Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 juillet 2017 et un mémoire complémentaire enregistré le 21 septembre 2018, la SCCV Megève Eight, représentée par la SELARL Itinéraires Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 mai 2017 ;
2°) d'annuler ce refus de permis de construire du 12 mars 2015 et la décision implicite de rejet du recours gracieux ;
3°) d'enjoindre à la commune de lui délivrer un permis de construire modificatif dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de prendre une nouvelle décision dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Megève la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont omis de statuer sur son moyen tiré de l'insuffisante motivation en droit de l'arrêté en litige et sur celui selon lequel elle était en droit de bénéficier d'adaptations mineures ;
- l'arrêté du maire de Megève est insuffisamment motivé ;
- c'est à tort que le maire de Megève a refusé de délivrer le permis au motif que le projet méconnaît la règle de hauteur maximale des remblais fixée à l'article UC 10 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU), cette hauteur n'étant pas modifiée dans la demande de permis modificatif ;
- le dossier de demande de permis modificatif ne comportait pas d'incohérences justifiant qu'un refus de délivrance du permis soit pris ;
- le maire de Megève ne pouvait refuser de délivrer le permis en raison d'une incohérence dans le dossier de demande, sans lui avoir préalablement demandé de compléter son dossier ;
- à titre subsidiaire, le maire de Megève devait délivrer le permis de construire sollicité au bénéfice d'adaptations mineures, en application des dispositions de l'article L. 123-1-9 du code de l'urbanisme, compte tenu de la déclivité et des irrégularités de niveau du terrain naturel initial ou, à tout le moins, délivrer un permis de construire assorti d'une prescription.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 mars 2018, la commune de Megève, représentée par la SELARL Affaires droit public-immobilier, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 15 octobre 2018 par une ordonnance du 24 septembre 2018.
La commune de Megève a produit un nouveau mémoire enregistré le 31 octobre 2018, après clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour la SCCV Megève Eight, ainsi que celles de Me C... pour la commune de Megève ;
Considérant ce qui suit :
1. Le 22 janvier 2013, le maire de Megève a délivré à M. D... un permis de construire en vue de la construction d'un chalet d'une surface de plancher de 137,89 m², au lieu-dit Glaise-ouest. Ce permis a été transféré à la SCCV Megève Eight par arrêté du 27 juin 2013. Par arrêté du 4 février 2014, le maire de Megève a accordé un permis de construire modificatif à la SCCV Megève Eight. Puis, le maire de Megève a établi les 14 août 2014 et 19 février 2015, suite à des visites de contrôle du chantier, des procès-verbaux d'infraction pour des non-conformités aux permis de construire et au plan d'occupation des sols (POS) de la commune. Le 17 octobre 2014, la SCCV Megève Eight a déposé une nouvelle demande de permis de construire modificatif à laquelle le maire de Megève a opposé un refus par arrêté du 12 mars 2015. La SCCV Megève Eight relève appel du jugement du 18 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision implicite rejetant son recours gracieux du 22 avril 2015.
Sur la légalité du refus de permis de construire du 12 mars 2015 :
2. Pour refuser de délivrer le permis modificatif sollicité, le maire de Megève a estimé que le projet méconnaît les dispositions de l'article UC 10 du règlement du POS relatives à la hauteur des remblais et que le dossier de demande comportait des incohérences qui ne permettaient pas au service instructeur de procéder à son instruction.
3. En premier lieu, aux termes de l'article UC 10.1 du règlement du POS de Megève relatif à la hauteur maximale des constructions : " La différence de niveau entre tout point situé hors-oeuvre de la construction et le point du sol naturel situé à l'aplomb, avant et après terrassement, est limitée à 9 m. sans que cette différence de niveau à la verticale extérieure de la sablière et le point du sol naturel situé à l'aplomb puisse être supérieure à 7 m. /A... remblaiement d'une hauteur maximum de 1 m. par rapport au sol naturel pourra être toléré. / En cas d'utilisation de cette tolérance, les hauteurs définies ci-dessus seront prises à partir du sol fini, remblayé. (...) ".
4. Le maire de Megève a estimé que le terrain naturel au droit de la façade nord-ouest du projet excède, d'une hauteur comprise entre 1,11 mètre à l'angle nord du bâtiment et 1,32 mètre en milieu de façade, la hauteur du terrain naturel. Il ne ressort toutefois d'aucune des mentions de la demande de permis modificatif, qui porte sur la rampe d'accès en sous-sol, la dimension et la position des ouvertures, la création d'un auvent, la création d'un balcon et le déplacement de la cheminée, que le pétitionnaire ait entendu modifier la hauteur du remblai le long de la façade nord-ouest. Un tel rehaussement ne ressort pas non plus des plans de façade produits à l'appui du dossier de demande de permis modificatif, la mention d'un écart d'un mètre entre le terrain aménagé et le terrain naturel ne pouvant être comparée avec celle d'un écart de 97 centimètres figurant dans la demande initiale, sur un autre point non situé au droit de la façade. Si le maire de Megève fait valoir par ailleurs que les constatations opérées en cours de chantier ont permis de mettre en évidence que le plan de façade produit à l'appui de la demande de permis initial était inexact et incohérent avec les autres documents produits à l'appui de cette demande, cette circonstance n'est susceptible que d'affecter la légalité du permis initial. Dans ces conditions, le maire de Megève ne pouvait se fonder sur la méconnaissance des dispositions du règlement du POS citées au point précédent pour refuser de délivrer le permis de construire modificatif, qui porte sur des points étrangers aux règles régissant la hauteur des remblais.
5. En second lieu, et compte tenu de l'objet de la demande de permis modificatif, qui ne porte pas sur la hauteur des remblais, le maire de Megève ne pouvait se fonder sur de prétendues incohérences du dossier de demande de permis de construire modificatif relatives aux remblais pour refuser de délivrer ce permis.
6. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de justice administrative, l'autre moyen présenté à titre principal par la requérante n'apparaît pas susceptible, en l'état du dossier, de fonder l'annulation de l'arrêté en litige.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué, que la SCCV Megève Eight est fondée à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mars 2015 par lequel le maire de Megève a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux contre ce refus.
Sur les conclusions à fins d'injonction :
8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".
9. Le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le maire de Megève délivre le permis de construire modificatif sollicité. Il y a seulement lieu, dès lors, de lui enjoindre de procéder à une nouvelle instruction de la demande de la SCCV Megève Eight dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
10. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Megève le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SCCV Megève Eight. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme que la commune de Megève demande au même titre soit mise à la charge de la SCCV Megève Eight, qui n'est pas partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 mai 2017 et l'arrêté du maire de Megève du 12 mars 2015 refusant à la SCCV Megève Eight la délivrance d'un permis de construire modificatif, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au maire de Megève de procéder à une nouvelle instruction de la demande de permis de construire modificatif de la SCCV Megève Eight dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : La commune de Megève versera à la SCCV Megève Eight la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions des parties sont rejetées pour le surplus.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCCV Megève Eight et à la commune de Megève.
Délibéré après l'audience du 5 février 2019 à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre,
M. Antoine Gille, président-assesseur,
M. Thierry Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 mars 2019.
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N° 17LY02764
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