Par une requête, enregistrée le 11 décembre 2015, M. C...A..., représenté par Me B...D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 19 octobre 2015
2°) d'annuler les décisions en date du 25 juillet 2015 par lesquelles le préfet du Nord l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de procéder à un nouvel examen de sa situation personnelle ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
- elle est fondée sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle repose sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale.
La requête a été communiquée au préfet du Nord qui n'a pas produit de mémoire malgré la mise en demeure qui lui a été adressée le 21 avril 2016.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 novembre 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-857 du 11 juillet 1979 ;
- le loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Christian Bernier, président de la formation de jugement, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. C...A..., ressortissant guinéen né le 5 janvier 1989 relève appel du jugement du 19 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 25 juillet 2015 par lesquelles le préfet du Nord, l'a obligé à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays de destination ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. Considérant que la décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il ne ressort pas de cette motivation que le préfet n'aurait pas examiné la situation personnelle de M.A... ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée et du défaut d'examen de la situation personnelle du requérant et doit être écarté ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré en France en 2011 ; qu'il est célibataire, qu'il ne justifie d'aucune attache familiale en France et qu'il n'établit pas être isolé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, en dépit de la durée du séjour en France et alors même qu'il occuperait un emploi, le préfet du Nord n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A...une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise et n'a, ainsi, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre du requérant le 25 juillet 2015 doit être écarté ;
6. Considérant que la décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. A Mayotte, l'étranger ne peut bénéficier d'une aide au retour mais, dans des circonstances exceptionnelles et sous réserve de l'existence d'un projet économique viable, d'une aide à la réinsertion économique, ou, s'il est accompagné d'un ou plusieurs enfants mineurs, de mesures d'accompagnement, dans des conditions définies par arrêté du ministre de l'intérieur et du ministre chargé des outre-mer. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français :1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; 2° Si l'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était ou manifestement infondée ou frauduleuse ; 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. " ;
8. Considérant que M. A...s'est maintenu sur le territoire français après l'expiration de son récépissé de demande de carte de séjour intervenu le 25 mars 2014 ; que, par suite, le préfet du Nord pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation, refuser de lui octroyer un délai de départ volontaire ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
9. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité, M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale ;
10. Considérant que la décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté ;
11. Considérant que si M. A...fait état dans sa requête de son intention de demander l'asile, il n'établit, ni d'ailleurs ne soutient véritablement être exposé à des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de renvoi dans son pays d'origine ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 25 juillet 2015 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte et celles tendant à l'application présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 4 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Xavier Fabre, premier conseiller,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 novembre 2016.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : X. FABRELe président de la formation de jugement,
Président-rapporteur,
Signé : C. BERNIER
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
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N°15DA01968