaire, service public industriel et commercial, et un usager de ce service.
8. Les factures d'un montant de 49 601,47 euros dont la société Le Compas demande le paiement au GPMB mentionnent qu'elles portent sur des prestations de sortie de bassin de navires, de déplacement de bateau ou de grutage, constitutives de l'outillage du port. De telles prestations se rattachant à l'exécution par le GPMB de sa mission de service public industriel et commercial, en application des principes rappelés au point précédent, le présent litige relève de la compétence du juge judiciaire. Par voie de conséquence, c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux n'a pas décliné la compétence de la juridiction administrative pour connaître de ce litige. Dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement en date du 16 juin 2016 dans cette mesure, d'évoquer sur ce point la demande de la société Le Compas et de la rejeter comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître en tant qu'elle porte sur le paiement de ces factures.
Sur les conclusions dirigées contre Bordeaux métropole :
9. La société Le Compas ne saurait, en tout état de cause, rechercher la responsabilité de Bordeaux métropole, dès lors qu'elle n'établit avoir subi aucun autre préjudice imputable à Bordeaux métropole en dehors de ceux déjà indemnisés à hauteur de 200 000 euros dans le cadre du protocole transactionnel cité au point 3, conclu avec la communauté urbaine de Bordeaux, devenue Bordeaux métropole, à la suite des dysfonctionnements du pont tournant chevauchant l'écluse du 1er au 9 juillet 2013 et du 20 au 22 août 2013.
Sur la responsabilité de GPMB :
10. Ainsi qu'il a été indiqué au point 1, la société requérante est titulaire d'une convention temporaire d'occupation du domaine public portuaire constitutive de droits réels sur une durée de vingt ans à compter du 1er juin 2000 pour un terrain de 327 m2 situé au bassin à flot n° 2, et était titulaire de deux autorisations d'occupation temporaires non constitutives de droits réels, en date du 29 août 2013, pour un local de 792 m² situé hangar 27 et pour un terrain d'une surface de 635 m² situé au bassin à flot n° 2.
11. D'une part, en vertu de l'article II.1.3.4. du règlement arrêté par le directeur du Port relatif aux conditions d'occupation des terre-pleins dans les zones portuaires, le bénéficiaire de l'autorisation d'occupation temporaire " devra supporter, sans pouvoir formuler de réclamations, et sans que cela puisse entraîner une réduction des redevances d'occupation, la gêne résultant des réparations ou modifications effectuées par le Port [...] ". D'autre part, aucune clause de la convention temporaire d'occupation du domaine public portuaire du 7 juin 2000, ni à fortiori des deux autorisations d'occupation temporaires non constitutives de droits réels, en date du 29 août 2013, ne prévoit que le gestionnaire du domaine s'engage, en cas de travaux indispensables, à trouver une solution de substitution afin de permettre au preneur de continuer à exploiter ses équipements. Au demeurant, le GPMB a délivré le 30 octobre 2013 à la société Le Compas une autorisation d'occupation temporaire du domaine public non constitutive de droits réels, à titre gratuit, d'un terre-plein d'une superficie de 1 060 m2 situé dans la zone portuaire de Brazza, pour une durée d'un an à compter du 20 septembre 2013 afin qu'elle puisse y exercer son activité de maintenance, de service et de gardiennage de bateaux de plaisance, sans être impactée par les interventions de maintenance sur les écluses du port et a convenu en septembre 2013 avec cette société l'étalement des retards de paiement de redevances. Dans ces conditions, et dès lors que la société Le Compas ne soutient pas que le GPMB aurait commis une faute lourde, sa responsabilité contractuelle ne saurait être engagée.
12. En deuxième lieu, la société requérante se prévaut de sa qualité d'occupant du domaine public en invoquant un préjudice anormal et spécial directement imputable aux travaux sur le port. Toutefois, les occupants du domaine public ne sauraient être indemnisés, en cas de préjudice anormal et spécial, des dommages subis en raison de travaux sur le domaine public que si ces travaux n'ont pas été réalisés dans des conditions normales, dans l'intérêt du domaine public et conformément à sa destination.
13. Il résulte de l'instruction que les travaux réalisés par le GPMB ont notamment consisté en des travaux de maintenance sur l'écluse principale et des travaux de dragage et de réparation de l'écluse afin de permettre le libre accès des navires. Ces travaux ont été réalisés sur une période de six mois à compter du 1er janvier 2013, puis de nouveau à compter du mois de décembre 2013 dans l'intérêt de la dépendance occupée par la requérante et ont constitué une opération d'aménagement conforme à sa destination.
14. L'opération consistant, après assèchement, à désenvaser l'ouvrage et à le restaurer, notamment les portes métalliques, est complexe et doit être renouvelée tous les quinze ans. Afin d'éviter les perturbations liées au trafic de bateaux, les travaux ont été réalisés pendant les périodes hivernales pour la navigation. Il n'est pas sérieusement contesté que l'écluse a été ouverte pour laisser le passage aux bateaux durant l'été 2013, ce dont la société requérante a été informée par messagerie électronique alors même que les ouvertures ont pu correspondre à des jours fériés ou à des horaires nocturnes, compte tenu des coefficients de marée et afin de ne pas perturber la circulation automobile sur les quais de Bordeaux. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que les travaux n'auraient pas été effectués dans des conditions normales eu égard à leur nature, à leur importance et à leur durée.
15. En tout état de cause, il résulte également de l'instruction que le chiffre d'affaires annuel de la société a été en augmentation constante entre les années 2011 et 2013 et que les résultats professionnels pour l'année 2013, au cours de laquelle ont débuté les travaux litigieux, ont été les meilleurs sur la période considérée. Si la société invoque une baisse de chiffre d'affaires 2013-2014, cette baisse ne révèle pas l'existence d'un préjudice anormal en lien avec les travaux de maintenance du port seul susceptible d'ouvrir un droit à réparation au profit de la requérante.
16. En troisième lieu, la société requérante soutient que le GMPB a commis une faute en s'abstenant de communiquer en temps utile les informations relatives au fonctionnement des écluses ainsi que dans la mise en oeuvre tardive des moyens nécessaires au redéploiement de 1'entreprise en rive droite. Il résulte toutefois du règlement d'exploitation visé au point 11 que le bénéficiaire d'une autorisation d'occupation du domaine public doit supporter, sans pouvoir formuler de réclamation et sans que cela ne puisse entraîner une réduction de la redevance d'occupation, la gêne résultant des réparations ou modifications effectuées sur la port. La société requérante a été informée des difficultés qu'allait engendrer les travaux et ainsi qu'il a été dit au point 15, des ouvertures/fermetures de l'écluse par messagerie électronique. Il résulte, d'autre part, de ce qui a été dit au point 12, que le GPMB a mis à sa disposition un terre-plein dans la zone portuaire de Braza à compter du 20 septembre 2013 afin de lui permettre de continuer à exercer son activité en dehors des bassins à flot, en particulier lors de la nouvelle période de fermeture des accès en raison de travaux de dragage. Dans ces conditions, le GPMB n'a pas commis à l'égard de la société requérante une faute lourde susceptible d'engager sa responsabilité.
17. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, la société Le Compas n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté le surplus de sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du GPMB et de Bordeaux métropole, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que la société Le Compas demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du GPMB et de Bordeaux métropole présentées sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 juin 2016 est annulé en tant qu'il statue sur la demande de la société Le Compas tendant au paiement de factures d'un montant de 49 601,47 euros.
Article 2 : Les conclusions de la société Le Compas tendant au paiement de factures d'un montant de 49 601,47 euros sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel est rejeté.
Article 4 : Les conclusions du grand port maritime de Bordeaux et de Bordeaux métropole présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Le Compas, au grand port maritime de Bordeaux et à Bordeaux Métropole.
Délibéré après l'audience du 4 décembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 18 décembre 2018.
Le rapporteur,
Florence MadelaigueLe président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX02580