Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er avril 2016 et 28 juillet 2016, la SARL CCSA Tergnier et MeB..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SARL CCSA Tergnier, représentés par la SCP d'avocats Bejin Camus Belot, demandent à la cour :
1°) la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré ;
2°) la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période de janvier 2007 à novembre 2009 et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur la régularité de la procédure :
1. En premier lieu, eu égard aux garanties dont le livre des procédures fiscales entoure la mise en oeuvre d'une vérification de comptabilité, lorsque l'administration, faisant usage de son droit de communication, consulte au cours d'une vérification tout ou partie de la comptabilité tenue par l'entreprise vérifiée mais se trouvant chez un tiers, elle est tenue de soumettre l'examen des pièces obtenues à un débat oral et contradictoire avec le contribuable. Toutefois, il n'en va pas de même lorsque lui sont communiqués des documents ne présentant pas le caractère de pièces comptables de l'entreprise vérifiée. Les relevés de comptes bancaires d'une entreprise dont l'administration a eu connaissance dans le cadre de l'exercice, auprès d'un établissement bancaire, de son droit de communication, ne constituent pas un élément de la comptabilité tenue par cette entreprise.
2. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent, que les relevés de comptes bancaires obtenus par l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès du crédit agricole Nord Ouest, du crédit mutuel Nord Europe et de la banque Scalbert Dupont ne présentent pas le caractère de pièces de la comptabilité de l'entreprise. Par suite, la circonstance que l'examen de ces relevés n'ait pas été soumis par l'administration à un débat oral et contradictoire avec la société, n'entache pas d'irrégularité la procédure d'imposition. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que la société contribuable aurait été privée de la possibilité d'avoir, avec le vérificateur, au cours de cette vérification, un débat oral et contradictoire, dès lors qu'il n'est pas établi que celui-ci se serait refusé à tout échange de vues, au cours des dix interventions sur place et de la réunion de synthèse. Elle n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur.
3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la société appelante, l'arrêt n° 380459 du 12 février 2016 du Conseil d'Etat dont se prévaut l'administration fiscale devant la cour, qui confirme une solution de principe retenue par le Conseil d'Etat par arrêt n° 280252 du 22 novembre 2006, ne constitue pas un revirement de jurisprudence. Par suite, et en tout état de cause, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que l'application de cette jurisprudence devrait être écartée, afin d'assurer le respect du principe de sécurité juridique.
4. En troisième lieu, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que le service aurait été tenu d'informer la société de son intention de demander la communication de différents relevés bancaires dans le cadre de l'exercice de son droit de communication.
5. En quatrième et dernier lieu, dans le cas où la vérification de comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il n'ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat. Lorsqu'après la fin des opérations de contrôle sur place, le vérificateur obtient des pièces nouvelles, celles-ci sont présumées ne pas avoir fait l'objet d'un débat oral et contradictoire, sauf preuve contraire rapportée par l'administration. L'absence de débat, dans une telle hypothèse, n'est en principe pas de nature à affecter la régularité de la procédure d'imposition, sauf s'il apparaît que les pièces recueillies après la fin des opérations de vérification, en raison de leur teneur, de leur portée et de l'usage qui en a été fait par l'administration, impliquaient la réouverture du débat oral et contradictoire sur la comptabilité de l'entreprise.
6. Il résulte de l'instruction, qu'à la suite de la réponse aux observations du contribuable en date du 18 octobre 2010, la société a adressé, le 7 mars 2011, un courrier comportant, selon elle, " l'ensemble des justificatifs en complément de la réponse aux observations du contribuable en date du 18 octobre 2010 " et proposant, par ailleurs, de donner les autres pièces manquantes à l'occasion d'un rendez-vous devant avoir lieu le 17 mars 2011. La société ne fournit à la cour aucun élément précis sur la nature de ces documents, ni, au surplus, sur ce qui aurait fait obstacle à leur production lors de la vérification de comptabilité. En tout état de cause, il est constant que le conseil de la société a revu, une nouvelle fois, l'administration fiscale le 5 décembre 2011, ainsi que cela ressort de la lettre adressée par le service en date du 15 décembre 2011. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que la procédure est entachée d'irrégularité faute qu'ait eu lieu un débat oral et contradictoire sur ces nouvelles pièces.
Sur la majoration pour manquement délibéré :
7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".
8. Il résulte de l'instruction que, pour fonder l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré, le service a retenu, dans sa proposition de rectification, que le grand nombre de pièces justificatives non présentées était constitutif d'un manquement essentiel aux règles comptables et fiscales, que le nombre de charges rejetées et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée effectués étaient importants, que les règles relatives à l'exigibilité de cette taxe sur les prestations de services n'avaient pas été respectées, que les manquements présentaient un caractère répétitif et que nombre des dépenses non justifiées concernaient des prélèvements en espèces. Même si, en cours d'instance, certaines rectifications et certains rappels ont été abandonnés du fait notamment de la production par la société de différentes pièces justificatives, le service, au regard du nombre des insuffisances relevées par le vérificateur et de leur réitération, doit être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe du caractère délibéré des manquements en cause, seuls assortis de la majoration contestée. C'est par suite, à juste titre, que l'administration fiscale a mis à la charge de la société appelante la majoration de 40 % prévue par le a) de l'article 1729 du code général des impôts.
9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société appelante et Me B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL CCSA Tergnier et de Me A...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL CCSA Tergnier, à Me A...B...agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SARL CCSA Tergnier et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°16DA00650