Par un jugement n° 1709386 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du maire de Coudekerque-Branche du 10 mai 2017, le titre exécutoire émis le 22 mai 2017 à l'encontre de Mme D... et la décision implicite de rejet de son recours gracieux, a déchargé cette dernière de l'obligation de payer la somme de 12 632,37 euros et a condamné la commune de Coudekerque-Branche à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2020, la commune de Coudekerque-Branche, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Lille ;
3°) de mettre à la charge de Mme D... une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me C... pour la commune de Coudekerque-Branche.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Coudekerque-Branche relève appel du jugement du 3 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté de son maire du 10 mai 2017 décidant de procéder à une retenue sur le traitement de Mme A... D..., agent administratif de 2ème classe, pour service non fait entre le 29 juillet 2016 et le 15 mai 2017, le titre exécutoire d'un montant de 12 632,37 euros émis le 22 mai 2017 à l'encontre de Mme D..., la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 6 juillet 2017 et a déchargé cette dernière de l'obligation de payer cette somme.
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire ". Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 4° A un congé de longue durée (...) de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. ". Aux termes de l'article 31 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Le bénéficiaire d'un congé de longue maladie ou de longue durée ne peut reprendre ses fonctions à l'expiration ou au cours dudit congé que s'il est reconnu apte après examen par un spécialiste agréé et avis favorable du comité médical compétent. ". Aux termes de l'article 32 du même décret : " Si, au vu de l'avis du comité médical compétent et éventuellement de celui du comité médical supérieur, dans le cas où l'autorité territoriale ou l'intéressé jugent utile de le provoquer, le fonctionnaire est reconnu apte à exercer ses fonctions, il reprend celles-ci dans les conditions fixées à l'article 33 ci-dessous. " Aux termes de l'article 33 de ce décret : " Le comité médical, consulté sur l'aptitude d'un fonctionnaire territorial mis en congé de longue maladie ou de longue durée à reprendre l'exercice de ses fonctions, peut formuler des recommandations sur les conditions d'emploi de l'intéressé sans qu'il puisse porter atteinte à sa situation administrative. ".
3. Mme D... a été victime, le 19 octobre 2010, d'un accident sur son lieu de travail reconnu imputable au service. Par un arrêté du 19 mai 2015, elle a été placée en congé de longue durée du 29 avril 2014 au 28 septembre 2015. Le 26 août 2016, le comité médical départemental a rendu un avis favorable au renouvellement de ce congé de longue durée pour la période allant du 29 juillet 2015 au 28 janvier 2017. La commune de Coudekerque-Branche a contesté cet avis. Le 31 janvier 2017, le comité médical supérieur a rendu un avis défavorable à une telle prolongation.
4. Par un courrier du 27 février 2017, la commune de Coudekerque-Branche a transmis à Mme D... une copie du procès-verbal du comité médical supérieur et lui a indiqué que " l'application de cette décision entraîne une révision de votre situation administrative à la date du 29 juillet 2016 " et qu'" à cette date et après validation du centre de gestion vous serez placée en disponibilité d'offre pour raison de santé sans traitement ". Par l'arrêté en cause du 10 mai 2017, le maire de Coudekerque-Branche a visé cet avis défavorable du comité médical supérieur et opéré une retenue pour service non fait entre le 29 juillet 2016 et le 15 mai 2017. Il a ainsi nécessairement considéré que le congé de longue durée de Mme D... n'avait pas été prolongé et qu'elle avait perdu le bénéfice de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 précité et le droit au maintien de son traitement.
5. Toutefois, la seule circonstance que le comité médical supérieur ait émis un avis défavorable à la prolongation du congé de longue durée de Mme D... est sans incidence sur sa position administrative. Il appartient au maire d'apprécier, par lui-même, dans quelle position régulière il convient de placer l'intéressée. Si la commune de Coudekerque-Branche soutient que le courrier du 27 février 2017 visé au point 4 a placé l'intéressée en position de disponibilité d'office, eu égard à ses termes et notamment à son caractère conditionnel, ce courrier ne saurait être regardé comme constituant une décision de placement en disponibilité d'office. Par ailleurs, dans le cas où comme en l'espèce, l'administration a introduit un recours contre l'avis du comité médical départemental postérieurement à l'expiration du congé de longue durée, l'administration ne peut pas légalement placer l'intéressée en position de disponibilité d'office de manière rétroactive. Dans ces conditions, et dès lors que ce n'est qu'à compter du 16 mai 2017 que Mme D... a été placée dans une position normale d'activé, elle doit être regardée comme ayant été maintenue en congé de longue durée pour la période du 29 juillet 2016 au 15 mai 2017. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'arrêté du 10 mai 2017 édictant pour service non fait en raison d'un placement en disponibilité, une retenue concernant les sommes perçues par l'intéressée entre le 26 juillet 2016 et 15 mai 2017 et le titre en litige afférent d'un montant de 12 632,37 euros, étaient fondés sur une base légale erronée et devaient être annulés et ont entièrement déchargé Mme D... du paiement de cette somme.
6. Il résulte ainsi de ce qui précède que la commune de Coudekerque-Branche n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du maire de Coudekerque-Branche du 10 mai 2017, le titre exécutoire émis le 22 mai 2017 à l'encontre de Mme D... ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux et a déchargé cette dernière de l'obligation de payer la somme de 12 632,37 euros. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la commune de Coudekerque-Branche une somme de 1 500 euros à verser à Mme D... au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Coudekerque-Branche est rejetée.
Article 2 : La commune de Coudekerque-Branche versera la somme de 1 500 euros à Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me C... pour la commune de Coudekerque-Branche et Me B... pour Mme A... D....
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N°20DA00191
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N°"Numéro"