Procédure devant la cour :
       Par une requête, enregistrée le 29 mai 2018, M.B..., représenté par Me C...A..., demande à la cour :
       1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire contenue dans l'arrêté du 25 janvier 2018 et de la décision fixant le pays de destination ;
       2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté de la préfète de la Seine-Maritime du 25 janvier 2018 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français et qu'il fixe le pays de destination;
       3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de réexaminer sa situation et de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour ;
 	4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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       Vu les autres pièces du dossier.
       Vu :
       - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 
       - la convention d'application des accords de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990 et modifiée par le règlement (UE) n° 610/ 2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
       - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
       - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; 
       - le code de justice administrative.
       Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
       Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
       Le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
       Considérant ce qui suit :
       1. M.B..., ressortissant pakistanais né le 12 mars 2003, est entré en France, selon ses déclarations en 2011. Par un arrêté du 26 juin 2015, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'il avait sollicité le 28 avril 2014. Par un arrêt du 5 juillet 2018, la cour a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 8 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de ce refus de titre de séjour. Le 25 janvier 2018, M. B...a été interpellé lors d'un contrôle de police alors qu'il travaillait sur un chantier situé au Havre. Par un arrêté du même jour, la préfète de la Seine-Maritime a obligé M. B... à quitter sans délai le territoire français et a fixé le pays à destination de cette mesure d'éloignement. M. B...relève appel du jugement du 21 février 2018 en tant que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen, après avoir annulé la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire, a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire et de celle fixant le pays de destination.
       Sur la régularité du jugement : 
       2. Il ressort des termes du point 4 du jugement que le premier juge, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments de la demande de première instance, s'est prononcé de manière suffisante sur le moyen tiré de ce que la décision l'obligeant à quitter le territoire serait insuffisamment motivée. 
       3. M. B...soutient également que le tribunal aurait omis de répondre au moyen tiré de ce que l'arrêté en litige, en ne distinguant pas les notions de vie privée et de vie familiale, serait entaché d'erreur de droit. Toutefois, le premier juge s'est prononcé sur le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquelles protègent tant la vie familiale que la vie privée et n'avait pas à se prononcer sur l'ensemble des arguments invoqués par le requérant à l'appui de ce moyen. Par suite, ce moyen d'omission à statuer doit être écarté.
       Sur la légalité de la décision obligeant à quitter le territoire :
       4. La décision contestée comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquels elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
       5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen sérieux et complet de la situation de M.B....
       6. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime aurait méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant à tort en situation de compétence liée pour édicter la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français.
       7. Il ressort des pièces du dossier que le jour même de l'arrêté en litige, l'autorité administrative a saisi le centre de coopération policière et douanière de Modane de la situation de M.B..., lequel se présentait comme détenteur d'un titre de séjour longue durée délivré par l'Italie. Par suite, le moyen tiré de ce que les autorités italiennes n'auraient pas été saisies doit, en tout état de cause, être écarté.
       8. La décision en litige ne se fonde pas sur la circonstance que M. B...ne justifierait pas d'un domicile certain et permanent. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision serait entachée d'erreur de fait sur ce point ne peut qu'être écarté. 
       9. Les motifs de la décision énoncent que M. B...a présenté seulement une copie de son passeport et de son titre de séjour italien et non un document de voyage en cours de validité. A supposer même que l'autorité administrative détiendrait ces documents originaux depuis le 16 octobre 2017, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elle ne saurait davantage révéler, à elle seule, une attitude déloyale de la part de l'autorité préfectorale, susceptible d'entacher d'irrégularité la décision contestée.
       10. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ". D'autre part, aux termes de l'article L. 511-2 de ce code : " Le 1° du I et le a du 3° du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne : / (...) / 2° Si, en provenance directe du territoire d'un Etat partie à la convention précitée signée à Schengen le 19 juin 1990, il ne peut justifier être entré sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2, de cette même convention ". Aux termes de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire de l'une des parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque partie contractante, aux autorités compétentes de la partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la partie contractante sur lequel ils pénètrent. / (...) ". Aux termes de l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990. ". Aux termes de l'article R. 212-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "  L'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse n'est pas astreint à la déclaration d'entrée sur le territoire français : 1° S'il n'est pas assujetti à l'obligation du visa pour entrer en France en vue d'un séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois ; 2° Ou s'il est titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, qui a été délivré par un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; toutefois, la déclaration doit être souscrite par les résidents d'Etats tiers qui sont désignés par arrêté du ministre chargé de l'immigration. "
       11. M. B...fait valoir qu'il est entré régulièrement sur le territoire français sept ans plus tôt en 2011, et qu'il n'a au surplus jamais quitté ce territoire, dès lors qu'il détient un titre de séjour italien à durée illimitée et qu'il n'est soumis à aucune déclaration d'entrée auprès des autorités françaises en vertu de l'article R. 212-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lequel l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne n'est pas astreint à la déclaration d'entrée sur le territoire français s'il est titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, qui a été délivré par un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990. A supposer authentique le titre de séjour italien produit pas le requérant dont la détention le dispenserait selon lui de souscrire à une déclaration d'entrée sur le territoire français, il ressort des mentions de ce document que sa date de début de validité est du 24 mai 2013, soit deux ans après son arrivée déclarée sur le territoire français. Dès lors, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la détention d'un titre de séjour à durée illimitée qui l'aurait dispensée de la déclaration d'entrée. Dans ces conditions, le préfet a pu légalement obliger M. B...à quitter le territoire français en application des dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 511-2 du même code.
       12. MB..., qui déclare être arrivé en France en 2011 à  l'âge de dix-huit ans, est célibataire et sans charge de famille. Il n'établit pas être isolé dans son pays d'origine où résident ses parents ainsi que ses cinq soeurs. Alors même qu'il a été scolarisé jusqu'en 2015, il ne justifie pas d'une perspective sérieuse ou réelle d'insertion en produisant un contrat à durée indéterminée à temps partiel depuis le 1er juillet 2016 en qualité de poseur de revêtement de sol alors que l'autorisation de travail qui avait été sollicitée en sa faveur en 2013 concernait un emploi de cuisinier. Dans ces conditions, la préfète de la Seine-Maritime, qui a examiné la vie privée et familiale de M.B..., n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté contesté a été pris et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M.B.... 
       Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination : 
       13. La décision contestée comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquels elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté. 
       14. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
       15. M. B...se borne à évoquer sans autre précision le " contexte insécuritaire " prévalant au Pakistan. Il ne produit aucune pièce permettant de tenir pour établi que son retour au Pakistan l'exposerait à des peines ou à des traitements inhumains ou dégradants, ou que sa vie ou sa liberté y serait menacée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
       16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
       Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
       Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., au ministre de l'intérieur et à Me C...A....
       Copie en sera adressée pour information à la préfète de la Seine-Maritime.
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N°18DA01085
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