Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 18 décembre 2017, le 23 janvier 2018, le 12 octobre 2018 et le 1er mars 2019, Voies navigables de France, représentées par Me A...D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 octobre 2017 du tribunal administratif de Lille ;
2°) de rejeter la demande de M. C...devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de M. C...la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me A...D..., représentant Voies navigables de France.
Considérant ce qui suit :
1. Le 13 mars 2013, M. B...C..., technicien supérieur en chef à la direction territoriale Nord Pas-de-Calais de Voies navigables de France (VNF), né le 5 mai 1962, a glissé sur une plaque de verglas alors qu'il se rendait à son travail. Il a ainsi été victime d'une grave entorse du ligament collatéral interne du genou gauche. M. C...a ensuite été opéré le 4 avril 2013 d'une arthroscopie du genou gauche pour ménisectomie. Une chondropathie rotulienne sévère a été notée à cette occasion. Devant la persistance des douleurs, à la suite de plusieurs examens, une prothèse totale du genou gauche a été posée le 27 mars 2014. Voies navigables de France a reconnu l'accident comme imputable au service dès le 12 avril 2013. Cet établissement public relève appel du jugement du 17 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé l'article 2 des décisions du 20 novembre 2014 et 9 mars 2015 par lesquelles le directeur général de Voies navigables de France a fixé au 10 mars 2014, sans taux d'incapacité permanente partielle, la date de consolidation de l'accident de service dont M. C... a été victime, lui a enjoint de prendre en charge les soins et arrêts de travail postérieurs au 10 mars 2014 au titre de l'accident de service, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de se prononcer à nouveau sur la date de consolidation de l'état de santé et sur le taux d'incapacité permanente partielle de M. C...dans le même délai et sous la même astreinte.
2. Le droit, prévu par les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, pour un fonctionnaire en congé de maladie, à conserver l'intégralité de son traitement en cas de maladie provenant d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions, est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions.
3. Il ressort des pièces du dossier, et particulièrement de l'expertise du 6 octobre 2014 demandée par la commission de réforme, que tout en reconnaissant chez M. C...l'existence d'un état antérieur caractérisé par l'existence d'une chondropathie rotulienne, cet expert conclut que " la mise en place de la prothèse totale du genou le 27 mars 2014 n'est en rapport qu'avec cette chondropathie rotulienne (courrier de consultation du 10 mars 2014) " et que " A la consolidation, il ne persiste pas de séquelle imputable au fait accidentel au 13 mars 2013. Les soins et arrêts postérieurs au 10 mars 2014 sont à prendre en maladie ordinaire ". Une seconde expertise du 21 août 2015 d'un rhumatologue, également demandée par la commission de réforme a conclu dans le même sens. Selon cette expertise, " les arrêts à compter du 10 mars 2014 ainsi que la mise en place de la prothèse doivent être pris au titre du congé maladie ordinaire car correspondant au traitement et à l'évolution de l'état antérieur ". Une troisième expertise du 12 janvier 2018 a aussi considéré que " les radiographies du 26 mars 2014 ne montrent aucune séquelle post traumatique pouvant justifier la mise en place de cette prothèse totale du genou " et que " cette prothèse a été mise en place dans le cadre d'une pathologie indépendante à l'accident du 13 mars 2013 et évoluant pour son propre compte ". Le certificat du 12 novembre 2014 du professeur ayant opéré M.C..., le 4 avril 2013, a également confirmé l'existence d'une chondropathie rotulienne sévère préexistante, mise en évidence lors de cette opération. Le courrier du 10 mars 2014 de ce praticien faisait également état d'une arthrose interne débutante.
4. Dès lors, la simple affirmation du chirurgien ayant opéré M.C..., d'une décompensation de cette pathologie, à la suite de l'accident de service, ainsi que le certificat du 17 octobre 2014 du médecin généraliste de M. C...établissant que celui-ci n'avait jamais présenté de pathologie du genou gauche avant le 13 mars 2013, et le certificat du 11 avril 2016 du médecin de prévention ne suffisent pas à remettre en cause les appréciations des médecins spécialistes agréés et de la commission de réforme quant au fait que la pathologie dont souffre M. C...et sa date de consolidation sont indépendantes de l'accident de service dont il a été victime le 13 mars 2013. Par suite, VNF est fondé a soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a, par son article 1er, annulé les articles 2 des décisions des 20 novembre 2014 et 9 mars 2015 par lesquelles le directeur général de VNF a fixé au 10 mars 2014 la date de consolidation de l'accident de service de M.C....
5. Il y a lieu, toutefois, pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant la juridiction administrative.
Sur l'article 2 de la décision du 20 novembre 2014 :
6. Aux termes de l'article 19 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité absolue des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération. / Les avis sont émis à la majorité des membres présents. / Lorsqu'un médecin spécialiste participe à la délibération conjointement avec les deux praticiens de médecine générale, l'un de ces deux derniers s'abstient en cas de vote. / La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages rapports et constatations propres à éclairer son avis./ Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instruction, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires./ Le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux./ La commission de réforme, si elle le juge utile, peut faire comparaître le fonctionnaire intéressé. Celui-ci peut se faire accompagner d'une personne de son choix ou demander qu'une personne de son choix soit entendue par la commission de réforme (...) Le secrétariat de la commission de réforme informe le fonctionnaire : de la date à laquelle la commission de réforme examinera son dossier / de ses droits concernant la communication de son dossier et la possibilité de se faire entendre par la commission de réforme, de même que de faire entendre le médecin et la personne de son choix. / L'avis de la commission de réforme est communiqué au fonctionnaire sur sa demande ; / Le secrétariat de la commission de réforme est informé des décisions qui ne sont pas conformes à l'avis de la commission de réforme ".
7. L'article 2 de la décision contestée du 20 novembre 2014 fait suite à un avis rendu lors de la réunion du 13 novembre 2014 de la commission de réforme du département du Nord. Il ressort des pièces du dossier que si la lettre informant M. C...de la réunion de la commission est datée du 30 octobre 2014, celle-ci n'a été postée que le 7 novembre 2014, en courrier simple, ainsi que l'établit le timbre à date qui y est apposé. M. C...n'a pas pu bénéficier des garanties prévues par le texte précité dès lors qu'un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle la consultation de la partie administrative de son dossier est possible de la date de la réunion de la commission de réforme. Par suite, l'article 2 de la décision du 20 novembre 2014 a été adopté à l'issue d'une procédure irrégulière et doit être annulé.
8. Il résulte de ce qui précède que VNF n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'article 2 de sa décision du 20 novembre 2014.
Sur l'article 2 de la décision du 9 mars 2015 :
9. Il ressort des pièces du dossier que M. C...a reçu le 29 janvier 2015, par lettre en recommandé avec accusé de réception, l'annonce de la réunion le 12 février 2015 de la commission de réforme dont l'avis a été repris dans l'article 2 de la décision du 9 mars 2015 de VNF. Le courrier rappelait la possibilité qu'il avait de se faire représenter ou d'être accompagné par un médecin, ou par un représentant du personnel et de la possibilité de consulter l'intégralité de son dossier et d'obtenir, directement ou par l'intermédiaire de son médecin traitant, copie des éléments médicaux de son dossier. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par VNF en première instance, tirée du caractère indivisible de la décision contestée, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure ayant abouti à la décision contestée doit être écarté.
10. Ainsi qu'il est dit au point 3, l'article 2 de la décision du 9 mars 2015 a fixé à bon droit au 10 mars 2014, sans taux d'incapacité permanente partielle, la date de consolidation de l'accident du travail dont M. C...a été victime.
11. Il résulte de ce qui précède que VNF est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'article 2 de sa décision du 9 mars 2015.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Voies navigable de France est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 17 octobre 2017, le tribunal administratif de Lille a annulé l'article 2 de la décision du 9 mars 2015 de son directeur général fixant au 10 mars 2014 sans taux d'incapacité volontaire la date de consolidation de l'affection de M. C.... Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de VNF et de M. C... fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 17 octobre 2017 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il a annulé l'article 2 de la décision du 9 mars 2015 de Voies navigables de France..
Article 2 : Le surplus des conclusions de VNF est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de VNF et celles de M. C... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Voies navigables de France et à M. B...C....
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N°17DA02410
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