Par une requête, enregistrée le 1er avril 2020, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter l'ensemble des moyens et conclusions présentés par Mme C... devant le tribunal administratif de Rouen.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... A..., présidente de chambre,
- et les observations de Me D..., représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante de Guinée-Bissau, née le 20 février 1987, déclare être entrée en France le 8 février 2014. Elle a déposé le 22 mai 2014 une demande d'asile en préfecture de Seine-Maritime. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 26 décembre 2014 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 avril 2016. Par un arrêté du 24 août 2015, Mme C... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Se maintenant irrégulièrement sur le territoire français, elle a présenté, le 30 janvier 2017, une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 31 janvier 2017, Mme C... a complété sa demande en invoquant également l'article L. 311-12 du même code. Par arrêté du 21 octobre 2019, le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de sa mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Le préfet de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 5 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté.
Sur le bien-fondé du motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Rouen :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
4. Pour retenir que la décision portant refus de titre de séjour repose sur une appréciation erronée dans l'application des stipulations précitées et ainsi annuler cette décision ainsi que, par voie de conséquence, les autres décisions contenues dans l'arrêté du 21 octobre 2019, les premiers juges se sont fondés sur la circonstance que Mme C... a trois enfants à charge, dont deux nés sur le territoire français les 8 octobre 2015 et 17 juillet 2019, que son aîné, présent depuis cinq ans sur le territoire français, est scolarisé en France et que l'état de santé de son deuxième fils nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
5. D'une part, il ressort de l'avis du 24 juillet 2019 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que l'état de santé du deuxième fils de Mme C..., qui a été hospitalisé le 12 avril 2018 pour gastroentérite aiguë et qui souffre d'infections ORL fréquentes, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Il ressort également de cet avis qu'il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel il peut voyager sans risque. Il ne ressort pas des pièces du dossier et, en particulier, du rapport relatif à la situation médicale en Guinée-Bissau établi le 1er juillet 2016 dont se prévaut Mme C..., que le fils de cette dernière ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, alors même qu'il ressort de ce rapport que l'hôpital pédiatrique de Sao José Em Bôr assure un service de chirurgie pédiatrique. En outre, le certificat du 30 septembre 2020 du médecin traitant de l'enfant, dont les connaissances en matière de structures médicales en Guinée-Bissau ne sont pas avérées, et au demeurant postérieur à l'arrêté en litige, indiquant de façon succincte et peu circonstanciée que le suivi dont bénéficie le fils de Mme C... n'est pas accessible en Guinée-Bissau, ne permet pas davantage d'établir cette circonstance. D'autre part, s'il ressort des pièces du dossier que le fils aîné de Mme C... est scolarisé en France en deuxième année de cours élémentaire pour l'année scolaire 2018-2019, celle-ci n'établit pas qu'il ne pourrait pas poursuivre sa scolarité hors de France. En outre, alors que Mme C... se présente comme mère célibataire et n'allègue pas que le père qui a reconnu son deuxième enfant, né en France, entretiendrait des relations avec celui-ci, il n'est pas davantage établi que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer en Guinée-Bissau, où il n'est d'ailleurs pas contesté que réside la fille de cette dernière ainsi que plusieurs membres de sa famille. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par suite, le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 21 octobre 2019.
6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... à l'encontre de l'arrêté contesté devant la juridiction administrative.
Sur les autres moyens :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
7. En premier lieu, la décision en litige vise les dispositions du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celles de l'article L. 311-12 du même code. Elle vise en outre les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Elle fait également état des éléments de faits pertinents relatifs à la situation de Mme C..., en particulier concernant son état de santé, ainsi que celui de son deuxième fils. Dès lors, cette décision comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase de l'alinéa (...) L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".
9. Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
10. Aux termes de l'article 9 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives : " I. - Un référentiel général de sécurité fixe les règles que doivent respecter les fonctions des systèmes d'information contribuant à la sécurité des informations échangées par voie électronique telles que les fonctions d'identification, de signature électronique, de confidentialité et d'horodatage. Les conditions d'élaboration, d'approbation, de modification et de publication de ce référentiel sont fixées par décret. / II. - Lorsqu'une autorité administrative met en place un système d'information, elle détermine les fonctions de sécurité nécessaires pour protéger ce système. Pour les fonctions de sécurité traitées par le référentiel général de sécurité, elle fixe le niveau de sécurité requis parmi les niveaux prévus et respecte les règles correspondantes. Un décret précise les modalités d'application du présent II. / III. (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 2 février 2010 pris pour l'application des articles 9, 10 et 12 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives : " Le référentiel général de sécurité prévu par l'article 9 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 susvisée fixe les règles auxquelles les systèmes d'information mis en place par les autorités administratives doivent se conformer pour assurer la sécurité des informations échangées, et notamment leur confidentialité et leur intégrité, ainsi que la disponibilité et l'intégrité de ces systèmes et l'identification de leurs utilisateurs. / Ces règles sont définies selon des niveaux de sécurité prévus par le référentiel pour des fonctions de sécurité, telles que l'identification, la signature électronique, la confidentialité ou l'horodatage, qui permettent de répondre aux objectifs de sécurité mentionnés à l'alinéa précédent. / La conformité d'un produit de sécurité et d'un service de confiance à un niveau de sécurité prévu par ce référentiel peut être attestée par une qualification, le cas échéant à un degré donné, régie par le présent décret ".
11. Le préfet de la Seine-Maritime a produit les avis médicaux du 25 septembre 2018 et du 24 juillet 2019 concernant respectivement Mme C... et le deuxième enfant de celle-ci. Ces avis médicaux portent la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émet l'avis suivant " et ont chacun été signés par les trois médecins composant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Mme C... ne produit aucun commencement de preuve de ce que les médecins n'auraient pas délibéré de façon collégiale conformément à la mention figurant sur ces avis. Par ailleurs, en se bornant à soutenir que les conditions dans lesquelles ont été apposées les signatures numérisées ne permet pas de s'assurer de l'intégrité du procédé de signature électronique auquel les médecins signataires ont eu recours, sans expliquer en quoi ce procédé aurait méconnu les orientations du référentiel général de sécurité instauré par les dispositions précitées, Mme C... n'apporte pas les précisions suffisantes permettant d'apprécier le bien-fondé du moyen soulevé. Par suite, sans qu'il soit besoin de demander la production des fiches de l'application " Themis " le moyen tiré de ce que l'avis du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration serait entaché d'une irrégularité doit être écarté.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".
13. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
14. La décision de refus de séjour est notamment fondée sur l'avis rendu le 25 septembre 2018 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui a estimé que si l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médical, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Il ressort en outre de cet avis que l'état de santé de Mme C... lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. En se bornant à faire valoir qu'elle souffre de troubles psychiatriques graves dont le défaut de prise en charge pourrait entrainer des conséquences graves, sans toutefois assortir cet argument par aucune pièce probante, l'intéressée n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet sur sa situation, au vu notamment de l'avis précité du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Par suite, Mme C..., qui ne saurait par ailleurs, dans ces conditions, utilement se prévaloir de l'absence, selon ses allégations, d'un traitement médicamenteux approprié à son état de santé dans son pays d'origine, n'est pas fondée à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
15. Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit de l'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ".
16. Ainsi qu'il a été exposé au point 5, Mme C... n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet de la Seine-Maritime au vu, notamment, de l'avis du 24 juillet 2019 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui a estimé que si l'état de santé du deuxième fils de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel il peut voyager sans risque. Dès lors, il n'est pas établi que le deuxième enfant de Mme C... remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit de l'asile doit être écarté.
17. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
18. Mme C... a déclaré être entrée en France le 8 février 2014 et est mère de trois enfants mineurs dont deux sont nés et scolarisés sur le territoire français. Il n'est toutefois pas établi que les enfants de Mme C... ne pourraient poursuivre leur scolarité hors de France. En outre, son deuxième enfant peut bénéficier d'une prise en charge médical appropriée à son état de santé en Guinée-Bissau. Comme indiqué au point 5, il n'est pas établi que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer hors de France. Si Mme C... se prévaut de la circonstance qu'elle suit un traitement médical en France qui est indisponible dans son pays d'origine, il résulte en tout état de cause ce qui a été dit au point 12 qu'il n'est pas établi qu'un défaut de prise en charge médicale de son état de sante serait susceptible d'entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Enfin, Mme C... n'établit pas une intégration d'une particulière intensité sur le territoire français par la seule signature d'un contrat d'intégration républicaine et par la participation à une formation civique ainsi qu'à des cours de langue française. Dans ces conditions, l'intéressée n'est ni fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour a porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni que cette décision méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
19. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent et au point 5, aucune des circonstances de l'espèce n'est de nature à caractériser une atteinte à l'intérêt supérieur des enfants de Mme C.... Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
20. Aux termes de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Font l'objet d'une publication les instructions, les circulaires ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives. Les instructions et circulaires sont réputées abrogées si elles n'ont pas été publiées, dans des conditions et selon des modalités fixées par décret. / Un décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission mentionnée au titre IV précise les autres modalités d'application du présent article. ". Aux termes de l'article L. 312-3 du même code : " Toute personne peut se prévaloir des documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-2, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiés sur des sites internet désignés par décret. / Toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par ces documents pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée. / (...) ". Aux termes de l'article D. 312-11 : " Les sites internet mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-3 sont les suivants : / (...) / ; www.interieur.gouv.fr ; (...) ". Aux termes de l'article R. 312-10 : " Les sites internet sur lesquels sont publiés les documents dont toute personne peut se prévaloir dans les conditions prévues à l'article L. 312-3 précisent la date de dernière mise à jour de la page donnant accès à ces documents ainsi que la date à laquelle chaque document a été publié sur le site. /Ces sites comportent, sur la page donnant accès aux documents publiés en application de l'article L. 312-3, la mention suivante : " Conformément à l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par les documents publiés sur cette page, pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée, sous réserve qu'elle ne fasse pas obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ".
21. Il résulte des dispositions précitées que, pour être opposable, une circulaire du ministre de l'intérieur adressée aux préfets doit faire l'objet d'une publication sur le site www.interieur.gouv.fr par le biais d'une insertion dans la liste définissant les documents opposables et comportant les mentions prescrites à l'article R. 312-10, et doit comporter un lien vers le document intégral publié sur le site " Légifrance.gouv.fr ", site relevant du Premier ministre.
22. Contrairement à ce que soutient la requérante, la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été publiée dans les conditions prévues au point 18. Si elle a fait l'objet d'une mise en ligne sur le site Légifrance le 1er avril 2019, elle ne figure toutefois pas parmi la liste des documents opposables. Sa publication ne comporte ainsi aucune date de déclaration d'opposabilité. Par suite, Mme C... ne peut utilement se prévaloir de cette circulaire, qui ne comporte que des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation.
23. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
24. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, le moyen tiré de ce que la décision contestée a été prise au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté.
25. Il résulte de ce qui a été dit au point 18 que Mme C... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
26. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
27. Il résulte de ce qui a été dit au point 12 que Mme C... n'établit pas que le défaut de prise en charge médicale de son état de santé pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
28. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 16 et 17 les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision en litige sur la situation de Mme C... doivent être écartés.
29. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
30. Les motivations en fait de la décision fixant le pays de destination et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne se confondent pas nécessairement. En revanche, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'arrêté attaqué précise la nationalité de Mme C... et énonce notamment que rien ne permet de considérer que la décision méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, la décision par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a fixé le pays de destination énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de renvoi doit être écarté.
31. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
32. Si Mme C... soutient qu'elle est menacée en cas de retour dans son pays d'origine, elle n'apporte, à l'appui de ce moyen, aucun élément probant. Il ressort des pièces du dossier, au demeurant, que l'intéressée a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et du droit d'asile, puis par la Cour nationale du droit d'asile ainsi qu'il a été rappelé au point 1. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
33. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination de sa mesure d'éloignement est entachée d'illégalité.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :
34. Il résulte de ce qui a été dit au point 24 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision d'interdiction de retour sur le territoire français serait dépourvue de base légale.
35. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / III. L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) "
36. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère
37. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la décision en litige vise les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette décision énonce également les raisons pour lesquelles le préfet de la Seine-Maritime a considéré que Mme C... entrait dans le champ de ces dispositions et pouvait ainsi faire l'objet d'une telle mesure. Le préfet de la Seine-Maritime, qui a ainsi rappelé les dispositions applicables à la situation de Mme C... et exposé les circonstances de fait qu'il a retenues pour prononcer sa décision d'interdiction de retour, a suffisamment motivé cette décision au regard des exigences du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, alors même que le préfet n'était pas tenu de motiver le choix de la durée de cette interdiction de retour, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté
38. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que Mme C... s'est soustraite à une précédente mesure d'éloignement dont elle a fait l'objet par un arrêté du 24 août 2015. Si elle fait valoir être mère de trois enfants, il résulte de ce qui a été exposé précédemment qu'aucune circonstance ne s'oppose à ce que son fils aîné poursuive sa scolarité hors de France et que son deuxième enfant puisse bénéficier d'une prise en charge médicale adaptée à son état de santé dans son pays d'origine. En outre, Mme C..., dont le défaut de prise en charge médicale de l'état de santé n'est pas susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ne se prévaut d'aucun autre lien sur le territoire français et n'établit pas qu'elle serait isolée en cas de retour dans son pays d'origine où il est constant que réside sa fille et plusieurs membres de sa famille. Dans ces conditions, aucune circonstance exceptionnelle n'était susceptible de faire obstacle à la décision attaquée. Dès lors, c'est sans méconnaître les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet de la Seine-Maritime a pu prendre à l'encontre de Mme C... une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, ces moyens ne peuvent qu'être écartés.
39. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 21 octobre 2019 et a enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à Mme C... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées en appel par Mme C..., ainsi que ses conclusions au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 5 mars 2020 du tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 2 : La demande de Mme C... présentée devant le tribunal administratif de Rouen et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme F... C... et à Me B... D....
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
N°20DA00597 4