Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 avril 2019, Mme C... A..., représentée par Me B... demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre subsidiaire, avant dire-droit de procéder à une expertise ;
3°) d'annuler par excès de pouvoir l'arrêté du 16 juillet 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
4°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an, ou, à titre subsidiaire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, en cas d'expertise, dans un délai de trente jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
5°) de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
-le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1.Mme A..., de nationalité ivoirienne, relève appel du jugement du 24 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical (...). ". Aux termes de l'article 5 du même arrêté : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis (...). Cet avis mentionne les éléments de procédure ". Enfin, aux termes de l'article 7 du même arrêté : " Pour l'établissement de l'avis, le collège de médecins peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant rempli le certificat médical. Le demandeur en est informé. Le complément d'information peut être également demandé auprès du médecin de l'office ayant rédigé le rapport médical. Le demandeur en est informé. Le collège peut convoquer le demandeur. (...). ".
3. Mme A... soutient en appel qu'il n'est pas démontré que le médecin rapporteur n'a pas siégé au sein du collège de médecins. Toutefois, l'avis du collège de médecins du 13 mars 2018, mentionne le nom des trois médecins l'ayant signé, et une attestation de l'OFII porte à la connaissance le nom du médecin qui a établi le rapport médical. Cette attestation permet d'établir que le médecin ayant rédigé le rapport médical ne siégeait pas au sein du collège qui a rendu l'avis. Ce document mentionne également que le rapport médical a été transmis au collège de médecins de l'OFII le 16 février 2018. Cette attestation permet d'établir de manière suffisamment certaine que le rapport médical a été transmis et que le médecin auteur du rapport n'a pas siégé au sein du collège des médecins qui a émis l'avis du 13 mars 2018 au vu duquel l'arrêté contesté a été pris. La circonstance que l'avis ne comporte aucun élément concernant une convocation de l'intéressée est en outre sans incidence, dès lors que le collège n'est pas tenu de convoquer le demandeur. En outre, les trois médecins composant le collège des médecins de l'OFII, ayant rendu l'avis en litige, les docteurs Benazouz, Ruggieri et Joseph, ont été désignés par une décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 17 janvier 2017 modifiée par une décision du 24 septembre 2018 publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur. Le moyen tiré du vice de procédure sera donc écarté.
4. Pour contester l'appréciation du collège de médecins de l'OFII, qui a estimé que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, Mme A... produit deux certificats d'arrêt de travail du 25 juin au 24 septembre 2019, pour accident du travail, ainsi que des ordonnances des mois d'avril, mai, juin et aout 2019 établies par un interne en psychiatrie du groupe hospitalier du Havre. Ces documents, qui ne se prononcent pas sur les conséquences de l'absence de prise en charge médicale de la pathologie de l'intéressée, ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collège de médecins. En effet si Mme A... soutient qu'elle a été victime d'un accident du travail survenu en 2019, il ne ressort pas des documents médicaux versés au dossier, qui se bornent à mentionner les médicaments prescrits à l'intéressée, que son état de santé, compte tenu notamment des soins qu'elle a déjà reçus en France, nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, et sans qu'il soit nécessaire d'ordonner avant dire-droit une expertise, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d 'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ..... ".
6. Mme A..., qui ne justifie d'aucune circonstance humanitaire ou exceptionnelle, n'établit pas que la préfète de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, ce moyen sur lequel, contrairement à ce que soutient l'appelante, le tribunal administratif s'est expressément prononcé, doit être rejeté.
7. Enfin, Mme A..., célibataire et sans enfant en France, établit avoir travaillé de décembre 2016 à juin 2017, puis de décembre 2017 à mai 2018 en tant qu'employée commerciale. Elle ne justifie pas, toutefois, d'une insertion sociale et professionnelle intense et stable. Mme A... n'établit pas plus être dépourvue de toute attache en Côte d'Ivoire où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans, alors même que ses parents seraient décédés et que son unique soeur réside en France. Dans ces conditions les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que la décision de refus de séjour et le jugement sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être rejetés.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par exception, de l'illégalité du refus de séjour opposé à Mme A... doit être écarté.
9. En deuxième lieu, les moyens tirés du vice de procédure et de la violation des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés pour les motifs exposés au point 3.
10. En dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les motifs indiqués aux points 6 et 7.
Sur la décision fixant le pays de destination :
11. En premier lieu, lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est aussi loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour et la décision fixant le pays de destination. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que lorsqu'elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L 313-14 du même code, elle n'aurait nullement été informée de ce qu'une mesure d'éloignement pouvait être adoptée à son encontre à l'issue d'un refus de délivrance de titre de séjour. Ainsi, la procédure suivie par la préfète de la Seine-Maritime n'a pas porté atteinte au principe fondamental du droit d'être entendu tel que prévu par les principes généraux du droit de l'Union européenne.
12. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par exception, de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
13.Mme A..., comme il a été dit précédemment, n'établit pas l'exceptionnelle gravité de l'absence des soins requis par son état de santé. Elle ne fait par ailleurs état d'aucun risque précis. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent donc être écartés.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 24 janvier 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente à fin d'injonction et au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
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N° 19DA00945