Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 4 août 2016, le 12 avril 2017 et le 10 mai 2017, la société Le Chant des Fleurs, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 juin 2016 du tribunal administratif de la Guadeloupe ;
2°) de faire droit à sa demande de restitution d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 17 000 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son activité de location, en cours de préparation au cours de la période vérifiée, relève des dispositions du 4° b de l'article 261 D du code général des impôts ; les logements meublés qu'elle détient et exploite sont régulièrement occupés par des clients qui bénéficient de manière habituelle de trois des quatre prestations dites para-hôtelières prévues par cet article (accueil, ménage et fourniture du linge) ;
- le tribunal administratif a commis une erreur d'appréciation ; elle a déclaré, dès sa création, son intention de réaliser une activité para-hôtelière ouvrant droit à déduction ; la déclaration de commencer des opérations économiques est étayée par des éléments objectifs ;
- lors de la vérification l'activité économique n'avait pas encore débuté ;
- l'activité préalable à l'activité de location para-hôtelière constitue une activité préparatoire ouvrant droit, selon le principe de neutralité de la TVA issu de la directive 2006/112/CE, au remboursement de la TVA supportée en amont, et ce malgré l'absence de réalisation d'opérations soumises à la TVA.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête de la société Le Chant des Fleurs.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue,
- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Le Chant des Fleurs dont M. B...est le gérant, exerce une activité de location de biens immobiliers à Deshaies (Guadeloupe) et à Ornex (Ain). A l'issue d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 4 octobre 2010 au 30 juin 2013, par proposition de rectification du 26 mars 2014, le service a rejeté sa demande de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 17 000 euros, au motif que son activité de location ne remplissait pas les critères d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée prévus par le b du 4°) de l'article 261 D du code général des impôts. La société Le Chant des Fleurs relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande de remboursement dudit crédit de taxe sur la valeur ajoutée.
2. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 271 du même code : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération ". Aux termes de l'article 261 D dudit code : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 4° Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d'habitation. Toutefois, l'exonération ne s'applique pas : (...) b. Aux prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l'hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle. ". Pour apprécier si une activité de location saisonnière de logements meublés entre ou non dans le champ de cette exonération, il convient de rechercher si, eu égard aux caractéristiques des prestations proposées dans le cadre d'une activité de location de logements meublés, celle-ci se trouve ou non en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières.
3. Les entreprises nouvellement constituées sont réputées commencer leur activité au regard de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'elles manifestent, par une déclaration d'existence et par l'acquisition de biens et de services nécessaires à l'exploitation, l'intention d'effectuer des opérations situées dans le champ d'application de cet impôt, même si aucune vente ou prestation n'a encore été effectuée à la date de dépôt de la déclaration d'existence. Il incombe, toutefois, à celui qui demande la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée d'établir que les conditions pour en bénéficier sont remplies, l'administration fiscale pouvant exiger que l'intention déclarée de commencer des activités économiques donnant lieu à des opérations imposables soit confirmée par des éléments objectifs.
4. La société Le Chant des Fleurs fait valoir qu'elle a été constituée en vue d'exercer une activité entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qu'elle soutient, l'objet social que la requérante a déclaré lors de son inscription au registre du commerce et des sociétés le 21 décembre 2010 " Détention en propriété ou jouissance et location ou sous location de tous biens immobiliers avec activités de construction aménagement exploitation hôtelière " ne caractérise pas par lui-même le projet de fournir des prestations susceptibles d'entrer en concurrence avec celles des entreprises hôtelières. D'ailleurs, l'article 2 des statuts de la société indique qu'elle a pour objet " la détention en propriété ou jouissance et location ou sous location de tous biens immobiliers (...) avec la possibilité d'effectuer sur ces biens toute (...) exploitation hôtelière ou non ". En outre, ni la publicité commerciale qui se limite à un panneau publicitaire installé au mois de février 2012, sur le site, qui ne fait aucune référence à la fourniture de prestations para-hôtelières, ni le contrat de partenariat conclu avec la société Hamac, établi en juillet 2013, soit plusieurs années après la plupart des factures déduites et après la fin de la période d'imposition litigieuse, et prenant effet au 31 mars 2015 pour la maison de quatre personnes et au 30 septembre 2015 pour la maison de six personnes ne suffisent à manifester la réalité de l'intention initiale de la société Le Chant des Fleurs de se livrer à cette activité. Dans ces conditions, la société Le Chant des Fleurs ne peut être regardée comme ayant eu l'intention de se livrer effectivement à une activité saisonnière de location de logements meublés répondant aux critères définis par les dispositions précités du b) du 4° de l'article 261 D du code général des impôts. Il s'ensuit que c'est à bon droit que l'administration a considéré qu'elle ne remplissait pas les conditions lui permettant de déduire la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux investissements réalisés, en l'absence d'exercice, au cours de la même période, d'une activité imposable à cette taxe.
5. Il résulte de ce qui précède que la société Le Chant des Fleurs n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande. L'ensemble de ses conclusions, en ce y compris les conclusions formées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejeté.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Le Chant des Fleurs est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Le Chant des Fleurs et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 6 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 20 novembre 2018.
Le rapporteur,
Florence MadelaigueLe président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX02710