I) Sous le n° 20LY02788, par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 septembre 2020 et le 26 novembre 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Tasciyan, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 juillet 2020 ;
2°) d'ordonner au préfet de la Haute-Savoie avant dire droit de verser aux débats l'intégralité de l'arrêté du 24 décembre 1996 approuvant le plan de prévention des risques naturels de la commune d'Onnion ;
3°) d'annuler la décision implicite refusant d'abroger l'arrêté du 24 décembre 1996 approuvant le plan de prévention des risques naturels (PPRN) de la commune d'Onnion en tant qu'il classe leurs parcelles en zone VII-3 relevant du règlement C ;
4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 19 910 euros en réparation du préjudice subi du fait du refus fautif de mettre fin à une situation illégale ;
5°) de mettre une somme de 2 500 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la mise à jour de la carte réglementaire figurant dans le PPRN sur le site de la préfecture de la Haute-Savoie le 26 juin 2020 constitue un fait nouveau et le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne tient pas compte de ce fait nouveau dont il a été fait part au tribunal par mémoire complémentaire du 1er juillet 2020 et note en délibéré du 17 juillet 2020 ;
- la carte réglementaire produite par le préfet n'a aucune base légale ;
- le PPRN est entaché d'erreur manifeste d'appréciation en raison d'une contradiction entre, d'une part, le zonage et, d'autre part, la note de présentation, la carte de présentation des secteurs et les cartes des aléas relatives aux secteurs VI et VII et le tribunal a commis une erreur de droit en refusant de tenir compte de ses incohérences ;
- la servitude d'urbanisme, qui leur a été illégalement imposée, constitue une faute qui leur a causé un préjudice matériel d'un montant de 9 410 euros, ainsi qu'un préjudice moral qu'il y a lieu de réparer par l'allocation d'une somme de 10 500 euros.
Par un mémoire en observation, enregistré le 25 novembre 2021, la commune d'Onnion, représentée par Me Fiat, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la fin de non-recevoir tirée de l'absence de démonstration de l'irrégularité du jugement n° 1803094 qui est le seul jugement dont il est demandé l'annulation doit être accueillie ;
- la demande avant dire droit de la communication de l'arrêté du 24 décembre 1996 est irrecevable en tant qu'elle constitue des conclusions nouvelles en appel ;
- les autres moyens ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.
II) Sous le n° 20LY02789, par une requête et des mémoires, enregistrés le 23 septembre 2020 et le 26 novembre 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Tasciyan, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 juillet 2020 ;
2°) d'ordonner au préfet de la Haute-Savoie avant dire droit de verser aux débats l'intégralité de l'arrêté du 24 décembre 1996 approuvant le plan de prévention des risques naturels de la commune d'Onnion ;
3°) d'annuler l'arrêté du 19 mars 2018 par lequel le maire d'Onnion a refusé de leur délivrer un permis de construire modificatif ;
4°) d'enjoindre au maire d'Onnion de leur délivrer le permis de construire sollicité ;
5°) de mettre une somme de 2 500 euros à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la mise à jour de la carte réglementaire figurant dans le PPRN sur le site de la préfecture de la Haute-Savoie le 26 juin 2020 constitue un fait nouveau et le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne tient pas compte de ce fait nouveau ;
- la décision contestée est illégale, par voie d'exception, en ce que les trois motifs de refus se fondent sur les dispositions applicables à la zone bleue VII-3 du plan de prévention des risques, alors que ce classement est entaché d'illégalité et l'avis du préfet est donc lui-même illégal ;
- le motif tiré de l'absence d'étude géotechnique manque en fait et, subsidiairement, justifie d'assortir la décision de prescriptions et non de la refuser ;
- le motif tiré de la collecte des eaux superficielles manque en fait et, subsidiairement, justifie d'assortir la décision de prescriptions et non de la refuser ;
- l'extension est étrangère à la méconnaissance de la règle d'implantation par la construction initiale ;
Par des mémoires, enregistrés le 23 juillet 2021 et le 13 décembre 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune d'Onnion, représentée par Me Fiat, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la fin de non-recevoir tirée de l'absence de démonstration de l'irrégularité du jugement n° 1803094 qui est le seul jugement dont il est demandé l'annulation doit être accueillie ;
- la demande avant dire droit de la communication de l'arrêté du 24 décembre 1996 est irrecevable en tant qu'elle constitue des conclusions nouvelles en appel ;
- les autres moyens ne sont pas fondés ;
- si la juridiction accueille l'argumentation des requérants, il y a lieu de procéder à une substitution de base légale et de fonder le refus sur les dispositions de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme en raison de la réalité des risques pesant sur la parcelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. François Bodin-Hullin, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;
- les observations de Me Tasciyan pour M. et Mme B... ainsi que celles de Me Métier pour la commune d'Onnion ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B... se sont vus délivrer le 18 juin 2009 un permis de construire une maison d'habitation au lieudit Laitraz à Onnion sur les parcelles cadastrées section B n° 1901, 1902 et 3030. Par courrier du 8 novembre 2011 le maire leur a demandé de régulariser les travaux non-conformes au permis délivré. Par un jugement du 3 mars 2015, devenu définitif, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur requête d'annulation du refus de certificat de conformité et du refus de permis de construire modificatif destiné à régulariser la construction réalisée. Par un arrêté du 19 mars 2018, le maire d'Onnion a, sur avis conforme du préfet, de nouveau refusé de délivrer le permis de construire modificatif demandé afin de régulariser les travaux réalisés. Ce refus se fonde, par application du règlement de la zone VII-3 du plan de prévention des risques naturels (PPRN), sur trois motifs tiré de l'absence d'étude géotechnique préalable, des modalités de rejet des eaux pluviales et de l'implantation du projet. M et Mme B... relèvent appel du jugement du 23 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'annulation d'une part, du refus de permis de construire modificatif et d'autre part, du refus d'abrogation de l'arrêté approuvant le PPRN en tant qu'il classe les parcelles en litige en zone VII-3 relevant du règlement C.
2. Les deux requêtes sont dirigées contre un même jugement et présentent à juger des questions communes. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement :
2. M. et Mme B... soutiennent que le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne tient pas compte du fait nouveau constitué par la mise à jour de la carte réglementaire figurant dans le PPRN sur le site de la préfecture de la Haute-Savoie le 26 juin 2020 et porté à la connaissance du tribunal par un mémoire enregistré le 1er juillet 2020, soit après la clôture de l'instruction. Il ressort cependant des pièces du dossier que la carte en cause a simplement fait l'objet d'un coloriage au moyen d'un logiciel plus performant que celui existant à la date d'établissement de la carte initiale. Ainsi la seule mise à jour des couleurs de la carte réglementaire figurant dans le PPRN sur le site de la préfecture de la Haute-Savoie ne constitue pas un élément de fait nouveau. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la décision du préfet est fondée sur la carte réglementaire du PPRN qui n'a pas changé. En l'absence d'élément nouveau, le tribunal n'était pas tenu de procéder à une communication de ce mémoire du 1er juillet 2020 et le jugement est ainsi régulier.
Sur les conclusions dirigées contre le refus d'abrogation partielle du PPRN :
3. M. et Mme B... soutiennent que le PPRN est entaché d'erreur manifeste d'appréciation en raison d'une contradiction entre, d'une part, le zonage et, d'autre part, la note de présentation, la carte de présentation des secteurs et les cartes des aléas relatives aux secteurs VI et VII et le tribunal a commis une erreur de droit en refusant de tenir compte de ses incohérences. Ainsi que le font valoir les requérants le tribunal a retenu à bon droit qu'il existe une incohérence entre d'une part, la carte n°1 " numérotation des secteurs " et les planches VI et VII, propres à ces secteurs et, d'autre part, la carte règlementaire du PPRN. Toutefois la note de présentation n'a pas de valeur réglementaire et la seule carte opposable aux requérants est la carte réglementaire qui détermine la position de ces parcelles au regard des dispositions applicables du PPRN. Ainsi le tribunal administratif n'a commis aucune erreur de droit.
4. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier qu'ainsi que le préfet de la Haute-Savoie le faisait savoir aux requérants par une lettre en date du 19 septembre 2013, qu'en application du zonage réglementaire du PPRN les parcelles en litige sont situées dans la zone réglementaire VII-3, et partiellement en zone réglementaire VI-II, et que le tableau récapitulatif des zones à risques et des règlements types associés y fait correspondre respectivement le règlement C et le règlement Y. L'application du règlement C est justifiée par " la présence du torrent à l'aval [qui] constitue un facteur aggravant, susceptible de déclencher ou d'amplifier le phénomène de glissement de terrain au-dessus, lors d'évènements érosifs générés par une crue ". Ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le PPRN est entaché d'erreur manifeste d'appréciation pas plus que le refus du préfet de procéder à son abrogation.
5. Enfin, M. et Mme B... soutiennent que la servitude d'urbanisme, qui leur aurait été illégalement imposée, constitue une faute qui leur a causé un préjudice matériel d'un montant de 9 410 euros, ainsi qu'un préjudice moral qu'il y a lieu de réparer par l'allocation d'une somme de 10 500 euros. Il y a lieu d'adopter les motifs par lesquels les premiers juges ont retenu que les conclusions indemnitaires devaient être écartées.
En ce qui concerne la légalité du refus de permis de construire du 19 mars 2018 :
6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du PPRN en tant qu'il classe les parcelles des requérants en zone VII-3 soumise au règlement C ne peut qu'être écartée.
7. En premier lieu, le règlement C, impose la réalisation d'une " étude géotechnique préalable à toute construction ". Les requérants font valoir que la demande de permis de construire initiale comporte l'attestation prouvant qu'une étude géotechnique a bien été réalisée. Toutefois, le permis modificatif seul en litige concerne une extension comportant un garage et une terrasse. Ce projet qui correspond à une extension non prévue dans la demande de permis de construire initiale devait, dès lors, faire l'objet d'une étude géotechnique nouvelle en vue notamment de prendre en compte les implications de l'extension projetée. Cette étude, obligatoire, étant nécessaire au service instructeur afin de savoir si le projet peut être réalisé, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'autorisation aurait dû leur être accordée assortie d'une simple prescription tendant à sa réalisation. Par suite, le moyen tiré de l'absence de nécessité d'une étude géotechnique doit être écarté.
8. En deuxième lieu, il y a lieu d'adopter les motifs par lesquels les premiers juges ont retenu à bon droit que le moyen tiré de l'illégalité du deuxième motif de refus de permis de construire et relatif aux modalités de la collecte des eaux superficielles devait être écarté.
9. En troisième lieu, le règlement C dispose que " les nouvelles constructions doivent se situer à 20 m A... la limite amont de la zone inférieure si elle est à risque fort ". M. et Mme B... soutiennent en appel que la zone inférieure de la construction projetée ne serait pas située en zone de risque fort. Il ressort cependant des pièces du dossier que la construction faisant l'objet du permis de construire modificatif se situe à moins de 20 mètres de la limite en amont de la zone à risque fort. Dès lors, ce motif pouvait légalement fonder le refus opposé.
10. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les conclusions relatives à la demande de communication de l'arrêté préfectoral du 24 décembre 1996, que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. et Mme B... demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune d'Onnion, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B... le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune d'Onnion.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.
Article 2 : M. et Mme B... verseront la somme de 2 000 euros à la commune d'Onnion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B..., à la commune d'Onnion et à la ministre de la transition écologique.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 8 mars 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.
Le rapporteur,
François Bodin-Hullin
La présidente,
Danièle Déal
La greffière,
Fabienne Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, à la ministre de la transition écologique et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY02788 - 20LY02789