Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 août 2016, M.C..., représenté par Me D... B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 mai 2016 du tribunal administratif de Rouen ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 février 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis d'examiner sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle est dépourvue de base légale ;
- la substitution de base légale opérée par les premiers juges l'a privé de garanties ;
- le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée et n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- le préfet a commis une erreur de fait sur son entrée en France et sur ses garanties de représentation ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ;
- elle est illégale dès lors qu'elle se fonde sur une décision l'obligeant à quitter le territoire illégale ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale dès lors qu'elle se fonde sur une décision l'obligeant à quitter le territoire illégale.
Une mise en demeure a été adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juillet 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la légalité de la décision obligeant à quitter le territoire français :
1. Considérant que la décision en litige mentionne les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré " ;
3. Considérant que la décision contestée mentionne le fait que M. C...ne justifiait pas d'une entrée régulière sur le territoire français et était dépourvu de titre de séjour ; que, dès lors, le préfet s'est fondé sur le 1° du I de l'article L. 511-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'après en avoir informé les parties, et jugé que le fondement légal était erroné, M. C...justifiant être entré régulièrement sous le territoire français en 2002, les premiers juges ont substitué à ce fondement les dispositions du 3° de l'article L. 511-1 du même code, M. C...s'étant vu implicitement refusé un titre de séjour salarié en 2005 ; qu'ils ont pour ce faire considéré que le préfet disposait d'un même pouvoir d'appréciation pour mettre en oeuvre l'une ou l'autre de ces dispositions ; que cette substitution de base légale n'est pas utilement contestée par le requérant qui se borne à soutenir que la procédure n'aurait pas été respectée au motif que la substitution de base légale conduit à ce que l'examen de sa situation soit opérée par les premiers juges et non par le préfet ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;
4. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation de M.C..., ni qu'il se serait estimé en situation de compétence liée pour prendre une mesure d'éloignement à son encontre ;
5. Considérant que si le préfet a retenu à tort que l'entrée de M. C...sur le territoire français était irrégulière, cette erreur, eu égard à la substitution de motif opérée par le tribunal administratif, est sans incidence sur la légalité de l'acte attaqué ; que de même c'est de manière surabondante que le préfet relevait l'absence de garantie de représentation de l'intéressé dès lors que ce dernier n'a pas fait l'objet d'un placement en rétention ; que, par suite, le moyen tiré de que le préfet aurait à cette occasion commis une erreur de fait est sans incidence ;
6. Considérant que M.C..., ressortissant algérien né le 28 août 1978, indique résider en France depuis septembre 2002, dont trois années au cours desquelles il était en possession d'un titre de séjour en qualité d'étudiant et y avoir transféré le centre de ses interêts privés et personnels ; qu'il se prévaut de son expérience professionnelle dans la restauration ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans enfant à charge ; qu'il ne démontre pas, ni même n'allègue être dépourvu de liens dans son pays d'origine qu'il a quitté à l'âge de vingt-quatre ans dans le but de poursuivre des études en France ; qu'ainsi, alors même que son activité professionnelle à temps partiel a perduré après le terme de son contrat de travail, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas porté au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise et n'a par suite pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Sur la légalité de la décision d'accorder un délai de départ volontaire :
7. Considérant qu'il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter les moyens tirés du défaut de motivation, de l'exception d'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire et l'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
8. Considérant la décision obligeant M. C...à quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait dépourvue de base légale ;
9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M.C... ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction assorties d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur et à Me D...B....
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience publique du 15 mars 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Nizet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 30 mars 2017.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : J-J. GAUTHE Le président de la formation de jugement,
Signé : O. NIZET
Le greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Isabelle Genot
1
2
N°16DA01430
1
3
N°"Numéro"