Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 mai 2016, M.B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 24 septembre 2015 ;
2°) d'enjoindre à la commune de Saint-Germain-de-Longue-Chaume d'examiner sa demande de permis de construire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le tribunal ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de ce que le refus de permis ne comporte pas les noms et prénoms de son auteur ;
En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :
- l'arrêté contesté ne comporte pas la mention des noms et prénoms de son auteur et est revêtu d'une signature illisible en méconnaissance de la règle de forme instituée par l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- le refus litigieux n'est pas motivé comme l'exige l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ;
En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :
- le refus de permis en litige ne pouvait légalement être fondé sur l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme dès lors qu'aucun élément n'établit le caractère démesuré de la dépense qu'implique pour la commune les travaux de raccordement au réseau électrique du projet décrit dans la demande de permis de construire ; ces travaux ne peuvent être importants dès lors qu'il existe des constructions raccordées au réseau électrique à moins de dix mètres du projet et qu'un poteau électrique est situé à quarante mètres de celui-ci ; enfin, la grange que le projet prévoit de transformer est en partie alimentée en électricité ; ainsi, la réalisation du projet implique de simples travaux de raccordement et non d'extension du réseau.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2017, le ministre de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le jugement n'est pas entaché d'une omission à statuer dès lors que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 n'avait pas été soulevé devant le tribunal.
En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :
- l'arrêté contesté comporte la mention lisible des noms et prénoms de son auteur conformément à l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- le refus litigieux est motivé conformément à l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :
- l'article R. 111-13 du code de l'urbanisme permet à l'autorité compétente de s'opposer à un permis de construire concernant un projet se trouvant à une distance importante des réseaux publics et générant par là-même des dépenses hors de proportion avec les ressources d'une commune ; c'est le cas en l'espèce dès lors que, contrairement à ce que soutient le requérant, le terrain d'assiette du projet n'est pas desservi par le réseau électrique, ce qui nécessite des travaux d'extension de ce réseau sur une longueur de 480 mètres ; ensuite, le coût des travaux est estimé à 32 757,40 euros HT dont 5 896,33 euros à la charge de la commune, laquelle compte 417 habitants en 2014 ; les dépenses d'équipement de cette commune étaient de 135 000 euros en 2013, soit 325 euros par habitant ; dès lors, si l'on rapporte les dépenses induites par la réalisation du projet au résultat comptable de la commune en 2013, elles représentent près de 2 % du résultat comptable ; il apparaît ainsi que le coût des investissements rendus nécessaires pour l'extension du réseau électrique pour la desserte d'une voie unique s'avère hors de proportion avec les ressources actuelles de la commune.
Par ordonnance du 2 novembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 4 décembre 2017 à 12h00.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 décembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Faïck,
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant M.B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B...a acquis, selon acte notarié du 17 décembre 2009, la parcelle cadastrée section C n°504, située sur le territoire de la commune de Saint-Germain-de-Longue-Chaume, sur la foi d'un certificat d'urbanisme délivré le 8 août 2008 déclarant réalisable un projet de transformation en bâtiment d'habitation d'une grange située sur ladite parcelle. Dans ce but, M. B... a déposé en mairie, le 29 janvier 2010, une demande de permis de construire que le maire de Saint-Germain-de-Longue-Chaume a rejetée par une décision du 26 mars 2010. Par un jugement rendu le 20 décembre 2012, le tribunal administratif de Poitiers a annulé ce refus et a enjoint au maire d'instruire à nouveau la demande de M.B.... Le maire a rejeté une nouvelle fois la demande de permis par une décision du 19 février 2013. M. B...relève appel du jugement rendu le 24 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation du refus de permis de construire opposé le 19 février 2013.
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 111-13 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé si, par sa situation ou son importance, il impose (...) la réalisation par la commune d'équipements publics nouveaux hors de proportion avec ses ressources actuelles (...) ".
3. Pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de tenir compte du seul coût des travaux d'équipement qu'entraînera la construction projetée rapporté aux ressources dont dispose la commune pendant l'année au cours de laquelle le maire se prononce sur la demande de permis de construire.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'alimentation en électricité du bâtiment projeté par M. B...nécessite des travaux d'extension du réseau public existant sur une distance d'environ quatre-cent-cinquante mètres. Si le formulaire d'engagement et de suivi des travaux établi par le syndicat intercommunal d'énergie des Deux-Sèvres indique que le coût total de ces travaux s'élève à environ 32 757 euros, il est constant que la commune de Saint-Germain-de-Longue-Chaume ne doit y contribuer qu'à hauteur de 5 896 euros.
5. Ce montant de 5 896 euros ne représente que 4,36 % du total des dépenses d'équipement prévus au budget de la commune qui s'élèvent à 135 000 euros pour l'année 2013 au cours de laquelle a été opposé le refus de permis. De plus, la capacité d'autofinancement de la commune, laquelle permet de financer une partie des projets d'investissement, est, déduction faite du remboursement en capital des emprunts, de 292 000 euros pour 2013. Ainsi, le coût des travaux d'extension du réseau électrique à la charge de la commune ne représente que 2 % de cet indicateur financier. Il ne représente enfin que 4,15 % de l'encours total de la dette communale au 31 décembre 2013, soit 142 000 euros.
6. Dans ces conditions, et sans qu'importe le fait que la commune de Saint-Germain-de-Longue-Chaume comptait quatre-cent-dix-sept habitants seulement en 2013, le montant de sa contribution aux travaux d'extension du réseau d'électricité qu'implique la réalisation du projet de M. B...ne peut être regardé comme excédant ses ressources actuelles. Par suite, en fondant le refus de permis contesté sur l'article R. 111-13 du code de l'urbanisme, le maire de Saint-Germain-de-Longue-Chaume a commis une erreur d'appréciation.
7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen de l'appelant n'est susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté du 19 février 2013.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Dès lors, ce jugement doit être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner sa régularité, ainsi que le refus de permis de construire délivré le 19 février 2013.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. En application des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, il y a lieu de prescrire au maire de Saint-Germain-de-Longue-Chaume de se prononcer à nouveau sur la demande de permis de construire de M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. M. B...ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et ne faisant état d'aucune dépense qui serait restée à sa charge, ses conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme au titre des frais exposés pour l'instance et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°1300776 du tribunal administratif de Poitiers du 24 septembre 2015 et le refus de permis de construire du 19 février 2013 sont annulés.
Article 2 : Il est prescrit au maire de Saint-Germain-de-Longue-Chaume de se prononcer à nouveau sur la demande de permis de construire de M. B...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...B..., au ministre de la cohésion des territoires, à Me C...et à la commune de Saint-Germain-de-Longue-Chaume.
Délibéré après l'audience du 3 mai 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 mai 2018.
Le rapporteur,
Frédéric Faïck
Le président,
Elisabet JayatLe greffier,
Evelyne Gay-Boissières La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX01663