Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2019, Mme F..., représentée par Me D... C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2018 du préfet de la Somme ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Somme de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de Mme F... de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme F..., de nationalité gabonaise, née le 2 avril 1988, entrée en France le 29 septembre 2017 sous couvert d'un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes, a demandé, le 13 novembre 2018, son admission au séjour en qualité de parent d'enfant français sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asiles. Elle relève appel du jugement du 3 avril 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2018 du préfet de la Somme refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Mme F... soutient que les premiers juges ne se sont pas prononcés sur le moyen tiré de ce que le préfet avait, à tort, retenu l'absence de justification de la contribution du père de son enfant et la tardiveté de la reconnaissance de paternité de celui-ci, qualifiée de frauduleuse. Toutefois, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué qu'en considérant que, s'il n'était pas contesté que Mme F... contribuait effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille, elle n'établissait pas que le centre de ses intérêts et de ceux de son enfant était fixé en France dès lors que son père résidait au Gabon avec ses grands-parents, les premiers juges ont estimé que, s'il ne s'était fondé que sur ce seul motif, le préfet de la Somme aurait adopté la même décision. Les premiers juges n'étaient, par suite, pas tenus de se prononcer sur les autres motifs retenus par le préfet, relatifs au défaut de contribution du père de l'enfant à son entretien et son éducation et au caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité. Par suite, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à se prononcer sur un moyen.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".
4. Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que le législateur, pour le cas où la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " est demandée par un étranger au motif qu'il est parent d'un enfant français, a subordonné la délivrance de plein droit de ce titre à la condition, notamment, que l'enfant réside en France. Ce faisant, le législateur n'a pas requis la simple présence de l'enfant sur le territoire français, mais a exigé que l'enfant réside en France, c'est-à-dire qu'il y demeure effectivement de façon stable et durable.
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme F... est entrée en France munie d'un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes, le 29 septembre 2017, accompagnée de sa fille, née le 11 juillet 2008 au Gabon et issue de sa relation avec un ressortissant français, M. A... E.... L'enfant, qui n'était donc présente en France à la date de la décision attaquée que depuis plus d'un an, vit avec sa mère, dont il n'est pas contesté qu'elle contribue effectivement à son entretien et à son éducation. Cependant, cet enfant n'a aucun autre lien affectif en France d'après les justifications produites, en particulier avec son père français dont sa mère est séparée depuis 2008 et qui réside au Gabon, ainsi que ses grands-parents paternels. Par suite, et quand bien-même le préfet aurait, à tort, retenu l'absence de justification de la contribution du père à l'entretien et l'éducation de sa fille, la fraude résultant de la tardiveté de la reconnaissance de paternité, ainsi que l'absence de visa de long séjour, il aurait pris la même décision en se fondant, pour refuser de délivrer à Mme F... un titre de séjour en sa qualité de parent d'un enfant français, sur le seul motif tiré de ce que la résidence stable et durable de l'enfant en France n'était pas établie, nonobstant la présence, invoquée pour la première fois en appel, de sa tante paternelle en France. Il s'ensuit que le préfet de la Somme n'a pas méconnu les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si Mme F... fait valoir qu'elle a donné naissance à un second enfant, le 16 février 2019 à Amiens, issu d'une relation avec un compatriote, cette circonstance, postérieure à l'arrêté en litige, est ainsi sans incidence sur sa légalité.
6. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté. En tout état de cause, en se bornant à produire un article de presse, la requérante n'apporte aucun élément probant de nature à établir que sa fille, scolarisée au Gabon jusqu'à sa venue en France à l'âge de neuf ans, ne pourrait bénéficier d'une prise en charge éducative adaptée dans ce pays.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 par le conseil de l'intéressée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.
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N°19DA01624