Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 août 2018 et 18 octobre 2019, la SARL Karulara Food Catering, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 26 juin 2018 en tant qu'il n'a pas fait intégralement droit à sa demande ;
2°) de prononcer des décharges de 5 551 euros au titre de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie au titre de l'année 2014 et de 5 632 euros au titre de l'année 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SARL Karulara Food Catering soutient que :
- elle se réserve le droit de contester la surface pondérée imposable de 393 m² retenue par le tribunal administratif au lieu des 220 m² déclarés, dès lors que son représentant légal n'était pas présent lors de la visite sur place du géomètre du cadastre ;
- il y a lieu de retenir comme terme de comparaison le local-type n° 39 du procès-verbal de révision foncière de la commune des Abymes, qui correspond également à un restaurant situé à Anse-Bertrand, dont la surface pondérée est de 274 m² et le tarif de 9,75 euros le mètre carré, avec application d'une majoration de 15 % de ce tarif pour tenir compte de la différence de situation, soit 11,21 euros le mètre carré ;
- à titre subsidiaire, le tribunal administratif a retenu le local-type n° 4 du procès-verbal de révision foncière de la commune de Gosier, situé au lieu-dit Montauban, dont la surface pondérée est de 133 m² et le tarif de 27,44 euros/m², alors que le procès-verbal communiqué par l'administration n'est pas lisible et ne contient pas les informations permettant de vérifier la validité du local-type retenu ; ainsi, la colonne " superficie pondérée " n'est pas renseignée, ni la date de construction du local-type, ce qui l'empêche de vérifier si le local était construit au 1er janvier 1975 ;
- si ce local-type était retenu, il y aurait lieu d'appliquer un abattement de 50 % sur le tarif de 27,44 euros le mètre carré, soit un tarif de 13,72 euros du mètre carré ;
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 18 février et 28 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 3 octobre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 4 novembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de Mme B... C....
Considérant ce qui suit :
1. La société à responsabilité limitée (SARL) Karulara Food Catering a été assujettie à la cotisation foncière des entreprises et à la taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie au titre des années 2014 et 2015, pour des montants respectifs de 16 805 euros et 17 065 euros, pour l'établissement affecté à une activité de restauration rapide qu'elle exploite rue de Provence à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe). Par un jugement du 26 juin 2018, le tribunal administratif a prononcé un dégrèvement de 7 411 euros au titre de l'année 2014 et de 7 523 euros au titre de l'année 2015 et a rejeté le surplus des demandes de la SARL Karulara Food Catering. Elle relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes.
2. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : (...) 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° À défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ". Aux termes de l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts : " I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types (...) ". Aux termes de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts, alors applicable : " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ".
3. Le tribunal administratif a déterminé la valeur locative du local que la SARL Karulara Food Catering exploite rue de Provence à Pointe-à-Pitre selon la méthode par comparaison prévue aux 2° de l'article 1498 du code général des impôts, en retenant la surface pondérée de 393 m², et en appliquant le tarif de 27,44 euros le mètre carré du local-type n° 4 du procès-verbal de la commune du Gosier, dans la même unité urbaine, consistant en un restaurant en bon état d'entretien, au lieu-dit Montauban.
Sur la surface pondérée de l'immeuble :
4. Il résulte de l'instruction que le 22 mars 2017, postérieurement au rejet le 7 février 2017 de la réclamation préalable de la SARL Karulara Food Catering, le géomètre du cadastre a effectué une visite sur place, à l'issue de laquelle la surface pondérée du local litigieux a été établie à 393 m². En se bornant à faire valoir que son responsable légal n'était pas présent lors de cette visite, alors d'ailleurs qu'elle ne conteste pas qu'il avait été dûment avisé de celle-ci, la SARL Karulara Food Catering ne conteste pas utilement la surface pondérée ainsi retenue par les premiers juges.
Sur le local-type n° 39 du procès-verbal de la commune des Abymes :
5. La SARL Karulara Food Catering soutient qu'il y a lieu de retenir le local-type n° 39 du procès-verbal de la commune des Abymes, qui est également un restaurant et comporte une surface pondérée de 274 m², en appliquant le tarif de 9,75 euros le mètre carré, avec une majoration de 15 % de ce tarif pour tenir compte de la différence de situation, soit 11,21 euros le mètre carré.
6. Il résulte toutefois de l'instruction que ce local, bien qu'étant d'une superficie comparable à celle du local à évaluer, est d'une conception plus ancienne et en très mauvais état. Surtout, il est implanté dans une commune rurale, Anse-Bertrand, située sur la pointe nord de la Guadeloupe, alors que le local à évaluer, affecté à la restauration rapide, est situé à Pointe-à-Pitre, au coeur de la plus grande aire urbaine guadeloupéenne, dans une zone beaucoup plus prisée des touristes. Ces différences, relatives à l'état d'entretien du bien et à sa situation, ne sont pas susceptibles d'être compensées par l'application du coefficient d'ajustement prévu par l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts cité au point 2. Par suite, la SARL Karulara Food Catering n'est pas fondée à soutenir que ce local serait un élément de comparaison plus adapté que celui retenu par les premiers juges.
Sur le local-type n° 4 du procès-verbal de la commune du Gosier :
7. D'une part, contrairement à ce que soutient la société requérante, le procès-verbal de la commune de Gosier mentionne la date de construction du local-type, en l'espèce 1971. De plus, si la surface pondérée du local-type n° 4 n'est pas renseignée sur le procès-verbal, elle se déduit aisément des autres mentions qu'il comporte, dès lors que la colonne 20 " valeur locative totale " mentionne le chiffre de 24 000, et la colonne 21 " valeur locative au mètre carré de surface pondéré " celui de 180, ce qui donne une surface pondérée égale à 133 m².
8. D'autre part, la SARL Karulara Food Catering soutient que dans l'hypothèse où ce local-type était retenu, il y aurait lieu d'appliquer un abattement de 50 % sur le tarif de 27,44 euros le mètre carré, soit un tarif de 13,72 euros du mètre carré, pour tenir compte des différences de superficie et de construction. Toutefois, elle n'apporte aucun élément relatif notamment à la situation de l'immeuble, la nature de la construction, son état d'entretien ou son aménagement qui justifierait l'application d'un tel abattement.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Karulara Food Catering n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Guadeloupe n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Karulara Food Catering est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Karulara Food Catering et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Une copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal Sud-Ouest.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme D..., présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 15 octobre 2020.
La rapporteure,
E... Le président
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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18BX03090