Par une requête, enregistrée le 26 mai 2020, et un mémoire, enregistré le 3 mars 2021 et non communiqué, M. A..., représenté par Me C... B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 janvier 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de l'admettre provisoirement au séjour et de réexaminer sas situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 31 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 31322, R. 31323 et R. 5111 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. M. A..., ressortissant albanais, né le 7 juillet 1985 et entré irrégulièrement sur le territoire français le 2 décembre 2015 selon ses déclarations, a déposé une demande d'asile le 24 octobre 2016, qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, puis une demande de titre de séjour.
2. M. A... relève appel du jugement du 20 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord du 17 janvier 2019 lui ayant refusé un titre de séjour, l'ayant obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et ayant fixé le pays de destination.
Sur la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
En ce qui concerne la procédure :
3. D'une part, l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 4 décembre 2018 a visé les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celles de l'arrêté ministériel du 27 décembre 2016 qui ont posé le principe d'une délibération collégiale.
4. D'autre part, cet avis comporte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émet l'avis suivant : " et est daté et signé par les trois médecins qui l'ont composé. Cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve du contraire, que l'appelant n'établit pas.
5. Enfin, lorsque les membres du collège national de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, après s'être connectés d'abord au réseau interne de l'Office avec un identifiant et un mot de passe personnels, ensuite à l'application " Thémis " avec un autre identifiant et un mot de passe, valident un avis émis par le collège, l'application génère un avis dans un format préservant la mise en forme du document source qui ne peut donc être modifié, puis cet avis est diffusé aux membres du collège pour une ultime validation. Compte tenu de ces garanties, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'avis émis par cette instance ne pouvait pas être regardé comme signé par ses membres.
En ce qui concerne l'examen particulier de la situation :
6. Il ressort de la motivation de l'arrêté que son auteur a procédé, pour toutes ses décisions, à un examen particulier de l'ensemble des éléments alors portés à sa connaissance
En ce qui concerne la vie privée et familiale :
7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. D'une part, M. A..., né en 1985, a vécu la majeure partie de sa vie en Albanie où résident ses parents et ceux de son épouse. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides qui a été confirmée par une décision du 21 septembre 2017 de la Cour nationale du droit d'asile.
9. D'autre part, si le requérant fait valoir qu'il séjourne en France depuis 2015 et se prévaut de la présence en France de son épouse, également de nationalité albanaise, et de leurs deux enfants qui y sont scolarisés, lui-même et son épouse sont dépourvus de toute attache familiale en France et n'établissent pas y avoir noué des relations privées stables et intenses. Alors que l'épouse de l'intéressé fait également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, aucune circonstance ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Albanie.
10. Alors même que M. A..., qui n'a aucun revenu, bénéficierait d'une promesse d'embauche en France, la décision en litige n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne l'état de santé :
11. Il ressort des pièces du dossier que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, dans son avis du 4 décembre 2018, que si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale, un défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. En outre, l'intéressé s'est borné à alléguer, sans l'établir, ne pas être en mesure de bénéficier d'un traitement approprié en Albanie.
En ce qui concerne l'intérêt supérieur des enfants :
12. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
13. Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
14. Si M. A... expose qu'il est entré en France avec son épouse et ses deux enfants alors âgés de 5 ans et de 10 mois et établit qu'ils y poursuivent une scolarité suivie et sérieuse, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer en Albanie ni que la scolarité des enfants ne pourrait pas se poursuivre dans le pays d'origine.
15. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
En ce qui concerne l'erreur manifeste d'appréciation :
16. Il ne ressort pas des pièces du dossier, dans les circonstances susrappelées, que la décision en litige serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
17. Il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas illégale.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
18. D'une part, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré de l'illégalité, par la voie de l'exception, de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.
19. D'autre part, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision en litige sur la situation personnelle de l'appelant doivent être écartés.
20. Il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale.
Sur la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours :
21. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de l'illégalité, par la voie de l'exception, de la décision portant refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
22. D'une part, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de l'illégalité, par la voie de l'exception, de la décision portant refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
23. D'autre part, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, repris par l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
24. D'une part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le retour de M. A... en Albanie n'est pas de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé.
25. D'autre part, l'appelant, dont la demande de protection a été rejetée par une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, n'a produit aucun élément de nature à établir que ses craintes en cas de retour dans son pays seraient fondées.
26. Dans ces conditions, le préfet du Nord, en désignant l'Albanie ou tout autre pays dans lequel l'intéressé serait admissible comme pays de renvoi, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
27. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 20 novembre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2019 du préfet du Nord.
28. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent aussi être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me C... B... pour M. D... A..., au ministre de l'intérieur et à Me C... B....
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
N°20DA00772
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