Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 mai 2016, M.E..., représenté par Me D...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 3 mai 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2016 du préfet de l'Aisne ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation.
Il soutient que :
- l'arrêté du 27 janvier 2016 méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du 10° de l'article L. 511-4 du même code car il remplit les conditions de délivrance de plein droit d'un titre de séjour au regard de son état de santé qui nécessite une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; il ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; le suivi médical serait limité et inadapté en République démocratique du Congo ;
- l'arrêté du 27 janvier 2016 méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2016, le préfet de l'Aisne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. E...ne sont pas fondés.
M. E...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 mai 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.E..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 4 avril 1980, entré en France le 8 mars 2013 sous couvert d'un passeport d'emprunt, a demandé son admission au séjour au titre de l'asile ; que sa demande a été rejetée par une décision du 31 juillet 2014 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 13 février 2015 de la Cour nationale du droit d'asile ; qu'il a, le 20 avril 2015, demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en faisant valoir son état de santé ; qu'il relève appel du jugement du 3 mai 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 janvier 2016 du préfet de l'Aisne refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant la République démocratique du Congo, comme pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 de ce code : "Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé / (...) " ;
3. Considérant que pour refuser sur le fondement des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la délivrance d'un titre de séjour à M.E..., le préfet de l'Aisne s'est fondé sur le motif tiré de ce que le médecin de l'agence régionale de santé de Picardie avait estimé, dans un avis du 30 novembre 2015, que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existait un traitement approprié dans son pays d'origine, que les soins devaient être poursuivis pendant une durée de douze mois et qu'il pouvait voyager sans risque dans son pays d'origine ; que ni les ordonnances de prescription médicale, ni les certificats médicaux produits par M. E..., dont l'un est non daté, établi par un médecin psychiatre confirmant que M. E...souffre d'un stress post-traumatique sévère tout en se bornant à faire état de la nécessité d'une prise en charge médicale dont le défaut aurait de lourdes conséquences et que les possibilités de traitement au Congo seraient limitées et, le second établi le 12 septembre 2014 par le centre médico-psychologique Séraphine Louis de Creil, faisant état d'un traitement à base d'antidépresseur, d'anxiolytique, neuroleptique et sédatif ne permettent, eu égard à leurs teneurs, de remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ou d'établir qu'il ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié en République démocratique du Congo ; qu'en particulier, le préfet de l'Aisne justifie que les médicaments prescrits à M. E... pour les pathologies dont il souffre figurent sur la liste nationale des médicaments essentiels disponibles en République démocratique du Congo et que ce pays dispose de structures médicales et de praticiens susceptibles de suivre et d'accueillir des patients souffrant de problèmes psychiatriques et d'autres pathologies notamment digestives et inflammatoires dont serait atteint M. E...; que, par suite, le préfet de l'Aisne n'a pas, par l'arrêté en litige, méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, ni celles du 10° de l'article L. 511-4 du même code ;
4. Considérant que M. E...n'établit pas, en l'absence de tout élément probant produit au soutien de ses allégations, la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine alors qu'au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 31 juillet 2014 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 13 février 2015 de la Cour nationale du droit d'asile ; que par suite, l'arrêté en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...E..., au ministre de l'intérieur et à Me D...C....
Copie sera adressée au préfet de l'Aisne.
Délibéré après l'audience publique du 29 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Muriel Milard, première conseillère,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.
Lu en audience publique le 13 décembre 2016.
Le rapporteur,
Signé : M. A...Le président-assesseur,
Signé : M. F...Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Marie-Thérèse Lévèque
4
N°16DA00913