Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 décembre 2017, MmeC..., représentée par Me D...A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 3 octobre 2017 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté de la préfète de la Seine-Maritime en date du 22 mai 2017 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour valable un an, dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de Me A...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve du renoncement à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. MmeC..., ressortissante algérienne née le 26 avril 1986 à Oued Rhiou, interjette appel du jugement du 3 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté de la préfète de la Seine-Maritime en date du 22 mai 2017 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sous trente jours, et prescrivant son éloignement du territoire à destination du pays dont elle a la nationalité, ou de tout autre pays où elle établirait être légalement admissible.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal administratif de Rouen a répondu, au point 4 du jugement litigieux, au moyen tiré de ce que la préfète de la Seine-Maritime n'aurait pas apprécié distinctement l'atteinte portée par sa décision au droit au respect de sa vie privée d'une part et de sa vie familiale d'autre part. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité dont le jugement serait entaché doit être écarté.
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
3. La décision du 22 mai 2017 obligeant Mme C...à quitter le territoire français comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. La préfète de la Seine-Maritime n'était pas tenue de viser formellement les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Elle a notamment indiqué dans l'arrêté en litige que Mme C...est mère de deux enfants et que l'exécution de cette décision ne s'oppose pas à ce que la cellule familiale, qu'elle forme avec M.C..., son époux, se reconstitue en Algérie, pays dont ils possèdent tous deux la nationalité, ou en Espagne, où M. C... est admis au séjour. Ainsi, la préfète a énoncé de manière suffisante son appréciation quant à l'intérêt supérieur des enfants de la requérante. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté.
4. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5) : au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". En vertu des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale.
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme C...a épousé le 9 juillet 2009 un ressortissant algérien avec lequel elle a eu deux enfants, nés respectivement les 28 avril 2013 et 11 décembre 2016 sur le territoire français, et dont l'aîné est scolarisé en France. Si la requérante fait valoir la présence régulière sur le territoire français de certains membres de sa famille, elle ne justifie pas de la particulière intensité des liens familiaux qu'elle entretient avec eux. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'elle dispose de nombreuses attaches dans son pays d'origine, où résident ses parents et plusieurs autres membres de sa fratrie, et où elle a vécu jusqu'à ses vingt-six ans. L'intéressée qui, par ailleurs, ne se prévaut d'aucune perspective d'insertion professionnelle, ne démontre ni que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer en Algérie, pays dont son époux a également la nationalité, ni que ses enfants, âgés de quatre ans et six mois à la date de l'arrêté contesté, ne pourraient être scolarisés en Algérie. Dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu des conditions de séjour de l'intéressée en France, qui s'est maintenue de façon irrégulière à l'expiration de son visa, l'arrêté contesté ne peut être regardé comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, l'intéressée ne remplit pas les conditions pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en application du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par suite, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation en décidant d'obliger Mme C...à quitter le territoire français.
6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de cet article que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accordée une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 2 et 5, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les stipulations précitées et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision querellée sur la situation personnelle de l'intéressée.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Mme C...se borne à soutenir, comme en première instance, que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, qu'elle est illégale dès lors qu'elle se fonde sur un refus de séjour lui-même illégal, qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Toutefois, elle n'apporte, en appel, aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ces moyens. Par suite, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, de les écarter.
Sur la décision fixant le pays de retour :
8. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utile. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'administration de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter des nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français fixant son pays de destination, qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour.
9. En l'espèce, Mme C...soutient qu'elle n'a pas été en mesure de faire valoir ses observations relativement à la décision fixant le pays à destination duquel elle serait renvoyée en cas de refus de sa demande de titre de séjour. Toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où la décision portant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français, qui doit fixer le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé, découle nécessairement du refus de titre de séjour. Le droit d'être entendu n'implique pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision fixant le pays de destination, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour. Par suite, la seule circonstance que la préfète de la Seine-Maritime n'aurait pas expressément informé Mme C...qu'en cas de rejet de sa demande de renouvellement de titre de séjour, elle serait susceptible d'être contrainte de quitter le territoire français, en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, notamment au regard du pays de destination, n'est pas de nature à permettre de regarder la requérante comme ayant été privée du droit d'être entendue.
10. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 2 à 7, Mme C...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
11. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...B...épouseC..., au ministre de l'intérieur et à Me D...A....
Copie en sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.
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N°17DA02509