Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er février et 4 juillet 2019, M. C..., représenté par Me Bachet, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté litigieux ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, et dans l'hypothèse où l'aide juridictionnelle lui serait refusée, condamner l'État à verser à M. C... la somme de 1 500 sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions portant refus d'admission au séjour et obligation de quitter le territoire français sont entachées d'un défaut de motivation en fait, en l'absence d'un énoncé exhaustif des éléments relatifs à sa situation personnelle et familiale en France et en Algérie ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;
- la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire n'est pas motivée en fait ;
- la décision fixant le pays de renvoi s'avère affectée d'un défaut de motivation en fait, car elle est parfaitement stéréotypée et ne fait aucun état de la situation du requérant en cas de retour dans son pays d'origine ;
- le refus de titre méconnaît l'article 6-1 de l'accord franco-algérien, dès lors qu'il vit en France depuis plus de dix ans ;
- il méconnaît également les articles 6-5 de cet accord et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il est présent en France depuis 25 ans et que l'une de ses soeurs est titulaire d'un certificat de résidence valable 10 ans ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il réside en France depuis plus de dix ans ;
- le refus de délai de départ volontaire est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant interdiction de retour est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît le 7ème alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête et fait valoir qu'elle est irrecevable et qu'aucun de ses moyens n'est fondé.
Par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 mars 2019, M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 13 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 août 2018 du préfet de la Haute-Garonne portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai en fixant le pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
2. M. C... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions qu'il conteste, contenues dans l'arrêté préfectoral du 3 août 2018. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ". Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".
4. D'une part, M. C... soutient qu'il réside en France depuis plus de dix ans et doit bénéficier de plein droit d'un titre de séjour. Toutefois, s'il produit des quittances de loyer du mois d'août 2005 au mois de septembre 2011, les pièces versées au titre des années postérieures n'établissent pas sa présence en France. Ainsi, il ne produit pour l'année 2012 qu'une attestation de l'association médecins du monde du 10 mai 2013, attestant de sa présence à une consultation les 16 et 19 janvier 2012, 22 février 2012 et les 1er, 11 et 29 octobre 2012, un devis de l'alliance française Marseille-Provence dressé le 27 janvier 2012 pour des cours collectifs, et une " attestation d'élection de domicile " CERFA du 8 mars 2012, dans laquelle il est précisé que cette attestation ne vaut que pour recevoir du courrier. De même, les pièces produites pour les années 2013 et 2014 ne corroborent pas les allégations du requérant selon lesquelles il résidait en France durant ces années. Dès lors, en estimant qu'il ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien.
5. D'autre part, M. C... ne justifiant pas résider en France habituellement depuis plus de dix ans, le préfet n'était pas tenu, avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour, de saisir la commission du titre de séjour.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
7. M. C... soutient qu'il réside en France depuis 25 ans où vit également l'une de ses soeurs, titulaire d'un titre de séjour valable dix ans. Cependant, comme il a été dit au point 5 du présent arrêt, l'appelant ne justifie pas d'une résidence en France depuis l'année 2011. Il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans enfant et ne fait état d'aucune intégration sur le sol français. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré par l'intéressé de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6 de l'accord franco-algérien, doit être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de la décision de refus de titre doit être écarté.
9. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 5 et 8 du présent arrêt, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la décision de refus de délai de départ volontaire :
10. M. C... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision de refus de délai de départ volontaire. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
Sur la décision portant interdiction de retour :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
12. En deuxième lieu, M. C... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont serait entachée la décision litigieuse. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
13. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8 du présent arrêt, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la décision fixant le pays de destination :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
15. En second lieu, si M. C... soutient qu'il encourt en cas de retour en Algérie le risque d'être exposé à des traitements inhumains et dégradants prohibés par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'apporte pas la moindre précision au soutien de cette allégation.
16. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Haute-Garonne, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme F..., présidente-assesseure,
Mme B... D..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 14 novembre 2019.
La rapporteure,
F...Le président
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Camille Péan
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 19BX00408 2