Par une requête enregistrée le 2 décembre 2014, et un mémoire enregistré le 24 novembre 2015, la commune de Chamblet, représentée par la société d'avocats Collet, de Rocquigny, Chantelot, Romenville et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 14 octobre 2014 ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme B... devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision contestée est suffisamment motivée ;
- l'exercice du droit de préemption urbain était légalement justifié par la réalité d'un projet d'actions et d'opérations d'aménagement, défini précisément dans l'étude préliminaire de l'OPAC de Commentry auquel se réfère la délibération du conseil municipal en date du 27 août 2013 ;
- le moyen tiré d'une absence de concertation des élus est inopérant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2015, M. et MmeB..., représentés par la société d'avocats Bernardet, concluent :
- au rejet de la requête,
- à la condamnation de la commune de Chamblet à leur verser une somme de 5 000 euros en réparation des préjudices subis en conséquence de la résistance abusive que constitue l'appel qu'elle a interjeté ;
- à ce qu'une somme de 200 euros soit mise à la charge de la commune de Chamblet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par commune de Chamblet ne sont pas fondés.
La commune de Chamblet a produit un mémoire enregistré le 10 décembre 2015, qui n'a pas été communiqué.
Par ordonnance du 17 novembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 11 décembre 2015.
La commune de Chamblet a produit un mémoire enregistré le 6 janvier 2016.
Par un courrier du 27 janvier 2016, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que la " décision " annulée par le jugement attaqué est insusceptible de recours en excès de pouvoir, dès lors qu'elle ne fait pas grief à M. et MmeB....
Par un mémoire enregistré le 28 janvier 2016, la commune de Chamblet a présenté des observations.
Par un mémoire enregistré le 3 février 2016, M. et Mme B...ont présenté des observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lévy Ben Cheton,
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public.
1. Considérant que selon un acte en date du 18 juin 2013, les consorts C...ont consenti à M. et Mme B... une promesse de vente relative à un immeuble à usage d'habitation situé sur les parcelles cadastrées section AB n°s 94 et 161, 1 rue du Sabotier à Chamblet (Allier) ; que leur notaire en a informé la commune de Chamblet par une déclaration d'intention d'aliéner dont la commune a accusé réception le 26 juin 2013 ; que le maire de la commune a retourné le 2 août 2003 ce formulaire (cerfa n° 10072-02), dont la rubrique K (" cadre réservé au titulaire du droit de préemption ") était revêtue de la mention : " la commune décide d'appliquer son droit de préemption sur les parcelles ", datée du 2 août 2003, et sous laquelle étaient apposés le cachet et la signature du maire de Chamblet ; qu'enfin, le 27 août 2013, le conseil municipal a adopté une délibération, au terme de laquelle il a décidé de l'acquisition desdites parcelles, au prix de 38 000 euros et autorisé le maire à signer l'acte à intervenir ; que la commune de Chamblet relève appel du jugement du 14 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé, à la demande de M. et Mme B..., la décision de son maire, en date du 2 août 2003 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 231-7 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Le silence gardé par le titulaire du droit de préemption dans le délai de deux mois qui lui est imparti par l'article L. 213-2 vaut renonciation à l'exercice de ce droit de préemption. Ce délai court à compter de la date de l'avis de réception postal, du premier des accusés de réception ou d'enregistrement délivré en application du I de l'article 5 de l'ordonnance 2005-1516 du 8 décembre 2005, ou de la décharge de la déclaration faite en application de l'article R. 213-5 " ; qu'aux termes de l'article R. 213-8 du même code : " Lorsque l'aliénation est envisagée sous forme de vente de gré à gré ne faisant pas l'objet d'une contrepartie en nature, le titulaire du droit de préemption notifie au propriétaire : / a) Soit sa décision de renoncer à l'exercice du droit de préemption ; / b) Soit sa décision d'acquérir aux prix et conditions proposés, y compris dans le cas de versement d'une rente viagère ; / c) Soit son offre d'acquérir à un prix proposé par lui et, à défaut d'acceptation de cette offre, son intention de faire fixer le prix du bien par la juridiction compétente en matière d'expropriation (...) " ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune (...) " ; que l'article L. 2122-22 du même code disposait que : " Le maire peut (...) par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) / 15° D'exercer, au nom de la commune, les droits de préemption définis par le code de l'urbanisme, que la commune en soit titulaire ou délégataire, de déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien selon les dispositions prévues au premier alinéa de l'article L. 213-3 de ce même code dans les conditions que fixe le conseil municipal (...) " ;
5. Considérant que la mention, apposée sur la déclaration d'intention d'aliéner par le maire de Chamblet le 2 août 2013, selon laquelle " la commune décide d'appliquer son droit de préemption sur les parcelles ", ne mentionnait pas de prix ; que, dès lors, faute d'indication, dans le délai de deux mois suivant la déclaration d'intention d'aliéner prévu à l'article L. 213-2 du code de l'urbanisme, sur le prix auquel la commune envisageait d'acquérir la parcelle concernée, l'acte du maire, matérialisé par la mention manuscrite apposée le 2 août 2013 sur le formulaire de déclaration d'intention d'aliéner, ne pouvait avoir pour effet de s'opposer à ce que le compromis de vente signé par M. et Mme B... soit mis à exécution ; que, par suite, cet acte, qui ne faisait pas grief aux intéressés, n'est pas susceptible de recours pour excès de pouvoir ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête, la commune de Chamblet est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'acte du maire du 2 août 2013 ;
Sur les conclusions reconventionnelles formulées par M. et MmeB... :
7. Considérant que M. et Mme B...demandent à la cour de condamner la commune de Chamblet à leur verser une somme de 5 000 euros en réparation des préjudices subis en conséquence de la " résistance abusive " que constituerait l'appel interjeté par la commune ; qu'une telle faute n'est cependant nullement établie, la commune n'ayant au demeurant pas succombé dans l'instance ; que, dès lors, ces conclusions indemnitaires de M. et Mme B...doivent, en tout état de cause, être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Chamblet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent M. et Mme B...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B... une somme au titre des frais exposés par la commune de Chamblet et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1301371 du 14 octobre 2014 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
Article 2 : Les conclusions de M. et Mme B...sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Chamblet est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Chamblet et à M. et Mme A... B....
Délibéré après l'audience du 16 février 2016, à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Picard, président-assesseur,
M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 mars 2016.
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N° 14LY03650
mg