2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 4 mai 2018 du préfet de l'Eure ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation après l'avoir mise en possession d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par une ordonnance du 22 mai 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 28 juin 2019 à 12 h 00.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante algérienne née le 7 novembre 1994, est entrée régulièrement sur le territoire français le 5 juin 2016 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Elle a sollicité du préfet de l'Eure la délivrance d'un certificat de résidence d'un an afin de pouvoir se soigner en France. Par un arrêté du 4 mai 2018, le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Mme C... relève appel du jugement du 15 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté et à ce qu'il soit fait injonction, sous astreinte, au préfet de l'Eure de lui délivrer le titre qu'elle sollicitait, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation.
Sur le refus de titre de séjour :
2. Aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ".
3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait pour celui-ci un défaut de prise en charge médicale en Algérie. Lorsque le défaut de prise en charge médicale risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'intéressé, l'autorité administrative ne peut refuser le certificat de résidence algérien sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause en Algérie. Si de telles possibilités existent mais que l'intéressé fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment au coût du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie.
4. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer à Mme C... le certificat de résidence qu'elle sollicitait pour lui permettre de se soigner en France, le préfet de l'Eure a notamment fondé son appréciation au vu d'un avis émis le 17 avril 2018 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Selon cet avis, la situation de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, elle peut y bénéficier d'un traitement approprié, son état de santé lui permettant, enfin, de voyager sans risque vers son pays.
5. Pour contester l'appréciation à laquelle le préfet de l'Eure s'est livré au regard notamment de cet avis, Mme C... fait état de ce qu'elle souffre d'une épilepsie résistante aux traitements médicamenteux et qu'un projet de prise en charge médico-chirurgicale consistant en l'implantation d'électrodes cérébrales profondes a été élaboré au sein du centre hospitalier universitaire de Rouen où elle est suivie. Elle ajoute qu'une intervention de ce type n'est pas envisageable en Algérie. Il ressort d'un certificat médical établi le 3 juillet 2018 par un praticien hospitalier exerçant au service de neurologie de cet établissement, que Mme C... bénéficie d'une trithérapie antiépileptique et que, devant la résistance de la pathologie aux divers traitements mis en oeuvre, la question se pose de savoir si un traitement chirurgical est envisageable dans son cas, l'implantation d'électrodes profondes, envisagée pour le début de l'année 2019, ayant pour objet de situer le foyer épileptogène à extraire, dans le but d'obtenir une amélioration de l'état de la patiente, qui n'est cependant pas certaine. Par une attestation établie le 18 septembre 2018 et confirmée dans les mêmes termes le 23 septembre suivant, un médecin spécialiste en neurologie exerçant en Algérie et qui suivait Mme C... avant son départ, confirme que l'implantation d'électrodes cérébrales profondes n'est actuellement pas pratiquée dans ce pays.
6. Toutefois, si le certificat médical mentionné au point précédent précise qu'est envisagée la mise en place de telles électrodes afin d'obtenir des informations destinées à guider le geste chirurgical qui pourrait ensuite être pratiqué sur Mme C... dans le but de la soulager, ni ce document, ni aucune des autres pièces versées au dossier ne programme avec précision la réalisation de cette intervention exploratoire, qui est seulement envisagée pour le début de l'année 2019. Au demeurant, il ressort du compte-rendu d'une consultation établi par le même praticien du centre hospitalier universitaire de Rouen le 21 mai 2019, soit plus d'un an après la date à laquelle l'arrêté en litige a été pris, que cette intervention n'avait alors pas été pratiquée, Mme C... venant de subir une exploration intracrânienne par stéréo électroencéphalographie en cours d'interprétation et un premier rendez-vous avec un neurochirurgien étant programmé pour juillet 2019 afin de discuter de la suite de sa prise en charge. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de Mme C... rendait nécessaire, à la date à laquelle l'arrêté contesté a été pris, la mise en oeuvre prochaine et programmée d'une technique exploratoire de haute technicité insusceptible d'être pratiquée en Algérie. Enfin, si un pharmacien exerçant à Tizi-Ouzou a attesté que l'un des médicaments prescrits à Mme C..., à savoir le Zebinix, n'était pas commercialisé en Algérie, cette seule attestation, au demeurant non datée, ne peut suffire à établir que le principe actif entrant dans la composition de ce médicament ne serait pas disponible sous une autre dénomination commerciale dans ce pays, ni, à défaut, que ne pourrait lui être substituée une molécule équivalente. Dans ces conditions, aucun des documents versés au dossier n'est de nature à remettre en cause l'appréciation du préfet de l'Eure selon laquelle l'intéressée peut recevoir un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Il suit de là que, pour estimer que Mme C... n'était pas en situation de bénéficier de la délivrance de plein droit du certificat de résidence qu'elle sollicitait, le préfet de l'Eure n'a pas méconnu les stipulations précitées du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 6 que la décision de refus de titre de séjour n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision obligeant Mme C... à quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de ce refus de séjour doit être écarté.
8. Aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / (...) ". Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, il n'est pas établi que Mme C... était, à la date à laquelle l'arrêté en litige a été pris, au nombre des ressortissants étrangers, visés au 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Eure, en faisant obligation à Mme C... de quitter le territoire français, aurait méconnu ces dispositions doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 et 8 que la décision faisant obligation à Mme C... de quitter le territoire français n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette mesure d'éloignement doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles qu'elle présente au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., au ministre de l'intérieur et à Me B....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de l'Eure.
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N°19DA00335