2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 10 septembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans l'attente, un récépissé de demande de certificat de résidence portant l'autorisation à travailler dans l'attente du réexamen de sa situation.
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme F..., de nationalité algérienne, est née le 21 mars 1978 à Freha, en Algérie. Par arrêté du 10 septembre 2018, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Mme F... relève appel du jugement du 3 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Par arrêté du 25 juillet 2018, régulièrement publié au numéro du recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, le préfet du Nord a donné à Mme D... E..., attachée d'administration d'Etat du pôle départemental France, délégation à 1'effet de signer, notamment, les décisions de refus de titre de séjour, les obligations de quitter le territoire français, les décisions relatives au délai de départ volontaire et celles portant fixation du pays de renvoi. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué manque en fait.
3. La décision en litige vise les textes dont il est fait application et comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait.
4. Il ne résulte ni de la motivation de la décision en litige ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet du Nord n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme F..., qui est accompagnée, en France, par son époux et leurs trois enfants, avant de prendre la décision contestée au regard des éléments qui avaient été portés à sa connaissance. La seule circonstance qu'elle ait été admise à séjourner provisoirement en France, le 20 septembre 2017, afin de pouvoir déposer une demande d'asile, ne saurait suffire à révéler un quelconque défaut d'examen sérieux alors que la décision comporte des éléments précis relatifs à sa situation. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation particulière de l'intéressée doit aussi être écarté.
5. Aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ".
6. Le préfet du Nord produit un extrait de la base de données " Telemofpra ", relative à l'état des procédures des demandes d'asile, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire en application des dispositions de l'article R. 723-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont il ressort que la décision du 26 juin 2018 de la Cour nationale du droit d'asile rejetant la demande d'asile de Mme F... lui a été notifiée le 2 juillet 2018. L'intéressée, qui ne fait état d'aucun élément probant contraire, n'est dès lors pas fondée à soutenir que le 10 septembre 2018, date à laquelle l'arrêté contesté a été pris, elle bénéficiait du droit de se maintenir en France, en application de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Aux termes des dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre, doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI ".
8. Contrairement à ce que soutient Mme F..., les dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer au préfet, lorsqu'un étranger s'est vu refuser la reconnaissance du statut de réfugié et le bénéfice de la protection subsidiaire, d'examiner d'office s'il pouvait être admis au séjour sur un autre fondement. Par conséquent, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées, au motif que le préfet n'a pas recherché si Mme F... pouvait prétendre à un titre de séjour sur un autre fondement que celui de l'asile, ne peut qu'être écarté ainsi que, pour les mêmes motifs, les moyens tirés du défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de Mme F... et de l'erreur de fait.
9. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. Mme F... soutient que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé porte atteinte à son droit de mener une vie familiale normale dès lors qu'elle est entrée en France le 5 juillet 2017, qu'elle était accompagnée par son époux et leurs deux premiers enfants, Saber né le 14 septembre 2011 à Bouira (Algérie), et Abdelouahad né le 26 juin 2013, également à Bouira, et que leur troisième enfant, A..., est né le 27 décembre 2017 à Roubaix (Nord). Elle précise aussi qu'elle suit des cours de français, que son époux souffre d'anxiété et de dépression, qu'il bénéfice en France d'une psychothérapie et qu'il recherche un emploi. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que sa présence en France est récente, et que, si elle a été admise à y séjourner pour demander l'asile, comme son époux, leurs demandes ont été rejetées successivement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile. Mme F... ne soutient pas non plus être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de trente-neuf ans. Comme son époux, qui peut bénéficier d'un suivi médical pour les troubles de santé dont il est atteint en Algérie, elle ne justifie en outre d'aucun lien particulier sur le territoire français en se bornant à faire état du suivi de cours de français. Ainsi, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté, au droit de Mme F... au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. En conséquence, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.
11. Aux termes des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant: " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Ces stipulations sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
12. Il ressort des pièces du dossier que les deux premiers enfants de Mme F... et de son époux, qui est démuni de titre de séjour sur le territoire français, étaient âgés de sept et cinq ans seulement à l'époque de la décision en litige, qu'ils ont vécu en Algérie jusqu'en 2017, et que le dernier enfant du couple était alors en très bas âge. La décision portant refus du titre de séjour n'a pas pour effet de contraindre Mme F... et son époux à se séparer de leurs enfants, qui pourront les accompagner et être solarisés en Algérie. Par suite, elle ne porte pas atteinte aux stipulations précitées de la convention relative aux droits de l'enfant.
13. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
14. Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision refusant à Mme F... une carte de résident ne peut qu'être écarté.
15. Le droit d'être entendu, qui relève des droits de la défense, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, ni sur la décision fixant le pays de destination de son éloignement qui l'accompagne, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour.
16. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré ou renouvelé un titre de séjour et à produire tous les éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir, auprès de l'administration, toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination qui sont prises concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour. Par suite, dès lors que la décision obligeant Mme F... à quitter le territoire français a été prise concomitamment et en conséquence de la décision de rejet de sa demande de titre de séjour, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu préalablement à l'édiction de la décision en litige ne peut qu'être écarté.
17. Il résulte de ce qui a été dit aux points 9 à 12 que le préfet du Nord n'a porté ni une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme F..., protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants, protégé par le stipulations paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, en prononçant la mesure d'éloignement en litige. Ces moyens doivent, dès lors, être écartés.
18. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité.
Sur la décision fixant le pays de destination :
19. La décision fixant le pays de destination comprend les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et indique en particulier que Mme F... n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Algérie. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
20. Il résulte de ce qui a été dit au point 18 que Mme F... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
21. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Doivent également être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... épouse F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... B... épouse F..., au ministre de l'intérieur et à Me G... C....
Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.
N°19DA00742 2