Procédure devant la cour :
Par requête, enregistrée le 23 juin 2021, M. D... et Mme C..., représentés par Me Lassort, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 4 mars 2021 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler les arrêtés de la préfète de l'Ariège du 24 décembre 2020 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Ariège de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour et de délivrer à Mme C... une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le tribunal a omis d'examiner le moyen tiré de l'erreur de droit entachant les obligations de quitter le territoire français en ce que la préfète s'est estimée liée par le rejet des demandes d'asile ;
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
- elles ont été prises par une autorité incompétente ;
- elles sont insuffisamment motivées ;
- elles sont entachées d'un défaut d'examen ;
- elles sont entachées d'un vice de procédure dès lors qu'elles ont méconnu leur droit d'être entendus ;
- elles sont entachées d'un vice de procédure et méconnaissent les dispositions de l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devait être saisi par la préfète de l'Ariège ;
- la décision concernant M. D... est entachée d'erreurs de fait non seulement quant aux attaches familiales dans son pays d'origine mais aussi relativement à la date à laquelle il a fui son pays ;
- elles sont entachées d'une erreur de droit dans la mesure où la préfète s'est estimée liée par le rejet de leurs demandes d'asile ;
- la décision concernant M. D... méconnait les dispositions du 10° de
l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que son état de santé nécessite des soins psychiatriques ; en l'absence de tels soins, s'en suivront des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; il ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine qui est le lieu où se situe l'origine de ses troubles ;
- la décision concernant Mme C... devra par voie de conséquence être annulée sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de renvoi :
- elles ont été prises par une autorité incompétente ;
- elles sont dépourvues de base légale ;
- la décision concernant M. D... méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de son état de santé et des persécutions qu'il encourt dans son pays d'origine ; la décision concernant Mme C... est contraire aux stipulations conventionnelles précitées ;
- la décision concernant Mme C... devra par conséquent être annulée sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-4, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français :
- elles ont été prises par une autorité incompétente ;
- elles sont dépourvues de base légale ;
- elles méconnaissent les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire enregistré le 7 décembre 2021, la préfète de l'Ariège conclut au rejet de la requête de M. D... et Mme C....
Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par décisions du 6 mai 2021, M. D... et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Karine Butéri a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... et Mme C..., ressortissants géorgiens nés respectivement
le 29 avril 1977 et le 26 mars 1987 à Gulripsci (URSS), déclarent être entrés sur le territoire français le 12 mai 2017. Par décisions du 30 novembre 2018 et du 28 janvier 2019, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté les demandes d'asile de M. D... et Mme C.... Ces décisions ont été confirmées par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 8 décembre 2020. Par deux arrêtés du 24 décembre 2020, la préfète de l'Ariège leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. D... et Mme C... relèvent appel du jugement du 4 mars 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes d'annulation des arrêtés du 24 décembre 2020.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse n'a pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'erreur de droit dont seraient entachées les décisions portant obligation de quitter le territoire français en ce que la préfète de l'Ariège s'est crue, à tort, en situation de compétence liée à la suite des rejets des demandes d'asile présentées par les intéressés. Par suite, M. D... et Mme C... sont fondés à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer et doit, pour ce motif, être annulé.
3. Il y a lieu pour la cour de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français et, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions présentées par les intéressés.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, par un arrêté du 14 décembre 2020 publié au recueil des actes administratifs spécial du même jour, la préfète de l'Ariège a donné délégation de signature à
M. Stéphane Donnot, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous actes, arrêtés et décisions relevant des attributions de l'État dans le département, à l'exception des arrêtés de conflit. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées manque en fait et doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ".
6. Les décisions en litige visent la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et notamment ses articles 3 et 8, ainsi que les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquels elles sont fondées. En outre, elles relatent les conditions d'entrée et de séjour de M. D... et de Mme C... en France et précisent aussi les circonstances de fait propres à leur situation, notamment leur parcours de demandeurs d'asile et les principaux aspects de leur vie privée et familiale. Ces décisions indiquent enfin que M. D... et Mme C... n'établissent pas être exposés à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, la préfète, qui n'était pas tenue de mentionner de manière exhaustive tous les éléments tenant à la situation personnelle de M. D... et de Mme C..., a satisfait à l'exigence de motivation prévue à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions attaquées doit être écarté.
7. En troisième lieu, les motifs qui fondent les décisions contestées révèlent que la préfète de l'Ariège a procédé à un examen circonstancié de la situation personnelle de M. D... et de Mme C....
8. En quatrième lieu, il ne ressort ni de la motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français ni des autres pièces du dossier que la préfète de l'Ariège se serait crue en situation de compétence liée compte tenu du rejet des demandes d'asile des intéressés.
9. En cinquième lieu, le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise après que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du défaut de reconnaissance de cette qualité ou de ce bénéfice. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu à l'occasion de l'examen de sa demande de reconnaissance de sa qualité de réfugié. Lorsqu'il sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection internationale, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, l'intéressé ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français assortie ou non d'un délai de départ volontaire.
10. Il appartenait à M. D... et Mme C..., tant au cours de l'instruction de leurs demandes d'asile qu'après les décisions du 30 novembre 2018 et du 28 janvier 2019 par lesquelles l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté ces demandes de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... et
Mme C... auraient sollicité en vain un entretien avec les services de la préfecture de l'Ariège au cours de l'instruction de leurs demandes d'asile, ni qu'ils auraient été empêchés de porter spontanément à la connaissance de la préfète des éléments de nature à permettre à l'administration d'apprécier leur droit au séjour au regard d'autres fondements que celui de l'asile. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que leur droit d'être entendus a été méconnu doit être écarté.
11. En sixième lieu, le moyen tiré par les requérants de ce qu'ils n'ont pas pu bénéficier de l'assistance d'un interprète au moment de la notification des décisions en litige est inopérant.
12. En septième lieu, l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur dispose : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 511-1 de ce code : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté dans les mêmes conditions que celles qui sont prévues aux deux premiers alinéas de l'article R. 313-22 ". Or, selon l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
13. Lorsqu'il envisage de prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger, le préfet n'est tenu, en application des dispositions de l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de recueillir préalablement l'avis du collège de médecins de l'OFII que s'il dispose d'éléments d'information suffisamment précis permettant d'établir que l'intéressé présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une telle mesure d'éloignement.
14. Si M. D... et Mme C... soutiennent que la préfète de l'Ariège ne pouvait se prononcer sans avoir préalablement saisi le collège de médecins de l'OFII conformément à la procédure prévue à l'article R. 511-1 du code précité, ils n'établissent pas avoir porté à la connaissance de l'autorité préfectorale les éléments d'information lui permettant d'estimer que son état de santé était susceptible de faire entrer M. D... dans la catégorie des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. M. D... soutient qu'il est atteint de troubles psychologiques, de céphalées violentes et de précordialgie. Toutefois, bien que l'unique certificat médical du 23 février 2021, au demeurant postérieur aux décisions contestées, mentionne les pathologies dont souffre M. D... et le traitement suivi, il n'indique pas si le défaut de prise en charge médicale entraînerait pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Ainsi, les appelants n'établissent pas que l'absence de prise en charge médicale de M. D... pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré du défaut de saisine du collège de médecins de l'OFII ne peut qu'être écarté. Pour les mêmes raisons, le moyen tiré de la méconnaissance du
10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit également être écarté.
15. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 7° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française (...) ". A supposer que Mme C... ait entendu soulever le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, elle ne saurait utilement invoquer la protection qu'elles prévoient dans la mesure où elle n'est pas mariée à un ressortissant français depuis au moins trois ans. Ce moyen doit ainsi être écarté comme inopérant.
16. En neuvième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
17. Il ressort des pièces du dossier que M. D... et Mme C... sont entrés récemment en France, que leur durée de présence sur le territoire français ne se justifie que par l'instruction de leurs demandes d'asile, lesquelles ont été définitivement rejetées par la CNDA, et qu'ils n'établissent pas être totalement dépourvus d'attaches familiales en Géorgie. S'ils sont entrés sur le territoire français accompagnés du fils de M. D... issu d'un premier lit et que leurs trois autres enfants sont nés en France le 27 septembre 2018 et le 14 février 2020, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se [0]reconstitue en Géorgie, alors au demeurant que M. D... et Mme C..., de même nationalité, font l'objet d'une mesure d'éloignement du même jour. Dans ces conditions, la préfète de l'Ariège n'a pas porté au droit de M. D... et Mme C... au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par les mesures en litige. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, de même que le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation de leur situation.
18. Par ailleurs, la circonstance que la préfète de l'Ariège a à tort mentionné, d'une part, que la mère de M. D... réside en Géorgie alors qu'il soutient qu'elle est décédée, et, d'autre part, que M. D... a vécu dans son pays jusqu'à l'âge de 38 ans au lieu de 32 ans, est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse prise à son encontre dès lors que la préfète aurait pris la même décision si elle n'avait pas commis ces erreurs matérielles.
19. En dixième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
20. Les décisions contenues dans l'arrêté en litige n'ont pas pour objet ou pour effet de séparer les quatre enfants de M. D... et Mme C... de leurs parents. Ainsi qu'il a été dit au point 17, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Géorgie et que les enfants y poursuivent ou y entament leur scolarité. Par suite, la préfète de l'Ariège n'a pas méconnu les stipulations précitées.
En ce qui concerne les décisions portant fixation du pays de renvoi :
21. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées doit être écarté.
22. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale des décisions fixant le pays de renvoi en raison de l'illégalité des obligations de quitter le territoire français doit être écarté.
23. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dispose que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
24. Si M. D... et Mme C... soutiennent qu'ils risqueraient, en cas de retour dans leur pays d'origine, de subir des traitements inhumains et dégradants du fait de l'engagement politique de M. D..., ils n'établissent pas, par les pièces produites, l'existence de risques actuels, réels, sérieux et personnels auxquels ils seraient exposés en cas de retour en Géorgie. Au surplus, ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, les demandes d'asile de M. D... et Mme C... ont été rejetées par des décisions de l'OFPRA et de la CNDA. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte-tenu de ce qui a été dit au point 14, que la décision fixant le pays de renvoi prise à l'encontre de M. D... exposerait ce dernier à des risques de traitements inhumains ou dégradants en raison de son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées ne peut qu'être écarté.
25. En quatrième lieu, à supposer que Mme C... ait entendu soulever le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen doit être écarté comme inopérant.
En ce qui concerne les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français :
26. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées doit être écarté.
27. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale des décisions portant interdiction de retour sur le territoire français en raison de l'illégalité des obligations de quitter le territoire français doit être écarté.
28. En troisième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, alors applicable : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
29. Il ressort des pièces du dossier que les requérants ne vivaient en France que depuis trois ans à la date des décisions contestées. Ils se prévalent de la présence en France de leurs quatre enfants, sans invoquer d'autres attaches sur le territoire français. Dans ces conditions, et alors même qu'ils n'ont pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et que leur présence sur le territoire français ne constituerait pas une menace pour l'ordre public, la préfète de l'Ariège n'a pas méconnu les dispositions précitées en assortissant les mesures d'éloignement prises d'interdictions de retour d'une durée d'un an sur le territoire français.
30. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. D... et de Mme C... tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français doivent être rejetées. Par ailleurs, ils ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes dirigées contre les décisions fixant le pays de renvoi et portant interdiction de retour sur le territoire français. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2100405, 2100431 du 4 mars 2021 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse est annulé en tant qu'il statue sur les décisions de la préfète de l'Ariège portant obligation de quitter le territoire français.
Article 2 : Les demandes présentées par M. D... et Mme C... devant le tribunal administratif de Toulouse tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie sera adressée au préfet de l'Ariège.
Délibéré après l'audience du 28 février 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Karine Butéri, présidente,
M. Olivier Cotte, premier conseiller,
Mme Caroline Gaillard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mars 2022.
L'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau,
Olivier Cotte
La présidente-rapporteure,
Karine Butéri
L'assesseure la plus ancienne
dans l'ordre du tableau,
Sylvie Cherrier
La présidente-rapporteure,
Karine Butéri
La greffière,
Catherine Jussy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX02626