Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 décembre 2018, M. B...E...A..., représenté par Me C...D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de sa demande ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 25 janvier 2018, en tant qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour, l'oblige à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixe le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et vie familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 61-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Christian Boulanger, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur la décision de refus de titre de séjour :
1. La décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. En effet, après avoir visé les textes applicables à la situation de l'intéressé, et en particulier le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Nord précise les raisons pour lesquelles la demande de M. A...ne peut être accueillie au titre de ces dispositions, en citant les termes de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et en soulignant qu'aucune pièce du dossier, dans la limite du secret médical, ne contredit sérieusement cet avis. Par suite, alors même que les motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation médicale de l'intéressé, le préfet a suffisamment motivé sa décision.
2. Il ne résulte ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet du Nord, pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M.A..., n'aurait pas procédé à un examen sérieux et complet de la situation du demandeur.
3. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. "
4. Il ressort des pièces du dossier que M.A..., ressortissant nigérian, est suivi depuis 2001 pour des troubles psychologiques et suit un traitement médicamenteux pour traiter sa pathologie. Il a bénéficié d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions ci-dessus reproduites valable jusqu'au 26 décembre 2014, renouvelé jusqu'au 5 juin 2017. Il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour le 7 avril 2017. Par un avis du 23 septembre 2017, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que l'état de santé de M. A...nécessitait une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une extrême gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Les certificats médicaux versés au dossier par le requérant, notamment celui du 5 avril 2016 qui atteste qu'il ne peut bénéficier d'un suivi médical et d'un traitement approprié dans son pays d'origine, ne permettent pas de remettre en cause utilement l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Par ailleurs, si le rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés du 22 janvier 2014 relatif aux soins psychiatriques au Nigeria, versé à nouveau aux débats par l'appelant en cause d'appel, souligne que les moyens en structures, médicaments et personnels sont insuffisants pour couvrir l'ensemble des besoins de la population souffrant de pathologies psychiatriques, ce même rapport fait notamment état de l'existence, dans ce pays, de huit hôpitaux psychiatriques et de six cliniques traitant notamment les états de stress post-traumatique et n'indique pas non plus que le Nigeria ne disposerait pas de traitement médicamenteux pour traiter ces pathologies. Si le requérant allègue, en outre, que le coût d'une telle prise en charge médicale pourrait faire obstacle à ce qu'il puisse accéder effectivement dans son pays d'origine à une offre de soins appropriée et effective, il ne produit aucun élément probant au soutien de ces allégations. Dès lors, le requérant ne verse aux débats aucun élément de nature à mettre en doute la disponibilité du traitement approprié et la possibilité de surveillance que requiert son état de santé. Dans ces conditions, il n'est pas établi que pour refuser à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé, le préfet du Nord aurait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen doit être écarté.
5. M.A..., né le 9 novembre 1970, déclare être entré régulièrement en France le 12 octobre 2001. Il ressort des pièces du dossier qu'il a déclaré lors de sa demande de titre de séjour être célibataire. Si le requérant se prévaut d'une relation avec une ressortissante française ainsi que de la naissance de leur enfant le 1er mars 2017, reconnu postérieurement à la décision attaquée, il ne verse aux débats aucun élément de nature à établir l'ancienneté, la réalité et la stabilité de cette relation ainsi que la réalité de son investissement dans l'entretien et l'éducation de son enfant. Il ne démontre pas également être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de trente ans et où résident sa mère, ses frères ainsi que sa fille née le 9 novembre 1997. Il ne justifie pas, en outre, avoir noué en France des liens sociaux et professionnels d'une particulière intensité. Dans ces conditions et en dépit de la durée présumée de son séjour en France, le préfet du Nord n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels le refus de séjour a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes raisons, le préfet du Nord n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile font obligation au préfet de saisir la commission du titre de séjour du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles qu'elles visent, en particulier le 7° de l'article L. 313-11 du même code. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, M. A... ne remplit pas les conditions prévues par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir qu'il appartenait au préfet du Nord de consulter la commission du titre de séjour en application de l'article L. 312-2 de ce code.
7. Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
8. Comme il a été dit au point 5, M. A...ne démontre pas, par les seuls documents qu'il verse au dossier, l'ancienneté et l'intensité des liens qu'il aurait noués avec son enfant, avec lequel il ne vit pas. Ainsi, le préfet du Nord n'a pas méconnu les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
9. Pour les mêmes raisons que celles énoncées aux points 4 et 5, le préfet du Nord n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la vie personnelle de l'intéressé.
10. Il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.
12. La décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
13. Il ne ressort ni des motifs de l'arrêté en litige, ni des autres pièces du dossier que le préfet du Nord n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation personnelle de M. A...avant de l'obliger à quitter le territoire.
14. Il résulte de ce qui a été énoncé au point 6 que le moyen tiré de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
15. Aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ; / (...) / 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / (...) ".
16. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
17. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A...contribue effectivement à l'éducation et à l'entretien de son enfant. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
18. Si M. A...déclare être entré sur le territoire français le 12 octobre 2001, à supposer même cette circonstance établie, il n'apporte toutefois aucun élément suffisamment probant attestant de sa résidence habituelle et continue en France depuis lors. Dès lors, le requérant ne justifie pas résider régulièrement sur le territoire français depuis plus de dix ans. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
19. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 5, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Nord aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
20. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
21. Il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité.
Sur la décision fixant le pays de destination :
22. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.
23. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...E...A..., au ministre de l'intérieur et à Me C...D....
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
N°18DA02513 4