Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2016, la société Entreprise de staff et de plafonds suspendus, aux droits de laquelle est ensuite venu son liquidateur, la société WRA - Wiart C. et Rouhier P.-F., représentées par la SCP Hepta, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer cette condamnation ;
3°) à titre subsidiaire de limiter le montant des pénalités à la somme de 22 844, 43 euros ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Berck-sur-Mer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jimmy Robbe, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un avis d'appel public à la concurrence en date du 18 mars 2010, la commune de Berck-sur-Mer a lancé une procédure adaptée sur le fondement de l'article 28 du code des marchés publics ayant pour objet la réhabilitation de la salle polyvalente " Le kursaal ". Le lot n° 6, correspondant aux travaux de plâtrerie, de cloisonnement et d'isolation, et d'un montant de 77 606,30 euros TTC, a été attribué à la société Entreprise de staff et de plafonds suspendus (société ESPS). Cette dernière a demandé, au titre du solde du marché, le versement d'une somme de 22 844, 43 euros. La commune de Berck-sur-Mer a rejeté cette demande, en invoquant le montant des pénalités dues par la société ESPS, au titre des retards dans l'exécution des travaux (38 700 euros), des retards dans la levée des réserves (21 900 euros), et des retards ou absences aux réunions de chantiers (1 900 euros), soit un total de 62 500 euros, ce montant ayant été réduit à la somme demandée par la société au titre du solde du marché, de façon à ce que ce solde soit nul. La société ESPS a demandé au tribunal administratif de Lille la condamnation de la commune de Berck-sur-Mer à lui verser une somme de 22 844,43 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2012, au titre du solde de ce marché. Par un jugement du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Lille, après avoir notamment estimé fondées les pénalités au titre des retards dans l'exécution des travaux, a rejeté cette demande après avoir modéré le montant total de ces pénalités à la somme de 22 844,43 euros, et en avoir déduit que le solde du marché s'en trouvait ainsi nul. La société ESPS, aux droits de laquelle est ensuite venu son liquidateur, la société WRA - Wiart C. et Rouhier P.-F., relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé des pénalités :
En ce qui concerne les pénalités de retard dans l'exécution des travaux :
2. La société ESPS a reçu notification de l'ordre de service de commencement des travaux le 31 mai 2010 avec un démarrage et une fin des travaux respectivement fixés au 5 juillet et au 8 octobre 2010. Les parties ont, le 9 mai 2011, conclu un avenant n° 1 par lequel des travaux supplémentaires ont été commandés à la société ESPS, et prévoyant que " la date de fin des prestations est repoussée d'une semaine ". Dans les termes dans lesquels il est rédigé, cet avenant ne saurait être regardé comme révélant, à lui seul et en l'absence de manifestation expresse en ce sens, la commune intention des parties de renoncer au délai d'exécution des travaux initialement fixé par le marché, alors même que cet avenant a été conclu à l'expiration de ce délai. D'ailleurs, la société ESPS a été informée, à l'instar des autres entreprises titulaires des autres lots du marché et y compris après la conclusion de cet avenant, notamment dans le procès-verbal n° 49 relatif à la réunion du 30 juin 2011, que des pénalités de retard lui seraient appliquées. En revanche, l'appelante est fondée à soutenir que, la date de fin d'exécution des travaux ayant ainsi été décalée d'une semaine d'un commun accord des parties, la commune de Berck-sur-Mer aurait dû retrancher 7 jours dans le calcul des jours de retard dans l'exécution des travaux.
3. L'article 1.4.2 du cahier des clauses administratives particulières applicables au marché en cause stipule que, par dérogation au barème fixé par l'article 20 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, l'entrepreneur subira, par jour calendaire de retard dans l'exécution des travaux, une pénalité de 150 euros. En vertu de l'article 20-1.1 de ce cahier des clauses administratives générales, applicable au marché en cause, les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'oeuvre.
4. La réception des travaux a été prononcée avec réserves le 30 juin 2011, soit 258 jours après la date de fin des travaux initialement fixée par l'ordre de service du 31 mai 2010, et 251 jours après la date de fin des travaux résultant de l'avenant.
5. Il est constant que l'entreprise titulaire du lot n° 1, correspondant aux travaux de gros oeuvre, était en retard sur l'exécution de ses prestations. Toutefois, et alors que ce retard sur les travaux de gros oeuvre a seulement été de 8 jours environ, ainsi qu'il ressort procès-verbal de la réunion de chantier du 15 juillet 2010, la société ESPS n'établit pas que ce retard des travaux de gros oeuvre serait à l'origine de son propre retard dans l'exécution des travaux dont elle avait la charge. Il ne résulte pas de l'instruction que la société ESPS ait été dans l'impossibilité de reporter le travail de ses équipes sur d'autres opérations et de respecter le délai global d'exécution imparti.
6. Il est également constant que la société ESPS ne disposait pas du détail des coupes longitudinales sur les faux plafonds au 10 novembre 2010, qu'elle n'a eu communication des plans de plafonds affectés de modifications que le 25 novembre 2010, et qu'est intervenu un problème de venue d'eau dans le sous-sol de la chaufferie. Toutefois, elle n'apporte aucune précision sur les conditions exactes dans lesquelles ces évènements seraient effectivement à l'origine de son retard à exécuter les travaux dont elle avait la charge et ne produit aucun élément précis et probant de nature à établir qu'elle n'a pas été en mesure de se réorganiser afin de remplir ses propres obligations contractuelles.
7. Par ailleurs, la commune fait valoir, sans être sérieusement contestée, que la société ESPS n'a sollicité aucun prolongement du délai d'exécution en lien avec le retard imputable à l'entreprise chargée des travaux de gros oeuvre, et avec les évènements mentionnés au point précédent, alors que, et ainsi qu'il ressort des nombreux procès-verbaux de chantier, cette société a régulièrement été alertée sur ses retards et sur la nécessité d'exécuter le plus rapidement possible les travaux qui lui étaient confiés.
8. Il résulte de ce qui a été dit aux cinq points précédents que, le retard dans l'exécution des travaux confiés à la société ESPS lui étant entièrement imputables, la commune de Berck-sur-Mer était en droit, en application de l'article 1.4.2 du cahier des clauses administratives particulières, de lui infliger des pénalités à raison de 251 jours de retard, soit un montant de 31 500 euros.
En ce qui concerne les pénalités de retard pour absence ou retard aux réunions de chantier :
9. Aux termes de l'article 1.4.4 du cahier des clauses administratives particulières : " En cas d'absence et de retard de plus d'1/2H à la réunion de chantier, l'entrepreneur encourt une pénalité fixée à 100,00 Euros par dérogation au C.C.A.G travaux ".
10. La commune de Berck-sur-Mer a estimé que la société ESPS était absente ou en retard de plus de 30 minutes à dix-neuf réunions de chantier. Dans ses écritures de première instance, la commune de Berck-sur-Mer avait justifié l'absence de la société ESPS pour neuf réunions de chantier uniquement. En appel, la commune a versé au dossier d'autres procès-verbaux de chantier établissant que la société ESPS y était absente ou qu'elle y est arrivée avec plus de 30 minutes de retard. La société requérante ne produit aucun élément de nature à contester la réalité de ces retards ou de ces absences.
11. Il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédent que la commune de Berck-sur-Mer était en droit, en application de l'article 1.4.4 du cahier des clauses administratives particulières, d'infliger à la société ESPS des pénalités à raison de dix-neuf retards ou absences aux réunions de chantier, soit un montant de 1 900 euros, ce qu'au demeurant la société ESPS ne conteste pas en appel.
En ce qui concerne les pénalités de retard dans la levée des réserves :
12. Ni les stipulations précitées de l'article 1.4.2 du cahier des clauses administratives particulières, relatives aux pénalités de retard, ni aucune autre stipulation de ce cahier ou du cahier des clauses administratives particulières, ne prévoient expressément de pénalités en cas de retard dans la levée de réserves. La commune de Berck n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé qu'aucune pénalité ne pouvait être appliquée à ce titre.
13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 10 que la commune de Berck-sur-Mer était en droit d'infliger à la société ESPS, au titre des retards dans l'exécution des travaux et des retards ou absences aux réunions de chantier, un montant total de pénalités de 33 400 euros.
Sur la modulation des pénalités :
14. Si, lorsqu'il est saisi d'un litige entre les parties à un marché public, le juge du contrat doit, en principe, appliquer les clauses relatives aux pénalités dont sont convenues les parties en signant le contrat, il peut, à titre exceptionnel, saisi de conclusions en ce sens par une partie, modérer ou augmenter les pénalités de retard résultant du contrat si elles atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire, eu égard au montant du marché et compte tenu de l'ampleur du retard constaté dans l'exécution des prestations.
15. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que les clauses des articles 1.4.2 et 1.4.4 du cahier des clauses administratives particulières autorisaient la commune de Berck-sur-Mer à infliger à la société ESPS des pénalités de retard d'un montant de 33 400 euros. La commune de Berck-sur-Mer ayant décidé d'infliger des pénalités de retard dans la limite de la somme de 22 844,43 euros, soit le montant du solde du marché réclamé par la société ESPS, les conclusions présentées par cette dernière tendant à ce que le montant des pénalités de retard soit réduit à 22 844,43 euros, sont donc dépourvues d'objet.
Sur le solde du marché :
16. Il résulte de l'instruction que le solde du marché calculé par la société ESPS en sa faveur s'élève à 22 844,43 euros toutes taxes comprises. Ce calcul n'intégrait pas le montant des pénalités qu'était en droit de lui infliger la commune de Berck-sur-Mer. Cette dernière, ainsi qu'il a déjà été dit, a de sa propre initiative réduit le montant des pénalités effectivement infligées, à hauteur de la somme réclamée par la société ESPS au titre du solde du marché. Ce solde étant ainsi nul, la société ESPS n'est pas fondée, au titre de celui-ci, à demander la condamnation de la commune de Berck-sur-Mer à lui verser la somme de 22 844,43 euros toutes taxes comprises.
17. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir contractuelle opposée par la commune, que la société ESPS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au procès :
18. Les conclusions de la société WRA - Wiart C. et Rouhier P.-F., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur de la société ESPS, partie perdante dans la présente instance, présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
19. En revanche, il y a lieu de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Berck-sur-Mer au titre des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête la société WRA - Wiart C. et Rouhier P.-F., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Entreprise de staff et de plafonds suspendus, est rejetée.
Article 2 : La société WRA - Wiart C. et Rouhier P.-F., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Entreprise de staff et de plafonds suspendus, versera à la commune de Berck-sur-Mer une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société WRA - Wiart C. et Rouhier P.-F., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Entreprise de staff et de plafonds suspendus, et à la commune de Berck-sur-Mer.
N°16DA02005 2