Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 mars 2014, M.B..., représenté par Me G... F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 23 janvier 2014, en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à sa demande ;
2°) de condamner la commune des Andelys à lui verser la somme demandée de 45 872 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2011 et de la capitalisation annuelle de ces intérêts, à titre d'indemnisation des heures supplémentaires qu'il a effectuées et de réparation de ses préjudices moral et financier ;
3°) de mettre à la charge de la commune des Andelys une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, il a établi la matérialité des heures supplémentaires effectuées par lui à la demande de la commune des Andelys durant la période couvrant les années 2001 à 2008, en produisant des pièces dont le caractère probant n'était pas sérieusement contesté en défense ;
- à supposer même que les pièces qu'il a produites étaient insuffisantes, le tribunal administratif, qui n'a pas justifié suffisamment sa position sur ce point, n'a pu, sans méconnaître son office et entacher son jugement d'irrégularité, écarter ses prétentions sans faire usage de ses pouvoirs d'instruction à l'égard de la commune des Andelys ;
- il établit que ces heures n'ont donné lieu à aucun repos compensateur, ni à aucune rémunération ;
- le refus de lui rémunérer ces heures, alors même qu'il exerçait, avec un sérieux et un dévouement jamais démentis, les fonctions de directeur technique au sein des services communaux depuis près de dix années, lui a causé un préjudice moral, ainsi qu'un préjudice financier correspondant aux sommes qu'il a dû exposer pour faire valoir ses droits ;
- la prescription quadriennale ne saurait valablement être opposée à ses demandes ;
- il est fondé à invoquer, à titre subsidiaire, l'enrichissement sans cause de la collectivité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2014, la commune des Andelys représentée par Me E...H...conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- M.B..., qui supporte en l'espèce la charge de la preuve, n'établit pas avoir effectué le nombre d'heures supplémentaires dont il fait état ;
- le jugement attaqué n'est entaché d'aucune irrégularité ;
- la créance dont se prévaut M. B...est en grande partie atteinte par la prescription quadriennale ;
- le contentieux afférent à l'indemnisation des préjudices invoqués par M. B...n'est pas lié ;
- l'existence d'un enrichissement sans cause ne saurait être invoqué par l'appelant.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;
- le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 ;
- le décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hadi Habchi, rapporteur public,
- et les observations de Me A...C..., substituant Me G...F..., représentant M.B....
1. Considérant que M.B..., recruté à compter du 1er avril 1997 par la commune des Andelys (Eure) en qualité d'agent de maîtrise, a été nommé responsable des services techniques à compter du 1er novembre 2001 ; qu'après avoir exercé les fonctions correspondantes durant neuf années, M. B...a sollicité du maire de la commune, par un courrier du 16 novembre 2010, le bénéfice d'une mise en disponibilité pour convenances personnelles et a fait connaître, dans le même courrier, son souhait de " faire le point sur ses heures supplémentaires " ; que l'intéressé a ensuite fait état d'un total d'environ 1 900 heures supplémentaires non rémunérées et non récupérées, qui correspondraient notamment à des réunions auxquelles il aurait participé entre les années 2001 et 2011 ; que le maire de la commune des Andelys a, le 13 décembre 2010, proposé à M. B...de retenir qu'il avait réalisé 383 heures supplémentaires après le 1er janvier 2009 et d'accorder à l'intéressé une compensation prenant pour partie la forme de repos compensateur et, pour le surplus, d'une rémunération ; que, M. B...ayant rejeté cette proposition, a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, qui, par un jugement du 23 janvier 2014, faisant partiellement droit à sa demande, a condamné la commune des Andelys à l'indemniser, sous la forme d'une combinaison de repos compensateur et de rémunération, des heures supplémentaires effectuées par lui à compter du 1er janvier 2009, sur la base de la proposition qu'elle avait précédemment émise ; que M. B...relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à sa demande ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il résulte de l'examen des motifs de ce jugement que les premiers juges n'ont aucunement estimé que le principe des créances invoquées par M. B...à l'égard de la commune des Andelys était fondé, mais qu'ils ont, au contraire, relevé, d'une part, que les fiches de pointage produites par l'intéressé et non-validées par l'autorité territoriale n'étaient pas de nature à établir la réalité des heures supplémentaires invoquées, d'autre part, qu'à supposer même ces documents suffisants à apporter une telle preuve, il ne résultait pas de l'instruction que ces heures n'aient donné lieu ni à repos compensateur, ni à rémunération ; qu'en statuant ainsi sans estimer devoir faire usage, à l'égard de la commune des Andelys, de leurs pouvoirs d'instruction, les premiers juges, qui ont suffisamment motivé leur jugement sur ce point, n'ont pas méconnu leur office ;
Sur le surplus des conclusions de la requête :
3. Considérant qu'en vertu de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, ces derniers ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, le supplément familial de traitement et les indemnités accessoires ; que les articles 87 et 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale prévoient, en outre, que les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat, auxquels peuvent prétendre leurs agents, lesquels régimes peuvent tenir compte des conditions d'exercice des fonctions ; qu'en vertu de l'article 3 du décret du 14 janvier 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires, la compensation des heures supplémentaires peut être réalisée, en tout ou partie, sous la forme d'un repos compensateur ; que l'article 4 du même décret définit les heures supplémentaires comme les heures de travail effectuées à la demande du chef de service au-delà des bornes horaires définies par le cycle de travail ; qu'enfin, en vertu de l'article 6 du même décret, le nombre des heures supplémentaires accomplies par les agents ne peut dépasser un contingent mensuel de vingt-cinq heures, sauf lorsque des circonstances exceptionnelles le justifient et pour une période limitée, sur décision du chef de service, des dérogations au contingent mensuel pouvant, en outre et à titre exceptionnel, être accordées, après consultation des comités techniques compétents, pour certaines fonctions définies par un arrêté interministériel ; que, par une délibération du 17 février 2003, le conseil municipal des Andelys a expressément autorisé le maire à signer un avenant, reprenant ces dispositions, au protocole d'accord applicable aux agents communaux ;
4. Considérant, en premier lieu, que, pour justifier des heures supplémentaires qu'il aurait effectuées durant la période couvrant les années 2001 à 2004, M. B...se borne à produire un document intitulé " bilan des heures enregistrées sur la badgeuse depuis sa mise en place en novembre 2002 ", qu'il a lui-même établi et qui ne comporte aucune mention selon laquelle le décompte qu'il contient aurait été validé par la commune ; qu'en défense la commune conteste l'existence des heures de travail supplémentaires dont le paiement est en litige ; que face à cette contestation le seul document produit par l'intéressé, même rapproché des quelques convocations à des réunions versées au dossier pour cette période, est insuffisant pour établir la réalité des heures alléguées au titre de celle-ci ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que, s'il résulte de l'instruction et notamment du rapprochement entre les fiches de pointage versées au dossier par M. B...et les nombreuses convocations à des réunions et comptes-rendus de commissions que l'intéressé produit en outre, que celui-ci a été amené à participer, au cours des années 2005 à 2008, à un nombre important de réunions et de commissions organisées hors de ses plages horaires habituelles de travail, la commune des Andelys conteste expressément que M. B...ait effectué, pour prendre part à ces séances, des heures supplémentaires à raison d'un volume excédant celui ayant fait l'objet de sa proposition du 13 décembre 2010 ; que, dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction, d'une part, que le nombre important d'heures supplémentaires dont l'intéressé se prévaut au titre de cette période aurait préalablement fait l'objet d'une autorisation préalable du chef du service, ni d'une dérogation globale dans les conditions prévues par les dispositions rappelées ci-dessus de l'article 6 du décret du 14 janvier 2002, d'autre part et en tout état de cause, que ces heures n'auraient pas, au moins pour partie, fait l'objet de compensations par repos compensateur ou indemnisation, alors d'ailleurs que les fiches de pointage versées au dossier au titre des années 2007 et 2008 font précisément apparaître que l'intéressé a bénéficié de récupérations ;
6. Considérant, en troisième lieu, que M. B...n'allègue pas que le versement de la somme de 6 693,15 euros, qui lui a été servie en exécution du jugement attaqué, lui aurait procuré une compensation insuffisante s'agissant des heures supplémentaires qu'il a effectuées après le 1er janvier 2009 ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que, si M. B...fait état de ce que les modalités suivant lesquelles la commune des Andelys a pris en compte les heures supplémentaires qu'il a effectuées lui auraient occasionné un préjudice matériel, correspondant aux frais qu'il a exposés pour faire valoir ses droits, et un préjudice moral, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 6 que ces modalités ne sont entachées d'aucune illégalité ; qu'il suit de là que les conclusions de la requête tendant à l'indemnisation du second de ces préjudices, dont la réalité n'est, au demeurant, pas établie, et, en tout état de cause, du premier, ne peuvent qu'être rejetées ;
8. Considérant, en dernier lieu, que M.B..., qui n'établit pas, ainsi qu'il vient d'être dit, la réalité des créances dont il se prévaut, ne saurait, en tout état de cause, invoquer un quelconque enrichissement sans cause de la commune des Andelys ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir, ni de se prononcer sur l'exception de prescription quadriennale opposées par la commune des Andelys, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 23 janvier 2014, le tribunal administratif de Rouen n'a fait que partiellement droit à sa demande ; que les conclusions qu'il présente au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.B..., sur le fondement des mêmes dispositions, une somme au titre des frais exposés par la commune des Andelys et non-compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune des Andelys sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et à la commune des Andelys.
Délibéré après l'audience publique du 1er décembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Nizet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 15 décembre 2016.
Le rapporteur,
Signé : J.-F. PAPIN Le président de
la formation de jugement,
Signé : O. NIZET
Le greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Isabelle Genot
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N°14DA00530
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N°"Numéro"