Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 20 juin 2019, la société Chalet Châtel, représentée par la SELARL A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 avril 2019 ;
2°) d'annuler le refus explicite du 1er mars 2017 de demande d'indemnisation ;
3°) de condamner la commune de Châtel à lui verser une somme de 361 059 euros avec intérêts légaux à compter du 1er mars 2017 ;
4°) de mettre une somme de 20 000 euros à la charge de la commune de Châtel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif a opposé la tardiveté de sa demande indemnitaire ; par sa décision du 12 octobre 2016, la commune l'a invitée à justifier des valorisations des chalets ; la décision de rejet de sa demande indemnitaire du 1er mars 2017 faisant suite à la communication des éléments financiers expressément demandés ne constitue pas une décision confirmative ;
- la commune de Châtel a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en délivrant un permis de construire illégal ;
- le préjudice économique subi du fait de la dépréciation de ses biens s'élève à la somme de 337 000 euros ;
- le lien de causalité est établi ;
- les frais exposés pour faire valoir ses droits s'élèvent à la somme de 24 059 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2020, la commune de Châtel, représentée par la SCP AABM Avocats Associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Chalet Châtel en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- à titre principal, la demande était tardive comme l'a jugé le tribunal administratif ;
- à titre subsidiaire, les conclusions indemnitaires de la requérante sont mal fondées ; si le permis de construire du 2 janvier 2012 est illégal, cette illégalité n'est pas susceptible d'ouvrir droit à réparation dès lors qu'un permis de construire aurait pu être légalement délivré ; d'ailleurs un permis de régularisation a été délivré le 2 mars 2017 ;
- à titre infiniment subsidiaire, la perte vénale de deux chalets " le Grand chalet " et " L'Enneigé " appartenant à la requérante n'est pas démontrée ; les frais de géomètre expert et d'huissier ne sont pas en lien avec le permis de construire en litige ; il en est de même pour les frais d'avocat qui en outre ne peuvent être indemnisés qu'au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 6 janvier 2021 par une ordonnance du 22 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... B..., première conseillère ;
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;
- les observations de Me A... pour la société Chalet Châtel ;
Considérant ce qui suit :
1. Pour rejeter comme tardive la demande de la société Chalet Châtel, les premiers juges ont relevé que la réclamation indemnitaire de la société Chalet Châtel du 12 janvier 2017 portait sur le même objet et reposait sur la même cause juridique qu'une première réclamation du 7 septembre 2016, qui avait fait l'objet d'un précédent refus le 12 octobre 2016.
2. Pour critiquer ce jugement, la société requérante fait valoir que cette décision du 12 octobre 216, qu'elle ne conteste pas avoir reçu le 17 octobre suivant, et qui mentionnait les voies et délais de recours, l'invitait à produire des éléments justificatifs de ses préjudices.
3. Toutefois, si la décision du 12 octobre 2016 précise qu'il appartient à la requérante " de justifier les chiffres qu'elle avance pour la valeur vénale de ses chalets ", elle mentionne qu'elle " vaut donc décision expresse de rejet de la demande indemnitaire préalable ", ainsi que la possibilité de saisir le tribunal administratif de Grenoble d'un recours contentieux dans le délai de deux mois à compter de sa notification. Elle rejette ainsi, sans ambiguïté, au fond la demande préalable d'indemnisation de la société Chalet Châtel et ne peut être regardée comme l'invitant à produire les justificatifs de sa réclamation.
4. La société Chalet Châtel, une fois expiré le délai de deux mois pour contester la décision du 12 octobre 2016, n'était plus recevable à demander au tribunal administratif la condamnation de la commune de Châtel à l'indemniser des conséquences dommageables résultant de l'illégalité du permis de construire délivré à la société Lo Box, quelques soient les chefs de préjudices invoqués, à l'exception des dommages qui seraient nés, se seraient aggravés, ou aurait été révélés postérieurement à la décision du 12 octobre 2016 ayant rejeté sa réclamation. Tel n'est pas le cas de la réclamation indemnitaire du 12 janvier 2017 qui sollicite, outre des frais exposés, l'indemnisation du préjudice économique résultant d'une dépréciation des biens de la société Chalet Châtel entre 2005 et 2015.
5. Il résulte de ce qui précède que la société Chalet Châtel n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont opposé la tardiveté de la demande introductive d'instance, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Grenoble le 7 avril 2017.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la société Chalet Châtel demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la commune de Châtel, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société requérante le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Châtel.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Chalet Châtel est rejetée.
Article 2 : La société Chalet Châtel versera la somme de 1 000 euros à la commune de Châtel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Chalet Châtel et à la commune de Châtel.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
Mme C... B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.
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N° 19LY02415