Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 février 2016, M. E...C...A..., représenté par Me B...D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer le titre de séjour sollicité, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil, contre renonciation de cette dernière au bénéfice de l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour, qui est stéréotypée, est insuffisamment motivée, en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le préfet a méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- la décision de refus de séjour méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision de refus de séjour sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est fondée sur un titre de séjour illégal ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est fondée sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2016, le préfet de l'Eure conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
M. C...A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 mai 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. C...A..., ressortissant algérien, a bénéficié à deux reprises en qualité d'étranger malade de titres de séjour valables six mois dont le dernier expirait le 29 avril 2015 ; qu'il relève appel du jugement du 22 mars 2016 par lequel tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2015 du préfet de l'Eure refusant de lui renouveler son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
Sur le refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public alors en vigueur : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : -restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; que l'article 3 prévoit que : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que l'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; que celles-ci ne se limitent pas à la reproduction de formules stéréotypées ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation, au demeurant soulevé pour la première fois en appel, doit être écarté ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7) Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...) " ; qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance ou le renouvellement d'un certificat de résident à un ressortissant algérien qui se prévaut de ces stipulations de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays d'origine ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;
4. Considérant que, par un avis du 5 mai 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a considéré que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, que les soins nécessités par son état de santé présentaient un caractère de longue durée, supérieur à un an, mais que le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, que l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que, au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine ;
5. Considérant que M. C...A...souffre de vascularité leucocytoclasique ; que si cette affection provoque des douleurs dans les membres, le requérant ne produit aucun élément probant, infirmant l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de la santé publique, susceptible d'établir qu'un défaut de prise en charge médicale pourrait l'exposer à des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, par ailleurs, le préfet de l'Eure justifie en défense, par la production de la nomenclature nationale des produits pharmaceutiques à l'usage de la médecine humaine, que le traitement est disponible en Algérie ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C...A..., ou son épouse, qui réside en Algérie avec leurs enfants, ne seraient pas en mesure d'assumer le coût des soins médicaux ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté ;
6. Considérant que M. C...A..., né en 1964 en Algérie, de nationalité algérienne, n'est entré en France qu'en novembre 2012 et a donc passé l'essentiel de sa vie dans son pays ; que sa femme et ses cinq enfants résident en Algérie ; qu'une tante constitue sa seule attache familiale en France ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Eure n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel le refus de titre de séjour a été pris ; que, par suite, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'appelant ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'illégalité ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
9. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté préfectoral sur sa situation personnelle doivent être écartés pour les motifs énoncés au point 6 ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité ;
Sur le pays de destination :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 10 que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est entachée d'illégalité ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au prononcé d'une injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Eure.
Délibéré après l'audience publique du 4 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Xavier Fabre, premier conseiller,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 novembre 2016.
Le rapporteur,
Signé : X. FABRELe président de la formation de jugement,
Signé : C. BERNIER
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
N°16DA00970 2